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Au vu du résultat des élections législatives du dimanche 26 octobre 2014, on s'étonnerait presque de voir que Nida Tounes ne devancerait pas de loin Ennahdha.

Par Rachid Barnat

Le 26 octobre 2014 entrera dans l'histoire de la Tunisie comme une étape importante dans l'instauration de la démocratie en Tunisie. Ce fut un accouchement au forceps d'une démocratie au goût amer.

A voir les plateaux TV des chaînes de TV nationales et privées, on remarque une jubilation de soulagement qu'expriment les invités politiques, observateurs, journalistes et autres analystes, comme si tous n'ont retenu de ce scrutin législatif que le net recul d'Ennahdha et l'émergence de Nida Tounes.

Faut-il rappeler l'enjeu de ces élections?

Les «pressions» étrangères en question

Si pour les Tunisiens, il était clair qu'il fallait écarter les Frères musulmans de tout pouvoir pour leur idéologie néfaste, qui a mis à genou la Tunisie en 3 ans de pouvoir, et les occasions n'ont pas manqué pour leur dire leur rejet (assassinats politiques de de Lotfi Nagdh, Chokri Belaid, Mohamed Brahmi...); pour l'opposition, son attitude vis-à-vis des Frères nahdhaouis, a agacé bon nombre de Tunisiens d'autant qu'elle traitait les «khwanjia» nahdhaouis comme s'ils étaient incontournables et indispensables à la vie politique en Tunisie. Obéirait-elle à des «pressions» étrangères qui veulent que les islamistes restent coûte-que-coûte au pouvoir ou du moins dans le paysage politique en Tunisie, depuis que leurs «frères» en Egypte ont été écartés du pouvoir et leur parti a été interdit pour cause de terrorisme? Il faut croire que oui!

Faisant de la Tunisie un laboratoire pour expérimenter de nouveaux concepts «démocratiques», qui choqueraient les démocrates des vieilles démocraties mais qu'ils imposent aux démocrates tunisiens.

Rappelez-vous les manifestations massives quotidiennes durant plus d'un mois, pour dire «dégage» à Ennahdha, responsable de tous les malheurs des Tunisiens et des assassinats politiques ! Que fit chaque fois l'opposition? Elle a repris le dialogue après chaque assassinat avec les responsables politiques de la mort de Lotfi Nagdh, de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi ! Et de «consensus», en «dialogue national», concepts que découvrent ahuris les démocrates tunisiens, l'opposition a, à chaque fois légitimé, un parti qui a perdu toutes les légitimités et en premier la légitimité électorale. Ce qui est une première en «démocratie»: des élus refusent de respecter le peuple ni le mandat qu'il leur accorde ni sa durée... et l'opposition acquiesce.

Et depuis les Tunisiens ont compris le rôle joué par les Américains et les Européens qui soutiennent les islamistes: ils voulaient par tous les moyens imposer les Frères musulmans aux Tunisiens, poussant le cynisme jusqu'à prétendre que leur islamisme est modéré et compatible avec la démocratie. D'où leur idée de «consensus» et de «dialogue national» pour redonner leur chance à des «frères» que beaucoup de Tunisiens exècrent de plus en plus, transformant ainsi la Tunisie en laboratoire expérimental pour une «démocratie» spéciale pour le «monde arabe», après l'échec de la démocratie version occidentale en Irak, inadaptée aux «Arabes», selon leurs analystes!

Selon les estimations des observateurs, Ennahdha compterait entre 500.000 et 800.000 entre adhérents et sympathisants. Alors que le nombre d'électeurs potentiels tunisiens est estimé à 5 millions.

Le succès mitigé des démocrates

Au vu du résultat des élections législatives et des premières estimations, on s'étonne de voir que Nida Tounes ne récolterait que 37% voix alors qu'Ennahdha en récolterait 26%!

Comment expliquer cela ?

Le laxisme dont a fait preuve l'opposition envers les Frères musulmans nahdhaouis a désespéré et découragé beaucoup de Tunisiens qui ont opté pour l'abstention.

Dans le contexte de chaos organisé par Ennahdha, il lui était facile de mobiliser ses sympathisants car le parti islamiste a les moyens financiers pour le faire grâce à la générosité du sponsor des Frères musulmans: l'émir du Qatar.

Ennahdha, durant le gouvernement de la troïka qu'il dominait, a infiltré tous les rouages de l'État et ses administrations, comptant bien sur ses hommes de les miner de l'intérieur.

Lors des élections législatives, les Tunisiens ont pu constater à leurs dépens, une fois de plus, l'étendue de la mainmise d'Ennahdha sur leurs administrations, puisque bon nombre d'entre eux n'ont pu voter pour raison de mauvaise organisation: amateurisme, diraient certains ou sabotage penseraient d'autres.

Faut-il rappeler le rôle du terrorisme qui, comme par hasard, reprend chaque fois qu'Ennahdha est dans la difficulté... Les derniers actes terroristes ont, d'ailleurs, eu lieu en pleine période électorale, à dessein?

Certains «positivistes», comme pour se donner du courage, estiment que c'est mieux que rien et surtout mieux que d'autres pays arabes encore dans la panade. Puisque la Tunisie, initiatrice du «printemps arabe», est encore la première à avoir tiré son épingle du jeu malgré l'ouragan islamiste qui l'a traversé durant trois ans.

L'avenir nous dira si la démocratie naissante, malgré son accouchement douloureux, survivra et grandira pour permettre l'entrée de la Tunisie dans le club des grandes démocraties.

Blog de l'auteur. 

 

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