Rachid Barnat écrit – Les membres de l’Assemblée constituante doivent éviter les compromissions et les demi-mesures et être fermes sur les principes.
Vous venez d’être élus à l’Assemblée Constituante, au terme d’une période révolutionnaire et à la faveur d’un scrutin historique qui a été à la fois transparent pour la première fois de l’histoire de la Tunisie et qui a vu une participation magnifique qui montre l’attachement des Tunisiens à la liberté de vote ; ce qui vous donne une très grande légitimité.
Être à la hauteur des enjeux
Une fois de plus les Tunisiens auront étonné le monde entier par l’engouement qu’ils ont manifesté pour ces élections, après l’avoir étonné par leur révolte par laquelle ils ont chassé leur dictateur.
Vous mesurez, je le pense, le rôle historique que vous allez jouer et, du coup, la responsabilité immense qui est la vôtre, à chacun d’entre vous, à l’égard du peuple tunisien. Au moment où vous allez rédiger ensemble la nouvelle Constitution du pays, sachez que vos enfants vous regarderont agir et que vous aurez à leur rendre des comptes.
Essayez donc d’être à la hauteur des enjeux qui sont de donner à vos enfants un pays qui leur permettra de s’épanouir et de progresser.
Je pense que vous avez tous la volonté de faire le mieux pour votre pays et je voudrais vous rappeler quelques règles simples qui devraient, selon moi, guider votre action.
Il faut d’abord que vous ayez conscience que vous n’allez pas, dans l’immédiat, agir sur la vie politique au jour le jour mais que vous allez réfléchir et voter sur les règles d’organisation des pouvoirs car ce sont ces règles qui ensuite permettront d’organiser une vie politique riche et porteuse d’espoir.
Que veulent les Tunisiens ? En faisant leur révolution et en chassant le dictateur, ils ont adressé quelques demandes simples.
Ils ont souhaité d’abord la liberté. Ils ont dit qu’ils ne voulaient plus vivre dans la peur et dans le silence.
Ils ont ensuite dit qu’ils voulaient éradiquer la corruption sous toutes ses formes et permettre l’existence d’un véritable Etat de droit.
Ils ont dit enfin qu’il fallait mettre un terme au déséquilibre économique trop profond entre les régions et entre les différentes classes sociales.
Je ne crois pas trahir les aspirations du peuple tunisien en les résumant en ces trois demandes essentielles.
Je voudrais vous dire que pour parvenir à les satisfaire, la Constitution devra respecter un certain nombre de principes essentiels.
Eviter les compromissions
Si l’on veut que la liberté réclamée par le peuple existe réellement, il faut que l’on ne passe pas d’une dictature à l’autre. Or cela exige selon moi que la Constitution se réfère expressément à la Déclaration Universelle des droits de l’homme qui n’est pas réservée à l’Occident mais, comme son titre l’indique, à l’ensemble des hommes.
Si l’on veut éradiquer la corruption et éviter qu’elle ne gangrène, à nouveau, la vie du pays ; il faut que la Constitution organise une justice indépendante, disposant de réels pouvoirs et que, nul dans le pays, ne soit à l’abri de cette justice.
Enfin, la Constitution devra organiser la vie des régions de manière à assurer un égal développement pour chacune d’elle.
Voilà, me semble-t-il, les principes qui devront guider vos choix. Vous devrez éviter les compromissions, les demi-mesures pour satisfaire chacun.
Soyez fermes sur ces principes et le peuple tunisien vous en sera reconnaissant.