Dr Lilia Bouguira écrit – A toi Gilbert, j’aimerais dire merci pour cet amour si intense, si fort, si fougueux que tu aurais aimé encore nous transmettre en insistant sur le fait qu’aucun parti ne devait être notre ennemi.


 

Je viens par ce texte me lever faire une grande courbette, un chapeau bas, à un monsieur d’il n’y a pas si longtemps, devenu un grand et solide ami.
Mon Dieu ce que nous devons à Facebook, certainement quelques couples ou amours en faillite, mais ils l’étaient déjà je crois parce que le ver devait être dans le fruit bien avant FB.
FB a été et est encore un outil merveilleux. Merveilleux parce qu’il a rapproché, raccommodé, aidé ne serait-ce qu’à catalyser, transporter voire même exporter la bénite révolution, la nôtre sur laquelle nous portons actuellement de terribles angoisses.

Je dois à Facebook de m’avoir ouvert à un monde nouveau certes virtuel, mais le temps d’un clic, devenu de solides amis des leaders de révolution qui, tels que @Yahya revolutionnist, mon ami l’Egyptien, est venu lors de la révolution de Omou Edonya successive à la nôtre échanger nos angoisses, nos libertés, nos moyens de communiquer, de se défendre dans la rue contre nos oppresseurs qui ne voulaient pas déloger, contre notre police qui continuait à nous battre à nous opprimer, et même à tuer même après le départ de nos führers.


La faculté de Manouba

Je ne m’amuserai pas à dresser le nombre de blessés et de morts tombés sous l’ordre de Ben Ali et ceux de Caïd Essebsi par exemple.

Nous avons échangé des fois débilement, comme des vaillants, comment contrer les coups de nos bourreaux, les antidotes manuels et à notre portée des échanges de lacrymo...

Nous avons déporté nos rêves de liberté un peu partout dans le monde, en Egypte, en Libye, et encore proche, en Espagne ou encore en Belgique, et plus loin, à New York, à Montréal où encore nous leur avons appris à scander en arabe : «Echaab Yourid Iskata Anidham».

C’était fabuleux, unique partageable, et mon Dieu combien libérateur. Il était bon ce temps-là et combien solidaires de nos frères nous étions ! Ni homme ni femme. Ni droite ni gauche. Je n’ai jamais eu à m’en soucier, bien au contraire. Plus maintenant, à ma grande désillusion, et pourtant je ne lâcherai pas, je ne dirai pas malheureusement comme rectifie Gilbert, je dirai encore que c’est possible que nous arriverons : juste de la bonne foi sous tous les angles et nous y arriverons. Et comment ?

Lorsque des gens du gabarit de Gilbert nous harnache en non stop de sa présence, de son temps, de sa vie de famille d’expatrié, d’amoureux fou de son pays, oui de son pays. Je crois qu’il n’a jamais connu d’aussi grand amour que celui de sa foutue patrie. Ce qu’il est bon de l’entendre nous la raconter sa Tunisie, la Tunisie de son enfance, de sa jeunesse, de ses délires fougueux, de ses douleurs, de ses années à la prison de Borj Roumi (près de Bizerte), de ses souffrances jamais racontées par cette même Tunisie tellement adorée.

C’est de tout cela que j’aurais aimé parlé lors de la journée de commémoration de Zouhair Yahyaoui, le prisonnier martyr d’internet d’il y a trois jours au Palais de Carthage, si ce n’était du ressort d’une déviation de débat contraire à nos attributs.

J’aurais aimé leur dire que nous pouvons ne pas avoir le même avis, la même position, mais que tous nous devons construire cette Tunisie nouvelle avec toutes ses disparités, ses divergences, ses contraires, ses contradictions… Tout cela rendu discutable, faisable, joignable, transportable grâce à ces outils universels Twitter, Facebook et Youtube, Dailymotion…, que nos jeunes ont su ramener jusqu’à nous en temps de répression, que dire lorsque la liberté d’expression est à l’ordre du jour.

Ramons avec nos difficultés sans nous déchirer ni nous entretuer mais en nous outillant de plus d’informations, de connaissances, de culture, d’histoire de nos aînés et à venir pour nous mieux nous éclairer dans nos navigations telle qu’une énorme boussole dont le nord sera toujours dicté selon les objectifs d’une nation sans exclusion aucune.

A toi Gilbert, j’aimerais dire merci pour cet amour si intense, si fort, si fougueux que tu aurais aimé encore nous transmettre hier encore à Ibn Rachiq en insistant sur le fait que ni Ennahdha ni tout autre parti légitime ne devait être notre ennemi s’il desservait les intérêts de ce peuple en travail et revendications justes et équitables.

Hier encore, je n’ai rien pigé, pitoyablement rien pigé, au discours des hommes politiques car je laisse la politique à ceux qui savent la faire, mais j’ai saisi par contre cet amour, oui le tien, qui dégoulinait de ta personne, de ton esprit, de ce corps malade pour ce pays que Gilbert n’a jamais voulu quitter. Te l’a-t-il si bien rendu?

Je crois que oui, puisqu’il te (nous) fait aimer, élever au rang des immortalisés.

Ecris Gilbert, écris mon ami, écris encore pour nous, pour ce pays que tu vis à la folie, de la tête au pied, à l’infinie de ta personne.

Ecris encore pour nous les enfants de ton pays.