Les travaux du Congrès national pour l’emploi ont démarré, jeudi matin, avec la participation d’intervenants et invités prestigieux, nationaux et internationaux, et en présence d’une assistance très nombreuse.
Dans son allocution d’ouverture, le ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi, Abdelwaheb Maâtar a souligné l’importance de la question de l’emploi en Tunisie aujourd’hui, se félicitant du consensus national prévalant entre tous les partis politiques et les partenaires sociaux pour faire de l’emploi la première priorité nationale.
La faute à Ben Ali et à l’ancien régime
Comme figure obligée dans les interventions des membres du gouvernement, le ministre a mis en cause (encore?) l’ancien régime dans le blocage de toute réflexion sérieuse sur la question, en raison, a-t-il indiqué, de la corruption qui caractérisait l’économie tunisienne et des freins à la liberté d’expression en général et à la liberté académique en particulier.
Mais qu’en est-il maintenant que l’ancien régime est tombé et qu’un gouvernement légitime aux affaires? La question de l’emploi a-t-elle enregistré une avancée quelconque?
Pour M. Maâtar, qui est à son poste depuis 7 mois, tout semble commencer avec l’actuel congrès, dont il attend «l’élaboration d’un véritable programme d’urgence pour l’emploi et d’une stratégie nationale en la matière».
Youssef Qaryouti, directeur du bureau régional Afrique du Nord de l’Organisation internationale du travail (Oit), a rappelé, pour sa part, que l’emploi est avant tout une question de dignité humaine. L’emploi n’est pas du seul ressort de l’Etat, a-t-il indiqué, mais c’est une question qui nécessite la conjugaison des efforts de tous les acteurs concernés, et doit être pensé à la lumière de stratégies nationales dans tous les domaines en rapport avec cette question. Il n’a pas manqué, lui non plus, de mettre en cause le modèle économique mis en place par l’ancien régime, car il ne prenait pas en compte la dimension sociale de la croissance, dont l’emploi fait partie, a-t-il précisé, affirmant l’engagement de son organisation à soutenir l’effort de la Tunisie en matière de lutte pour l’emploi.
Le ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi marocain, Abdelwahed Souhil, a mis en exergue, de son côté, le souci partagé et la proximité des vues entre le Maroc et la Tunisie en matière de lutte contre le chômage, indiquant que le Maroc suit de près l’expérience tunisienne dans le domaine. Les solutions trouvées dans un pays pourraient en effet inspirer l’autre, tant les réalités socio-économiques sont très semblables.
Et aux forces néolibérales et capitalistes
Mohamed Msalmi, secrétaire général adjoint de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt), a mis en cause, dans la situation actuelle de l’emploi en Tunisie, ce qu’il a appelé les idées et les forces néolibérales et capitalistes, ainsi qu’un modèle économique défaillant. Passant en revue plusieurs indicateurs de l’emploi (ou, plutôt, du chômage, qui touche aujourd’hui plus de 800.000 personnes, dont 200.000 diplômés du supérieur), M. Msalmi a appelé à réhabiliter le rôle de l’État, en tant que premier employeur du pays, à orienter les politiques publiques dans le sens d’une meilleure répartition des richesses entre les régions. Il a, en outre, appelé à renforcer les mécanismes du dialogue social et rappelé la proposition de l’Ugtt d’inscrire les droits économiques et sociaux du citoyen dans la nouvelle constitution.
L’entreprise comme moteur de l’emploi
Le représentant de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), Khelil Ghariani, a mis en exergue le rôle de l’entreprise comme moteur de la croissance et de l’emploi, et souligné l’importance de la sécurité et de la stabilité politique et sociale pour un climat des affaires propice à l’investissement.
Rappelant l’importance d’un dialogue social constructif dans l’établissement de la paix sociale, il a affirmé l’engagement de son organisation à jouer pleinement son rôle dans la relance économique et la lutte contre le chômage. Sauf que, pour l’instant, force est de constater que l’investissement privée reste très faible, ce qui ne traduit pas une forte volonté des promoteurs privés de jouer un rôle de premier plan dans la relance de l’économie et de l’emploi.
Ahmed Jarallah, président de l’Union tunisienne de l’agriculture et la pêche (Utap) a rappelé, indicateurs à l’appui, l’importance stratégique des deux secteurs dont il a responsabilité. Il a ensuite énuméré leurs multiples problèmes structurels, particulièrement l’endettement des agriculteurs et le faible niveau de qualification des travailleurs, appelant à plus d’investissement dans le secteur, à encourager la formation professionnelle et à revoir l’enseignement technique et universitaire des métiers liés à l'agriculture et à la pêche.
I. B. (avec communiqué).