La publication, mardi, du rapport de la Banque centrale de Tunisie (Bct) sur l’économie tunisienne en 2011 est intervenu, quelques jours après l’éviction de l’ex-gouverneur, Mustapha Kamel Nabli, et son remplacement par Chedly Ayari.
Dans sa lettre introductive du rapport, l’ex-gouverneur a indiqué que, dans un environnement international difficile, «l’économie nationale a subi le contrecoup de l’instabilité politique, sécuritaire et sociale post-révolution et les retombées de la guerre en Libye».
Reflux de l’épargne et blocage de l’investissement
Selon Mustapha Nabli, le climat d’incertitude et d’attentisme des opérateurs économiques et des ménages s’est, par ailleurs «traduit par un reflux de l’épargne et un blocage de l’investissement dont les taux ont reculé de 5,5 et 2, 8 points de pourcentage respectivement».
En 2011, la croissance économique s’est établie à «un niveau négatif estimé à -1,8% en termes réels étant signalé que la récession aurait été plus prononcée n’eut été la bonne tenue du secteur agricole.»
Cette récession, selon M. Nabli, a affecté les équilibres macroéconomiques avec une aggravation des déficits de la balance des paiements courant et du budget de l’Etat (estimés, respectivement, à 7,4% et 3,7% du Pib) et, par conséquent, une chute des réserves en devises de l’ordre de 19% pour revenir à 113 jours d’importation.
Perte de 107.000 postes d’emploi
Bien évidement, la situation sociale n’est pas tout aussi reluisante. Selon l’ex-gouverneur de la Bct, la vie sociale s’est dégradée avec la perte nette d’environ «107.000 postes d’emploi. Ce qui a porté, poursuit-il, le taux de chômage à près de 19% de la population active». Ce qui est tout de même énorme.
Le rédacteur de la lettre introductive estime que, sur le plan économique, les résultats demeurent mitigés. «Si, au terme des quatre premiers mois de cette année, des signes de reprises de l’activité dans certains secteur semblent se dessiner, comme l’attestent, notamment, la progression des échanges commerciaux avec l’extérieur et l’amélioration des recettes touristiques en devises et des transferts des Tunisiens établis à l’étrangers, d’autres indicateurs relèvent des risques de montée de pressions sur la croissance économique et sur les équilibres financiers», a averti M. Nabli dans sa lettre.
Pour lui, l’effort continu de soutien de l’activité des banques, que reflètent l’accroissement des concours à l’économie depuis le début de l’année en cours, et après une hausse de 13,5% en 2011, s’est accompagné d’un resserrement aigu de la liquidité qui vient amplifier les pressions récurrentes sur le secteur bancaire dues à l’accroissement des créances classées et à l’insuffisance de leur couverture par les provisions. Et d’avertir: «Ces pressions risquent d’augmenter davantage si les mesures idoines de recapitalisation des banques publiques se seront pas prises à temps, en raison de l’accumulation des crédits non performants».
Indépendance et responsabilisation
Abordant ensuite un thème qui lui tient à cœur, la bonne gouvernance en l’occurrence, M. Nabli dira que celle-ci repose sur la séparation entre les fonctions de gestion et de contrôle, la transparence dans la prise des décisions et leurs exécutions, la définition claire des attributions et la responsabilisation.
La Bct s’est investie à consacrer ses principes fondamentaux à travers les modernisation du fonctionnement et ses services et l’instauration des mécanismes internes de gouvernance en vue d’assurer pleinement ses missions en tant qu’autorité publique chargée de la politique monétaire et de la régulation du secteur bancaire, deux missions qui requièrent une indépendance garante de sa bonne gouvernance.
Cette indépendance, qui implique, en outre, la cohérence de la politique monétaire avec les politiques économiques générales de l’Etat, la responsabilisation de l’Institut d’émission devant le pouvoir législatif et l’opinion publique, est un facteur décisif dans la crédibilité de la Bct dans son action visant la stabilité financière, l’efficience de la politique monétaire et la maîtrise de l’inflation avec ce qu’elles induisent comme répercussions positives sur la croissance et le développement économique à moyen et à long terme.
Nacer Ould Mammar (avec Tap)