L'intermédiaire en bourse Mac SA a publié sa rétrospective boursière des 10 premiers mois de l'année 2012, sur fonds de crise externes et d'indécision sur le plan interne. Nous en reproduisons de larges extraits.
Après sa baisse en 2011, l'indice Tunindex est parvenu, en 2012, à redresser la barre en signant un mouvement haussier qui s'est déclenché à la fin de février et s'est poursuivi jusqu'à mai. L'indice a ainsi affiché, au 16 mai 2012, un rendement de 8,83%. Cette belle hausse est expliquée par l'apparition de signes de reprise économique confirmée par les chiffres de l'Institut national de la statistique (Ins).
Le Tunindex remonte lentement la pente
Par la suite, le Tunindex a perdu une partie de sa performance mais il est tout de même resté dans une dynamique positive. Ce changement de trajectoire serait dû aux perturbations sécuritaires qui ont refroidi l'ardeur des investisseurs.
Après un retour au calme entre juillet et août, l'indice a remonté la pente et a affiché, le 27 juillet, un rendement de 11,53%, depuis le début de l'année.
Les indicateurs d'activité du 1er semestre 2012 sont venus aussi pour rassurer les investisseurs puisqu'ils affichaient dans leur majorité une croissance des revenus. Ils ont d'ailleurs été jugés positifs par l'ensemble des opérateurs du marché, compte tenu des difficultés du pays. Conséquence: 11 sociétés seulement ont signé une variation négative de leurs revenus semestriels.
Le changement radical dans le mouvement de l'indice s'est déclenché après les attaques de l'ambassade américaine le 14 septembre. L'indice n'a cessé depuis de chuter pour perdre, à fin septembre, plus de la moitié de son rendement réalisé jusqu'à cette date. Celui-ci a ainsi été ramené à 3,64% à fin octobre.
La Bourse égyptienne plus prompte au redémarrage
La Tunisie et l'Egypte ont connu tous les deux, en 2011, une révolution et une transformation profonde de leurs systèmes politiques respectifs, avec notamment l'arrivée au pouvoir des partis islamiques.
L'indice de la bourse égyptienne est parvenu, en 2012, à effacer les pertes de 2011 en signant une hausse remarquable de 54% au terme des dix premiers mois de 2012. Alors que la bourse tunisienne est restée dans une tendance oscillatoire dépendant directement de la situation socio-politique du pays.
En ce qui concerne la liquidité du marché boursier, le volume d'échanges moyen par jour s'est légèrement amélioré passant de 7,05 MDT/jour à 7,16 MDT/jour. La capitalisation boursière a clôturé octobre en augmentation de 2% par rapport à 2011. Cette légère progression pourrait être expliquée par l'effet de l'introduction en bourse des sociétés Hexabyte et Ams mais aussi par le redressement de certains cours qui ont fortement chuté en 2011 à l'instar de BT, Amen Bank, Artes, Mag, Mnp et Ennakl.
Le taux de la participation étrangère dans la capitalisation boursière s'est maintenu presque inchangé aux alentours des 20%. Cette stabilité est due principalement aux participations stratégiques dans certaines valeurs (Uib, Ubci, Sfbt, Attijari Bank, etc). Pour les autres valeurs, il n'y a pas eu de changement brutal dans la participation étrangère.
Le secteur services financiers a été le plus lésé avec une régression de son indice de 5,65%, une baisse qui a légèrement pesé sur le rendement du Tunindex. Les cours boursiers des sociétés de leasing et des compagnies d'assurances ont été touchés par le manque de visibilité sur l'évolution de l'économie nationale et surtout par le resserrement de la liquidité.
L'indice du secteur bancaire affiche, à la fin octobre, un repli de 2,58%. Ce rendement est considéré comme une vrai contre-performance en comparaison avec les années précédentes.
Le manque de liquidité sur le marché et les nouvelles décisions prises en matière de gestion de risque à travers les provisions collectives, ainsi que la mauvaise tenue des banques publiques : Stb (-20,79%); Bna (-16,18%); BH (-20,11%) seraient à l'origine de la timide variation de l'indice des banques.
L'indice services aux consommateurs a été le plus performant avec un rendement de 25,25% à la fin octobre porté par les bonnes performances de toutes les sociétés qui le compose, notamment Artes (+25,9%) et Mag (17,21%).
Les meilleures hausses de la période
. Electrostar a signé, jusqu'à fin octobre, la meilleure performance (+511,84%). Une telle hausse pourrait être expliquée par la nette amélioration du chiffres d'affaires suite à l'augmentation progressive du taux de pénétration des nouvelles marques introduites par Electrostar sur le marché (Midea, Ariston) et l'assainissement du marché par la disparition des pratiques d'importations illégales. Le chiffre d'affaires arrêté au 30 septembre s'est élevé à 65,1MDT, un chiffre record qui dépasse même le chiffre d'affaires annuel 2011. Le management table, en 2012, sur des revenus de 100MDT et un résultat net de 5MDT. Une augmentation de capital est aussi prévue avant fin de l'année pour améliorer la structure financière de la société.
. Essoukna a pris 64,08% porté par la nette progression du résultat net semestriel (+117,8%).
. Introduit cette année sur le marché alternatif, le titre Ams s'est offert une hausse de 48,9%, dopé principalement par une forte demande observée lors de ses premières journées de cotation. Les états financiers au 30 juin ont montré une hausse de 24,3% du résultat d'exploitation alors que le résultat net semestriel s'est établi à 0,304MDT conformément au business plan.
. Adwya a pris 48,73% grâce à la nette amélioration des performances réalisées. Au 3e trimestre, la société a réussi à rattraper les retards causés encore par les sit-in au 1er trimestre et a réalisé un CA de 49,5 MDT, soit un taux de réalisation de 85% du CA prévu en 2012. Cette croissance a été favorisée en partie par la pénurie qui touche le secteur des médicaments en Tunisie.
. Bien orienté, Sotuver a gagné 38,96% porté les perspectives prometteuses de la société après le programme d'investissement réalisé et qui permettra à la société, dès 2013, de doubler sa capacité de production, d'améliorer la qualité et la compétitivité de ses produits et de diversifier ses marchés.
. Ennakl a affiché une progression de 35,94%. Le titre a été favorisé par le lancement, par l'Etat, d'un appel d'offres pour la cession en un seul bloc de sa participation de 60% dans le capital de la société. C'est finalement le consortium Poulina-Parenin qui a été retenu.
Les plus importantes baisses de la période
Sur les plus fortes baisses du marché à fin octobre, cinq valeurs appartiennent au secteur bancaire dont trois banques publiques. En effet, Stb, Bna et BH comptabilisent de lourds engagements dans leurs actifs et des risques afférents assez conséquents. D'ailleurs dans une optique de restructuration du secteur bancaire tunisien, comme recommandé par les principaux organismes internationaux une mission d'audit complet de ces banques et de leurs filiales a été lancée par le ministère des Finances.
. Tunisie Leasing continue sa descente, entamée en 2011, et perd encore 14,3%, malgré l'amélioration de 38,5% du résultat net semestriel.
. Siphat a perdu 16,97% sous l'effet de la dégradation de sa situation financière. Les états financiers intermédiaires au 30 juin affichent un résultat d'exploitation en baisse de 70,36% et un résultat net déficitaire de 0,122MDT.
Les titres les plus dynamiques
. Carthage Cement a été le 2e titre le plus actif avec des capitaux traités de l'ordre de 106,405MDT, soit un volume d'affaires journalier moyen de 0,5MDT. L'intérêt porté au titre est expliqué par un état d'avancement de la construction de la cimenterie satisfaisant, malgré un léger retard prévu de 3 mois pour le début de l'exploitation. Le démarrage de la production est désormais prévu pour le 1er semestre 2013. Le management table en 2014 sur un chiffre d'affaires de 328MDT et une marge brute d'exploitation de 50%. Il y a lieu de noter que l'Etat tunisien a lancé récemment un appel à manifestation d'intérêt pour la cession de sa participation de 50,24% dans le capital la société.
. En raison d'un changement considérable de la structure du capital, Somocer a fait l'objet de mouvements d'échanges intensifs. La Société financière Zouari de développement et Duet Mena ont franchi à la baisse le seuil des 5% dans le capital de la société en août. Le 7 novembre, ces actionnaires ne détiennent plus aucune participation. Rappelons que ces derniers sont entrés dans le capital, en 2011, et avaient annoncé que leur prise de participation était stratégique.
. Mag a signé un volume d'affaires de 70,04MDT. Des transactions importantes ont été observées en mars après l'annonce de la signature d'un accord avec Isms, holding du métier supermarchés du groupe Auchan. Le 30 octobre, la société Magasin Général et la société Isms ont définitivement signé un accord à l'issue duquel le groupe Auchan, via sa filiale la Société New Corp, devient détenteur de 10% du capital de la société Magasin Général.
. Dans le même secteur, Monoprix a attisé également l'attention des investisseurs avec des capitaux traités de 68,5MDT. Les états financiers intermédiaires au 30 juin ont dévoilé une progression de 74,6% du résultat d'exploitation. Le résultat net s'est soldé à 3,23MDT contre un déficit de 5,14MDT une année auparavant. Le management table en 2012 sur un résultat net consolidé de 15MDT. Monoprix a signé un contrat de franchise avec Monoprix France. Ce contrat permet à la société d'ouvrir des magasins Monoprix au Maroc et en Libye.
. Les investisseurs ont montré récemment un engouement pour le titre Poulina Group Hoding. Les capitaux traités se sont élevés, à la fin d'octobre, à 70,9MDT. La sortie du capital réalisée par le fonds d'investissement Actis, venu à échéance, était à l'origine de l'importance des capitaux traités.
Un exercice difficile à cause des difficultés externes et internes
L'exercice 2012 semble être difficile tant sur le plan national qu'international. Sur le plan international, la crise de la zone euro et plus particulièrement les difficultés dont font face l'Italie, l'Espagne et la Grèce, et leurs retombées sur les marchés émergents , sont à l'origine de la révision à la baisse du taux de croissance mondiale qui est passé, récemment, à 3,3% contre 4% prévu en avril.
Sur le plan national, tant que la situation socio-politique n'est pas stabilisée et la visibilité de la prochaine étape n'est pas claire, la situation économique et notamment boursière ne peut être totalement cernée. Sur les deux prochains mois, il est prévu l'introduction en bourse de quelques sociétés (on en cite déjà Land'Or), l'augmentation de capital d'autres sociétés probablement Sits sans oublier les cessions par l'Etat de ses participations dans le capital d'Ennakl, CC et BT pour lesquels les processus ont été lancés.
Sur le plan boursier, certaines tendances peuvent être prévisibles.
Secteur bancaire : le resserrement de la liquidité et la constatation de provisions additionnelles pour certaines banques pourraient affecter la rentabilité du secteur.
Les sociétés de leasing: étant fortement sensible à la situation économique, l'activité de leasing a connu un ralentissement en 2012 comme en témoigne les indicateurs d'activité déjà publiés. Les répercussions de cette baisse seront ressenties en 2013. Par ailleurs, avec le manque de liquidité, le refinancement des sociétés de leasing sera plus onéreux pesant encore sur la rentabilité.
Les compagnies d'assurance : après la forte sinistralité enregistrée lors de 2010 et 2011, suite à la révolution tunisienne et les actes de violence qui l'ont suivi, le secteur des assurances devrait retrouver une évolution normale de l'activité technique non vie. Un nouvel axe de développement pour le secteur est en cours de préparation à savoir le Takaful ou bien l'assurance islamique. Selon les professionnels du secteur, il s'agit d'une activité prometteuse avec une part de marché entre 10% et 15%, à fin 2013.
Le secteur de la distribution: pour Mag et Monoprix, il est prévu un retour à la normale avec la réouverture des points de vente fermés et l'implantation en Libye et au Maroc pour Monoprix. Pour les concessionnaires Automobiles Artes et Ennakl, leur activité pourrait être perturbée par la révision du système des quotas, la décision de la Banque centrale tunisienne (Bct) de limiter les importations et également par l'augmentation de la part d'autofinancement dans les crédits auto de 20% à 40%.
Le secteur industriel : les sociétés notamment exportatrices feront face à un double défi: la baisse de la demande extérieure et particulièrement en Europe et un marché local trébuchant. Celles des secteurs défensifs telle que Sopat, Adwya, CC, Scb pourraient bien résister. Par contre, les sociétés opérant avec le marché libyen comme Pgh et Somocer pourraient connaitre des croissances importantes avec la stabilité de la situation dans le pays et sa reconstruction.
Sur les deux prochains mois, Mac SA privilégie plutôt les valeurs défensives à l'instar de Sfbt, Sopat, Adwya, Mag et Monoprix et les valeurs immobilières qui ont montré une forte résilience.
Source : Mac SA.