Le recours de la Tunisie aux marchés des sukuks islamiques pour financer son budget de l'Etat 2013 «ne signifie pas, forcément, qu'elle va bénéficier de meilleures conditions que celles offertes par les marchés traditionnels».

 

C'est ce qu'a expliqué Radhi Meddeb, Pdg du groupe Comete Engineering, dans une interview à l'agence Tap.

Les sukuks plus coûteux que les actifs traditionnels

Le gouvernement tunisien avait annoncé qu'il «aura recours aux sukuks islamiques pour financer, en mobilisant un montant de 1.000 millions de dinars, le budget de l'Etat pour l'exercice 2013», sans préciser, toutefois, les projets pour lesquels seront destinés ces ressources financières.

D'après Radhi Meddeb, également fondateur et dirigeant de Arab Leasing International (Arabie Saoudite) et Algerian Saudi Leasing (Luxembourg), «ces sukuks islamiques vont coûter à l'Etat des intérêts dont la valeur dépassera les taux d'intérêt appliqués sur les marchés traditionnels.»

M. Meddeb à expliqué que l'élaboration des sukuks se fait de la même manière que les emprunts obligataires traditionnels sauf que les sukuks sont destinés aux marchés de la finance islamique, notamment ceux du Golfe.

Les sukuks, tels que définis par les spécialistes sont des obligations ou titres de créances appuyés par «des actifs structurés et profitant à leurs détenteurs» conformément à la loi islamique («chariâ») et qui peuvent être échangés sur les marchés.

Les sukuks islamiques de l'Etat sont des titres de créances émis par des diverses parties bénéficiaires, représentées ou mandatés par le ministère des Finances.

Ces titres sont fondés sur une base légale et sont commercialisés à travers les banques et les sociétés financières intermédiaires à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Etat. Ils sont émis à moyen ou à long terme.

Augmentation du coût de l'investissement dans le pays

D'après M. Meddeb la qualité des investisseurs sur ces marchés des sukuks cherchent, en réalité, à investir dans des projets à moindre risques «malgré qu'ils ne sont pas, en apparence, partisans des taux d'intérêts, appelés en arabe ''riba'', gain illicite en islam, et qu'ils disent être prêts à participer aux pertes comme aux gains.»

Ces investisseurs préfèrent, a-t-il dit, des projets gagnants qui seront porteurs de bénéfices qui dépassent ou sont équivalents à ceux générés par les marchés traditionnels appliquant les taux d'intérêt.

Dans le même contexte, M. Meddeb a indiqué que «la note de souveraineté baissée de la Tunisie et le manque de visibilité à long terme sont de nature à augmenter le coût de l'investissement dans le pays, ce qui est de nature à augmenter le coût de la dette que ce soit sur le marché traditionnel ou les marchés de la finance islamique».

Toutefois, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (Bct), Chedly Ayari, estime que les sukuks islamiques ont plusieurs avantages dans la mesure où ils offrent une base et une catégorie stable d'investisseurs.

Intervenant à la clôture des travaux de la commission nationale chargée du développement des lois régissant la finance islamique en Tunisie, M. Ayari avait appelé à accélérer l'élaboration d'un cadre législatif pour organiser ces nouveaux instruments de finance.

Croissance du volume des actifs islamiques

Certains considèrent que l'application du système des sukuks islamiques est une méthode réussie et garantie en tant qu'alternative aux titres, aux bons de trésor et aux emprunts obligataires, ce qui ne manquera pas d'aider le pays à sortir de la crise économique et de pallier le déficit budgétaire de l'Etat.

L'agence de notation Standard&Poors avait prévu, dans son rapport de septembre, que le volume d'émission des sukuks islamiques atteindra un volume de 100 milliards de dollars destinés, essentiellement, au financement des projets d'infrastructure.

Selon le même rapport, le volume des actifs islamiques dans le monde va enregistrer un taux de croissance de 20% par an entre 2011 et 2015 à l'heure où le volume des transactions islamiques en Tunisie ne dépasse pas 2,5% des actifs du secteur bancaire.

Ezzeddine Saidane, économiste, avait indiqué, dans une déclaration à la Tap, que le démarrage de l'application de ce type de financement va prendre des semaines et des mois car il dépendra de l'adoption de l'Assemblée nationale constituante (Anc) des lois qui y sont spécifiques.

Source : Tap.