En raison de l’incertitude liée au retard enregistré dans le démarrage du dialogue national, le taux de croissance économique à la fin de 2013 atteindra au mieux 3%, soit 1,5 point de moins que les prévisions du début de l’année.
Le taux de croissance de la Tunisie se situera autour de 2,7% à la fin du 3e trimestre 2013, alors que les prévisions tablaient sur 3% pour le 3e trimestre 2013 et 6% pour le 4%, afin d'aboutir au 3% de croissance prévu à fin 2013, a affirmé Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), lors de son intervention à la conférence-débat organisé, samedi, à Tunis, par l'association Action et développement solidaire (ADS) sur «les perspectives financières de la Tunisie». «A cause du retard enregistré dans le démarrage du dialogue national, le taux de croissance économique atteindra ainsi, au mieux, 3% à la fin de l’année 2013», a-t-il ajouté. La reprise reportée à 2015 La situation n'est cependant pas catastrophique, estime le gouverneur de la BCT, tout en admettant qu’elle constitue «une grande déception dans la mesure où l'année 2013 sera encore une année de transition, ainsi que 2014, et la reprise réelle ne sera ressentie qu'à partir de 2015», a-t-il souligné. «La Tunisie a, certes, enregistré un retard dans le processus de sortie de la crise économique mais nous restons dans une zone de croissance positive», a tenu à rassurer M. Ayari, arguant du fait que le taux de croissance moyen dans la région du Moyen Orient et de l'Afrique du Nord (MENA) est de l'ordre de 3%. Le gouverneur de la BCT est revenu sur les principaux «écrous» du modèle économique tunisien, qui sont les taux du déficit budgétaire, du déficit courant, de l'endettement et de l'inflation. En ce qui concerne le déficit budgétaire, estimé à 7% du PIB en 2013, M. Ayari l’a qualifié d’«inquiétant mais loin d'être une catastrophe», faisant savoir que les taux de déficit budgétaire de pays comme la Turquie et le Maroc ne sont pas loin de 7%. «Ce taux est le résultat de politiques d'ajustement des salaires et de subvention qui dépassent le bon sens et contribuent à la réduction de la marge budgétaire», a estimé M. Ayari, soulignant l’urgence de décisions politiques fermes en matière de dépenses publiques, le système actuel, qualifié de «suicidaire», ne pouvant perdurer sans mettre en péril les équilibres macroéconomiques du pays. Le gouverneur de la BCT a indiqué, par ailleurs, que le déficit courant résulte du déséquilibre de la balance commerciale, le déficit commercial s'élevant à 1 milliard de dinars par mois, un montant jugé très élevé. Avec des exportations peu porteuses, il n'est plus possible de maintenir le même rythme d'importation, a-t-il enchaîné, recommandant de brider intelligemment les importations des biens de consommation hors alimentation. L’endettement «dans les limites du soutenable» Evoquant ensuite la question de l'endettement, M. Ayari a relevé que la Tunisie ne peut pas croître sans s'endetter. D’ailleurs, aucune économie dans le monde ne peut prospérer sans recourir à l'endettement. Reste que «la Tunisie est dans la limite du soutenable en matière d'endettement», a-t-il averti. Le taux d'investissement en Tunisie étant d’environ 21% et celui de l'épargne de 16% du PIB, le gap de 5% doit être comblé par recours à l'endettement, a-t-il encore précisé. La dette n’est pas en soi une mauvaise chose, sauf quand elle est mal utilisée. Il est donc nécessaire de consacrer les montants empruntés aux investissements à forte valeur ajoutée et non à des fins de consommation, a averti M. Ayari, sans préciser que c’est là l’erreur monumentale que commet l’actuel gouvernement, avec les hausses des salaires et les recrutements de dizaines de milliers de personnes dans la fonction publique. M. Ayari a indiqué, sur un autre plan, que le trend haussier de l'inflation s'est stabilisé à 5,8% et que les prévisions tablent sur une baisse de ce taux pour atteindre 5% d'ici fin 2013, même si les projections du Fonds monétaire international (FMI) tablent sur un taux encore plus faible (4%). De retour des réunions annuelles du FMI, tenues à Washington du 10 au 12 octobre 2013, M. Ayari a indiqué que la Tunisie jouit d'un «stock de sympathie énorme» auprès de cette institution et fait part de la volonté du FMI d'aider notre pays à réussir sa phase de transition, pour peu que la situation politique se stabilise. On remarquera cependant que la condition contenue dans ce «pour peu» est encore loin d’être satisfaite. Doit-on en conclure que cette période de vaches maigres pour l’économie tunisienne va se poursuivre? I. B. (avec Tap). |