L’indicateur de productivité a chuté à un niveau jamais atteint en Tunisie, en raison des grèves, sit-in et demandes sociales exacerbées par la révolution.


On a ainsi enregistré 360 grèves illégales et sans préavis, durant les dix premiers mois de l’année, contre 240 grèves en 2010, selon des statistiques de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica).

Ces mouvements de protestations et sit-in, pas toujours justifiés, qui se sont déroulés tout au long de cette année, ont contribué au blocage de l’activité de nombreuses unités de production dans différents secteurs, tels que les phosphates, les mines et l’énergie. Plusieurs activités industrielles et commerciales en relation directe avec les intérêts des citoyens ont également été touchées.

Les secteurs des mines et de l’énergie très affectés

L’indicateur productivité dans le secteur des mines a ainsi baissé de 94,1 points, au cours des neuf premiers mois de 2010, à 39,2 points durant la même période de 2011. Idem pour le secteur de l’énergie dont la productivité a régressé de 127,8 points à 120,6 points.

Le directeur central de l’Observatoire de la Conjoncture économique à l’Institut national de la statistique (Ins), Mustapha Bouzaiane, a souligné qu’il «est normal de voir la productivité en Tunisie postrévolutionnaire atteindre ses plus bas niveaux, en raison des grèves et sit-in qui ont paralysé l’appareil productif».

«De grandes entreprises et établissements publics, tels que les sociétés du ciment de Gabès (sud du pays) et d’Enfidha (centre) ont mis fin, définitivement, à leurs activités, en plus du blocage de l’activité dans le domaine du phosphate», a rappelé le responsable.

Les conditions de travail difficiles qui prévalent au sein de plusieurs entreprises, notamment industrielles, ont causé un recul important du rythme de production, ce qui a eu un impact négatif sur la croissance économique du pays, a-t-il aussi relevé.

Les statistiques présentées indiquent que l’indice de la production industrielle globale a accusé une baisse de 2,5% pendant les neuf premiers mois (2010-2011), alors qu’il était de 8,1 % durant la même période 2009-2010. Pis, l’indicateur global a régressé de 132,7 points à fin septembre 2010 à 129,4 points pendant la même période de 2011.

Lotfi Khedhir, directeur de l’Observatoire du commerce extérieur (Oce), au ministère de l’Industrie et du Commerce, a souligné l’impact de la conjoncture politique et économique sur la productivité, perçue comme un facteur de premier plan dans le bon fonctionnement de l’économie nationale.

Il a fait remarquer que la baisse de productivité dans le secteur des phosphates en raison des grèves a empêché la Tunisie de tirer profit de la hausse du prix du phosphate et dérivés sur les marchés mondiaux.

La valeur des exportations du phosphate a ainsi reculé de 35% jusqu’à fin octobre (1.129,5 millions de dinars) contre une croissance positive d’un taux de plus de 25% au cours de la même période de 2010 (1.729 millions de dinars).

M. Khedhir a aussi indiqué que les pertes du secteur seront révisées à la hausse pour atteindre 1.000 millions de dinars à la fin de cette année.

Faire prévaloir le dialogue social dans les entreprises

Afin d’éviter à la Tunisie de plus grandes pertes et de préserver les investissements intérieurs et extérieurs, Khalil Ghariani, président de la commission sociale au sein de l’Utica, a appelé le nouveau gouvernement à accorder un intérêt particulier au phénomène du sit-in et à veiller à faire prévaloir le dialogue et la paix sociale dans les entreprises, afin d’assurer la poursuite des activités de production. Il a exprimé ses inquiétudes de voir la situation se détériorer davantage et les mouvements de protestation s’intensifier ce qui «inciterait par conséquent les investisseurs et hommes d’affaires à fermer leurs entreprises et arrêter d’investir dans le pays.»

M. Ghariani a indiqué, également, qu’environ 120 sociétés étrangères, d’une capacité de 40.000 emplois, ont fermé leurs portes définitivement, à cause de la succession des mouvements de protestation et des revendications sociales «illégales et déloyales».

Il importe de noter que la centrale patronale a averti, de son côté, de la gravité des sit-in et des grèves sur le climat d’affaires et d’investissement, mettant l’accent sur la possibilité de paralyser les différents secteurs de l’économie du pays, en cas de continuité de ces mouvements, ce qui est de nature à nuire à la production et à la productivité des entreprises.

Le président provisoire de la République, Moncef Marzouki, a appelé, lui aussi, dernièrement, à l’instauration d’une «trêve sociale et politique», de six mois, afin que l’économie puisse reprendre son rythme habituel.

Source : Tap.