L’Union des travailleurs de Tunisie (Utt), la centrale syndicale dont l’intransigeance semble avoir été derrière la décision de Leoni de fermer son usine à Mateur-Nord, estime que cette décision «était une surprise».


 

Dans un communiqué signé par le secrétaire général du syndicat de l’usine, Moonem Darragi, on lit notamment que «l’administration a décidé de fermer l’usine, sans avis préalable et sous de faux prétextes qui n’ont aucune relation avec les conditions de travail au sein de l’usine».

Menaces répétées de fermer le site

Selon M. Darragi, «l’administration avait une intention implicite de délocaliser l’usine et de priver la région de Mateur de plus de 3.000 emplois, et ce à travers des provocations, des sanctions injustifiées des employés et aussi des menaces répétées de fermer le site».

Le syndicat de l’usine avait tenu, selon le communiqué, une conférence de presse, le 26 janvier, au cours de laquelle il a jeté la lumière sur la situation véritable au sein de l’entreprise.

Suite à ce point de presse, «le directeur de l’usine avait démenti, dans des déclarations aux médias, l’observation d’un sit-in à l’usine et nié toute intention de la fermer, tout en parlant de revendications excessives des ouvriers».

«Il a même confirmé la volonté de développer davantage le site et d’y créer de nouveaux emplois», a avancé le secrétaire général du syndicat de Leoni-Mateur-Nord.

«Nous rendons la direction responsable des résultats négatifs pouvant découler de la fermeture de l’usine», écrit encore M. Darragi, appelant l’entreprise à revenir sur cette décision et à traiter avec les employés en tant que véritables partenaires «concernés par l’intérêt de l’entreprise».

«Le syndicat de l’usine est prédisposé à continuer le dialogue et les négociations», a conclu, le représentant de l’Utt, centrale syndicale fondée au lendemain de la révolution par le militant syndicaliste Ismaïl Sahbani, originaire de la région.

Le Groupe Leoni est le premier employeur privé (14.000 salariés) en Tunisie. Il opère dans le pays depuis les années 70 dans le câblage automobile et fournit de grandes marques internationales. Son site à Mateur emploie, à lui seul, près de 2.700 personnes.

«Une catastrophe pour Mateur»

La fermeture de l’usine Leoni «est une catastrophe pour Mateur», une ville située dans le gouvernorat de Bizerte, à une soixantaine de kilomètres au nord-ouest de Tunis, a déploré un responsable syndical. Car, aux 2.700 emplois directs qui seront ainsi perdus, il convient de compter aussi les milliers d’emplois indirects générés par l’usine dans son environnement.

«Catastrophe » en effet, dans un pays où le taux officiel de chômage est de 19 % et qui fait face à une grave crise économique, avec un taux de croissance de -1,8 % depuis le début de 2011.

Cette fermeture ne va pas arranger la situation et attirer les investisseurs dont le pays a aujourd’hui besoin pour donner du travail à ses 800.000 chômeurs. L’année dernière, la Tunisie a enregistré une baisse de près de 30% des investissements directs étrangers (Ide), a annoncé, mercredi l’Agence tunisienne de promotion et de l’investissement extérieur (Fipa). Les Ide dans les secteurs du tourisme, de l’industrie manufacturière et de l’énergie ont connu respectivement des chutes en volume de -83%, -42% et -19% par rapport à l’année précédente. L’investissement étranger génère annuellement environ 25% de nouvelles créations d’emploi, et constitue une contribution majeure à la croissance.

On comprend dès lors l’inquiétude créée par la décision de fermeture de Leoni Mateur dans les milieux économiques et politiques dans le pays.

I. B. (avec Tap).