
‘‘La Presse’’ a fait son mea culpa pour le crime de désinformation dont ses équipes s’étaient rendues coupables sous Ben Ali. ‘‘Jeune Afrique’’ croit pouvoir continuer à «désinformer» idiot un peuple adulte et mûr, qui vient de faire sa révolution. Ridha Kéfi
‘‘Jeune Afrique’’ n’a pas mangé – ou pas autant qu’il l’aurait voulu – aux râteliers de Ben Ali. Le magazine de Béchir Ben Yahmed était même, au cas où vous ne vous étiez pas rendu compte, victime de la censure exercée par le système mis en place par Abdelwaheb Abdallah.
A tel point d’ailleurs que BBY, pour punir Zine El-Abidine Ben Ali, qui ne supportait pas la «liberté de ton» de son magazine, «avait pris la décision, il y a plus de cinq ans, de mettre un terme à leurs rencontres» (sic !). Si cette décision «historique» n’a pas déclenché la révolution tunisienne, il s’en est quand même fallu de peu, Bouazizi ayant doublé Ben Yahmed sur la dernière ligne droite.
Tremblez chefs d’Etat, BBY est de retour!
Dans son exil saoudien, le raïs déchu doit sans doute tenir rigueur au directeur de ‘‘Jeune Afrique’’ d’avoir contribué à sa chute par ses innombrables publireportages sur la réussite du modèle «benalien».
Brrr ! Tremblez chefs d’Etat africains et arabes! Les plumes acérées des journalistes de Ben Yahmed ne sont pas près de céder à vos tentantes offres financières et juteux contrats de com.
C’est à peu près la substance de l’article de François Soudan ‘‘Ben Ali et nous’’ publié dans le dernier ‘‘Jeune Afrique’’ et dans lequel le directeur de la rédaction du magazine parisien essaie, assez pitoyablement du reste, de justifier l’injustifiable: à savoir la proximité sonnante et trébuchante du groupe de presse parisien avec le Palais de Carthage et ses officines douteuses, notamment l’Agence tunisienne de communication extérieure (Atce).
BBY et ses donneurs d’ordres tunisiens
Ayant prêté mes services à ce magazine douze ans durant, en tant que rédacteur en chef délégué, entre 1994 et 2006, je serais peut-être accusé d’être un traître, si je n’en avais pas démissionné à deux reprises, en 1996 et 2006, pour me libérer – et le mot est faible – des pressions auxquelles j’étais soumis par la direction, elle-même soumise aux diktats de ses donneurs d’ordres tunisiens: les Abdelwaheb Abdallah et Oussama Romdhani.
Je me garderais de balancer mes anciens employeurs. Je ne priverais pas non plus de mon témoignage la commission d’enquête sur la corruption qui ne manquera pas de s’intéresser aux comptes de l’Atce. Et à ses générosités bien ordonnées…
A BBY et les siens, qui continuent de pérorer, émargeant sur les régimes qui se succèdent en Tunisie et dans les autres pays africains, tout en jouant, après chaque révolution ou destitution, aux vierges effarouchées, je voudrais dire ceci: un peu de décence et un chouia de dignité! Faites votre mea culpa! C’est le moins que vous puissiez faire pour espérer vous faire pardonner par vos lecteurs en Tunisie.
L’article ‘‘Ben Ali et nous’’, qui aurait bien pu s'intituler ''Ben Ali est nous'', est pire qu’un chapelet de mensonges, c’est une insulte à l’intelligence des Tunisiens. Ces derniers, dont je suis, n’oublieront pas, mais ils pourraient peut-être pardonner si on les traite sans morgue et sans ruse, comme vous le faites…