Etude réalisée par le Professeur Moncef Ben Slama, président de la Commission des experts de l’Institut arabe des chefs d’entreprise.
L’agence de notation Standard and Poor’s a procédé le 23 mai 2012 à l’abaissement de deux crans de la note de la dette à long terme de la Tunisie en monnaie locale et étrangère de BBB(-) à BB ainsi que celle du crédit émetteur de la Banque centrale de Tunisie (Bct) de BBB(-) à BB stable, reléguant ainsi le pays dans la catégorie des emprunteurs spéculatifs.
Une part de cette dégradation est due, cette fois, aux impacts négatifs attendus du ralentissement économique en Europe. Cette dégradation a eu pour conséquence la révision à la baisse de la note de 5 banques tunisiennes, le 29 mai 2012, s’agissant de la Banque de l’Habitat (BH) dont la note a été révisée sur le long terme de BB+ à BB- avec perspective stable, de la Banque tuniso-koweïtienne (Btk), de BB+ à BB avec perspective stable, de la Banque tuniso-émiratie (Bte) dont la notation a baissé de BB à BB- et a été mise sous surveillance négative, de la Société tunisienne de banque (Stb), de BBpi à Bpi et de l’Arab Tunisian Bank (Atb), dont la note a été révisée sur les court et long termes, respectivement de A-3 à B et de BBB- à BB avec perspectives stables.
A noter que la dégradation de l’Atb est imputée, en particulier, «à un risque souverain puisqu’elle détient un portefeuille considérable de la dette du gouvernement tunisien», alors que la Btk est exposée, selon S&P, au risque de détérioration de l’environnement économique. Par ailleurs, S&P considère que la BH, la Bte et la Stb sont des entités liées à l’Etat (Government-Related Entity - Gre), pouvant éventuellement bénéficier du soutien de l’Etat en cas de «détresse financière».
Il faut dire que ce déclassement survient après la dégradation ou le placement sous surveillance négative des notes souveraines de la Tunisie, opérés par les principales agences de ratings en 2011.
C’est ainsi que S&P dégradé la note monnaie locale avec mise sous surveillance négative de A-/Stable à BBB+ et affirmé la note en devise étrangère BBB avec placement sous surveillance négative. Moody’s a dégradé la note souveraine de Baa2 à Baa3 avec mise sous surveillance négative. R&I a dégradé la note devise étrangère avec placement sous surveillance négative de A-/Stable à BBB-. Fitch a affirmé la note devise étrangère BBB avec placement sous surveillance négative.
Néanmoins, la Tunisie a maintenu son grade d’investisseur jusqu’alors avant que S&P ne procède à la dégradation de mai 2012. De fait, S&P estime que la Tunisie risque, à long terme, de se trouver incapable d’honorer ses engagements du fait de l’augmentation inéluctable de la prime de risque adossée.
Dans ce qui suit, il importe de faire ressortir les déficiences pointées par S&P pour motiver cette dégradation; de même qu’il convient de rendre compte des aspects de résurgence envisagés par l’agence.
I/ Déficiences/Griefs
Sept lacunes principales sont listées par S&P:
1- Performances en-deçà des attentes: «Les indicateurs économiques, fiscaux et externes de la Tunisie sont maintenant plus faibles que ce que nous avons précédemment prévu».
2- Incertitudes politiques: «Nous pensons que les incertitudes politiques à moyen terme vont persister, au moins jusqu’à l’adoption d’une nouvelle Constitution et l’élection d’un gouvernement. Nous n’anticipons pas cela avant la mi-2013».
3- Incapacité proactive du gouvernement: «Nous ne croyons pas que le gouvernement de transition de la Tunisie – en poste depuis Décembre 2011 – sera en mesure de prendre des mesures proactives correctives pour contrer l’affaiblissement de l’économie et de la sphère financière, qui seraient compatibles avec un rating investment grade».
4- Moins-values de croissance transmise à partir de la zone euro: «La baisse des recettes touristiques et un creusement du déficit commercial ont conduit à une plus faible position de liquidité extérieure combinée à une augmentation du stock de la dette extérieure à court terme. Nous prévoyons que la reprise sera lente, en particulier compte tenu de la faiblesse de l’environnement économique dans l’UE, qui est le principal marché d’exportation de la Tunisie et une source importante d’Ide et de flux touristiques».
5- Dette publique et «difficultés sociales de réajustement»: «L’augmentation des dépenses publiques pour soutenir la demande intérieure et pourvoir aux besoins de subsistance a permis à la Tunisie d’éviter une récession plus profonde en 2011, mais cela a conduit à une forte détérioration des finances publiques. Nous prévoyons maintenant un déficit budgétaire global de près de 7% du PIB en 2012, supérieur à notre prévision précédente de 3,9%. Nous nous attendons à ce que l’assainissement budgétaire se fasse de façon graduelle dès lors que les contraintes économiques et sociales ne permettent pas de procéder à un ajustement rapide».
6- Vulnérabilité de la position extérieure: «Le déficit courant s’est fortement creusé à près de 7.5% du PIB (deux points de pourcentage plus élevé que notre prévision précédente) et nous prévoyons qu’il restera supérieur à 5% jusqu’en 2015… Le financement extérieur pourrait ‘‘devenir sous pression’’ si les Ide restent soumis aux incertitudes politiques et si les banques, qui ont une dette extérieure à court terme significative, éprouvent des problèmes récurrents».
7- Fragilité bancaire: «Les notations continuent d’être altérées par la fragilité du système bancaire du pays, qui se caractérise, selon nous, par une faible qualité des actifs»… «Les créances intérieures sur le secteur privé ont augmenté de 13% en 2011 et nous prévoyons qu’elles augmenteront encore de 11% en 2012, en partie en raison des larges restructurations du principal et des intérêts des prêts».
A ce stade, il faut considérer que l’élément qui semble avoir fortement motivé la récente dégradation réside, pour une part appréciable, dans l’amplification des facteurs de fragilité systémique du secteur bancaire, en raison notamment de la faible portée des dispositifs de contrôle prudentiel et de supervision.
Rappelons que S&P avait déjà livré en novembre 2011 une évaluation du risque bancaire conformément au dispositif Bicra (Banking Industry Country Risk Assessment), en le maintenant dans le groupe 8 tout en révisant le score du risque économique de 8 à 7. En d’autres termes, et alors que le secteur bancaire a déjà été jugé à haut risque, S&P a estimé que la capacité de résilience de l’économie tunisienne présente toujours un risque intermédiaire dans la gestion des déséquilibres globaux.
II/ Potentiel de récupération à terme
Toutefois, il faut signaler que l’agence ne manque pas de mettre l’accent sur certains facteurs qui rendent compte de l’aptitude au redressement progressif:
1- Perspective stable: «La perspective stable reflète notre attente, qu’en dépit des incertitudes, la transition en cours jusqu’aux élections de 2013 se fera sans conflit politique majeur. La perspective reflète aussi l’attente que les soldes budgétaires et extérieurs de la Tunisie s’amélioreront graduellement au cours des toutes prochaines années… Notre perspective stable sur les ratings à long terme signifie que nous pensons que la transition politique devrait être lisse et le pays devrait potentiellement résister à des chocs extérieurs assez forts émanant de l’Europe».
2- Accès aux financements officiels: «Nous croyons que l’accès du Gouvernement au ‘‘financement officiel’’ restera ‘‘fort’’ tant qu’un Gouvernement élu justifie d’un plan économique à moyen terme clair».
3- Capacités de résilience: les capacités de sauvegarde des ratings sont tributaires «d’une économie relativement bien diversifiée, d’un environnement des affaires globalement favorable, d’un élargissement de la liberté des médias, et de l’amélioration de la redevabilité des institutions étatiques». Autant «d’ouvertures» en vue de relever la notation du pays et pour lesquelles le système tunisien pourrait se conformer sans difficulté.
III/ Impacts
Le déclassement de la Tunisie de la catégorie investment grade est préjudiciable. Cette dégradation entraînera une hausse du coût des nouveaux emprunts souverains de la Tunisie sur les marchés internationaux, par suite de la hausse de la prime de risque de crédit.
Depuis la dégradation du rating souverain, l’écart de taux des obligations de la Tunisie est passé de 376 Pb avant la publication du rapport de S&P à 414 Pb (début juin). Il est à noter que le spread est déjà passé de 121 points de base avant la révolution au 10/1/2011 – moment où la vague de contestations a commencé – à 223 points de base au 14/4/2011.
En dépit du bon dénouement des élections de la constituante, le climat latent d’incertitude économique a fait en sorte que l’écart de taux a poursuivi sa hausse, une première fois à 257 points de base au 14/11/2011 puis à 376 Pb à la veille de la dégradation du 23/5/12.
Du fait que la dette extérieure de la Tunisie est contractée en moyenne à hauteur de 27,8% au titre des émissions obligataires sur les marchés financiers internationaux et de 9,5% au titre de créances bancaires privées, l’accroissement de l’écart de taux aura certainement une incidence directe néfaste, non seulement, en matière de renchérissement des coûts des nouvelles mobilisations escomptées d’emprunts extérieurs et de resserrement des conditions de financement, mais aussi en termes de risque de hausse du taux d’intérêt sur près de 21% de la dette extérieure à moyen et long terme contractée à taux variable. Cette dernière servitude demande à être évaluée de façon affinée.
Outre l’effet d’inhibition qu’aura cet abaissement sur le comportement des investisseurs étrangers et nationaux, encore réticents, il faut considérer que la sortie de la Tunisie sur les marchés financiers internationaux devient désormais plus difficile et plus coûteuse, étant donné que les conditions d’emprunt vont être bien contraignantes.
De plus, cette nouvelle baisse de la note souveraine devrait décourager les bailleurs de fonds, désormais incertains de la capacité du pays à honorer ses engagements. L’augmentation de l’aversion au risque Tunisie risque d’induire un effet de détournement à l’égard de la détention de la dette souveraine tunisienne par certains investisseurs et fonds de pension étrangers.
Il faut aussi considérer que les avis et classements des agences de crédit export, qui fournissent des garanties aux entreprises étrangères qui investissent en Tunisie, sont assez articulés à ceux des agences de rating souverain.
Par ailleurs, on doit retenir que les entreprises et les établissements publics, qui bénéficient de la garantie implicite de l’Etat, seront impactés par la dégradation de la note souveraine. Tel est le cas d’entreprises comme Tunisair, et les entreprises dont l’Etat est actionnaire comme Tunisie Télécom et le Groupe chimique tunisien (Gct), qui devraient, à leur tour, subir une dégradation de leur notation.
Dans ce contexte, on doit relever, qu’à ce jour, par-delà les mesures de refinancement sur le marché monétaire conduite par la Banque centrale de Tunisie (Bct) la crise d’illiquidité du secteur bancaire est toujours patente, à quoi s’ajoutent certaines pratiques anticoncurrentielles liés aux surenchères sur les certificats des dépôts.
D’un autre point de vue, on doit noter que l’incidence négative de la dégradation devrait être quelque peu «tempérée» dans la mesure où l’accord entre les Etats Unis et la Tunisie doit permettre à cette dernière d’emprunter sur les marchés internationaux avec de la garantie des Etats Unis vient d’être signé.
La déclaration d’intention signée le 20 avril 2011 stipulait que «l’Etat américain fournirait cette garantie de prêt pour permettre à l’Etat tunisien d’accéder à des financements importants sur les marchés à des taux abordables et avec des maturités d’emprunt favorables». Washington envisage d’apporter une garantie «sur le principal et les intérêts» pouvant aller «jusqu’à 100%».
IV/ Dynamique de croissance
La dynamique de la croissance en Tunisie reste conditionnée par la portée effective des attentes internes et des attentes de conjoncture dans la zone euro.
Attentes internes: Par-delà la tendance récente à la décélération du rythme des exportations manufacturières, et l’aggravation des déficits macro-économiques, relevée par S&P, il faudrait aussi mettre en évidence l’élan de retour d’activité qui se dessine (progression relative des Ide, «reprise» du tourisme, conjoncture agricole favorable, redémarrage des activités phosphatières...); le Fmi relève récemment que «l’économie de la Tunisie montre des signes de reprise, mais la crise dans la zone euro, son plus important marché d’exportation, présente des risques». Le Fmi prévoit, pour sa part, une croissance entre 2 à 3% cette année, les perspectives étant conditionnées par l’ampleur du ralentissement dans la zone euro. Tout en admettant que «la politique budgétaire devra jouer un rôle important pour soutenir cette reprise», et qu’il existe «un potentiel évident pour une croissance plus forte à moyen terme», le Fmi souligne bien «qu’après cette année, alors que la reprise s’installe, nous voyons la nécessité d’une consolidation progressive du budget sur le moyen terme».
A noter enfin que le Fmi a réitéré sa disposition à «aider» la Tunisie si nécessaire. Par ailleurs, on retiendra que, préalablement à la dégradation de S&P, la Coface a attribué le rating A4 à la Tunisie avec «perspective stable» (15/5/12), ce qui atteste que les entreprises tunisiennes ont moins d’impayés avec leurs fournisseurs français. En revanche, les impayés des importateurs français sont en augmentation. Toutefois, cette appréciation pourrait être altérée au vu de la récente aversion au risque tunisien.
Attentes de conjoncture dans la zone euro: le tableau conjoncturel mondial, assombri par les risques de déstabilisation financière majeure, est désormais chargé d’aléas de croissance multiples. Le retournement de tendance dans la zone euro, notre zone de référence, qui pourrait prendre l’allure d’une récession, devrait altérer les marges de croissance transmise pour la Tunisie. La volatilité des principales Bourses européennes traduit une intensification des craintes sur la croissance mondiale et la persistance de la crise des dettes en zone euro. Plusieurs indicateurs récents ont confirmé l’essoufflement des moteurs de la croissance mondiale, Etats-Unis et Chine, mais aussi Brésil et Inde.
Notons, à cet égard, que les indicateurs composites avancés de l’Ocde (11/6/2012), conçus pour anticiper les points de retournements de l’activité économique par rapport à sa tendance, pointent vers une activité économique en dessous de la tendance de long-terme pour la Chine et l’Inde, et «modérée» pour le Brésil. Pour sa part, la zone euro peine toujours, faute de consensus politique sur les moyens d’agir, à enrayer la crise de la dette. Dans ce contexte, les taux à 10 ans des obligations de l’Allemagne et de la France ont atteint, début juin, un nouveau plus bas historique, à respectivement1, 158% et 2,278%, signe que les investisseurs continuaient à rechercher les actifs les plus sûrs tant les craintes sont vives quant à l’avenir de la zone euro. De fait, le rendement espagnol à dix ans a atteint, le 19/6/2012, son plus haut niveau depuis la création de la zone euro, à 7,043%, alors même que celui de l’Italie s’est élevé à 6,29% le 14/6/2012, signe du stress des investisseurs, peu rassurés par le plan d’aide européen aux banques espagnoles. La prime de risque, i.e. l’écart entre les rendements espagnols et allemands, demeurait à un niveau très haut, à 563 Pb, signe de la défiance des investisseurs envers l’Espagne.
Par ailleurs, et plus particulièrement, la France, notre principal partenaire, se dirige vers la récession au 2e trimestre: la Banque de France vient de réviser à la baisse sa prévision de croissance de l’économie française au deuxième trimestre et s’attend désormais à un recul du Pib de 0,1%, alors qu’elle tablait jusque-là sur une stagnation (+0%). Il s’agirait, si cette prévision se concrétise, du premier trimestre de contraction de l’économie depuis que la France est sortie de la récession au printemps 2009. Toutefois, le président Hollande vient de contester cette prévision de baisse de 0,1% par la Banque de France en soulignant que cette croissance sera de 0,1% ou 0,2% au 2e trimestre (8/6/2012). Concomitamment, le secteur manufacturier européen s’installe dans la contraction, enregistrant sa plus forte contraction en près de trois ans au mois de mai. L’indice Pmi manufacturier Markit a reculé à 45,1, contre 45,9 en avril, renouant avec ses plus bas niveaux de juin 2009. C’est le dixième mois consécutif que cet indice ressort sous la barre des 50 points qui marque la limite entre contraction et croissance de l’activité.
En outre, le moral des investisseurs en zone euro a reculé pour le 3e mois consécutif en juin, tombant à un plus bas de plus de trois ans, alors que la croissance de l’Allemagne ralentit et peine à compenser l’aggravation de la récession dans les autres pays européens.
En fait, la position de S&P à l’égard des deux scénarii de croissance, favorable et défavorable, a été définie comme suit: «Nous pourrions abaisser les notations de la Tunisie si l’environnement extérieur devait s’affaiblir au-delà de nos attentes actuelles, déjà pessimistes, pour l’Europe, qui est le partenaire économique majeur de la Tunisie. Des conflits politiques imprévus ou des troubles sur le chemin de la transition pourraient également influer sur les notations. Inversement, nous pourrions éventuellement relever les ratings si un gouvernement élu mettait en œuvre des politiques générant une croissance soutenue et rapide qui soulage la Tunisie d’un chômage élevé en focalisant sur les besoins sociaux, et ramenait les finances publiques et les comptes extérieurs à des normes plus saines».
Le départage entre les deux scenarii supra est délicat mais la démarche à entreprendre est identifiable: suivi serré de la conjoncture européenne et focalisation sur les facteurs de compétitivité extérieure, d’une part, et, d’autre part, mise en exergue des éléments d’attente supra, à faire prévaloir pour le Lobbying (voir ci-après), en même temps qu’une communication percutante sur des régulations requises, notamment sur un terme rapproché.
V/ Recommandations/Préconisations
Dans ce qui suit, on se propose de présenter différentes préconisations, «urgentes» et à court terme, et «structurelles» à plus longue maturité. Six axes de recommandations peuvent être déclinés:
1- Préalable politique: le gouvernement transitoire est appelé à stabiliser le cadre politique par l’annonce d’un calendrier clair et bien défini sur la tenue d’élections libres et démocratiques, les modalités d’assainissement des rouages de l’Etat et de l’économie et la mise en place de règles et mécanismes transparents. L’ensemble des mesures à prendre doit s’inscrire dans une démarche qui tend à confirmer l’engagement irréversible de la Tunisie dans la voie de l’ouverture et la libéralisation économique. Il s’agit de signaux forts à envoyer aux acteurs et investisseurs nationaux et étrangers. A défaut de stabilisation du cadre politique, économique et social, les notations resteraient sous pression et alimenteraient, ainsi, l’incertitude économique et politique qui, à son tour, pourrait alimenter les révisions vers le bas des notations.
2- Ajustements macro-économiques:
a) La situation des sociétés confisquées sous administration judiciaire empire. Au regard des fragilités budgétaires patentes et des besoins socio-économiques pressants, les allongements de procédures et les tergiversations sont malvenus. Il est urgent de réinsérer au plus vite ces biens dans le circuit «actif» pour tirer un meilleur «rendement social» de ces actifs devenus publics, au moyen de la simplification des procédures pouvant s’apparenter à l’instauration de «procédures transitionnelles», et devant activer la levée de la situation de «standby» en sous-emploi que connaissent les sociétés agricoles, et le redémarrage des autres unités viables voire potentiellement performantes. Parmi ces dernières, le cas de celles dont la situation financière autorise l’éligibilité au marché boursier est posé.
La décision en la matière – justiciable du Gouvernement et de l’Assemblée Constituante – devrait être arrêtée dans un délai rapproché, étant considéré que les procédures subséquentes exigent un timing difficilement compressible au regard des exigences de transparence pour la conduite des éventuelles introductions en bourse.
b) Dépenses publiques: il s’agira de déployer, à titre principal, une politique budgétaire sélective, notamment en matière de ciblage des subventions, i.e. une compression des subventions au moyen d’un plus grand ciblage.
De même, qu’il importe de s’assurer d’une conclusion, la plus rapide possible, des négociations sociales. Tous retards, dérapages en la matière, se traduiraient par un choc très violent en termes d’image auprès des opérateurs, tunisiens et étrangers.
c) Dette publique: la tendance à la baisse de la part relative de la composante dette publique domestique (39,5% en 2012 contre 41,8% dans la version initiale du projet de budget général de l’Etat) traduit ce que certains analystes qualifient de «dérive vers plus d’endettement extérieur» (60,5% contre 58,2% version initiale) «et un tassement relatif de la part d’endettement domestique». Aussi est-il recommandé d’envisager l’opportunité de réexaminer cette clé de partage, au vu du durcissement des conditions de recours aux marchés extérieurs,
d’autant que la disponibilité de liquidités internes latentes est avérée comme en attestent, par exemple, les résultats de l’Opv sur Hexabyte et de l’Opf sur Ams.
d) Inflation: les tensions inflationnistes patentes altèrent les équilibres macro-économiques. Par-delà les impacts directs, les effets de second tour risquent d’induire des répercussions cumulatives pouvant conduire à une spirale salaires/prix. A cet égard, on doit relever que la Tunisie est confrontée à la persistance des tensions inflationnistes chez nos partenaires de la zone euro. Alors même que la pression des prix internationaux des produits de base (pétrole, acier, nickel, cuivre…) et des produits semi-fabriqués, s’agissant notamment des pièces de rechange, reste assez sensible. Ces tensions sont avivées par la poursuite du décrochage tendanciel du dinar par rapport à l’euro. Pour résorber les effets déstabilisateurs de l’inflation sur la croissance économique et préserver l’image du pays auprès des bailleurs de fonds et des agences de notation internationales, il s’agira d’entreprendre une intervention «forte et suivie» au niveau des circuits de distribution, et d’adopter une politique budgétaire sélective de ciblage des subventions. Il importe, en outre, de contribuer à l’atténuation du déficit commercial au moyen de mesures dissuasives pour contrer la tendance au sur-stockage en matière d’importation d’intrants.
e) A l’heure où le dernier rapport d’étape de l’UE au titre de la mise en œuvre de la Politique européenne de voisinage «Pev» (28/5/12) relève que «le gouvernement continue à faire reposer la croissance du pays sur les secteurs de services», il convient d’activer le Conseil national des services (Cns), qui n’aura eu jusqu’ici qu’une contribution très limitée en matière de promotion et de suivi du dit secteur, autant dire de son droit de regard sur les conditions d’exercice de ce secteur dont le potentiel est encore sous exploité, la part des services marchands dans le Pib devant croître, selon des prévisions établies en 2010, de 48% à 57% en 2016.
f) A terme, l’extension des opportunités d’investissement est tributaire des actions de relèvement des taux d’encadrement du système productif relevant du secteur privé, d’un meilleur positionnement dans les réseaux de distribution, et d’une consolidation des chances d’internationalisation des entreprises tunisiennes au moyen d’un accompagnement ciblé des groupes justifiant de la taille requise pour une incursion active et probante dans les marchés porteurs.
3- Ajustements financiers :
a) La pénurie de fonds prêtables moyens et longs, destinés à financer des projets à maturité différée, comme l’insuffisance de capitaux-risque, illustrent une des déficiences notables du système bancaire et financier tunisien. Aussi est-il requis d’orienter davantage le secteur bancaire vers sa première mission à savoir le financement du développement.
b) La Bct devrait focaliser sur l’accélération du nettoyage des bilans bancaires et l’amélioration de la recapitalisation du système via des augmentations de capital significatives, et envisager, de plus, de nouvelles augmentations de capital pour le secteur bancaire public. De ce point de vue, on doit rappeler que S&P a indiqué, dans son évaluation de novembre 2011, qu’elle maintenait le secteur bancaire tunisien dans la catégorie «risque bancaire élevé», considérant en particulier, que les banques ont mis en place des provisionnements insuffisants pour la couverture des prêts non performants, et que les règles de Bâle II pour identifier tous les risques n’ont pas encore été mises en œuvre. Et s’il a été relevé que la Bct a soutenu le système bancaire, il a été aussi souligné que la supervision du secteur bancaire est «à peine suffisante». Ce constat est d’actualité et implique une régulation probante.
Plus précisément, la commission des experts considère qu’il y’a un besoin urgent de renforcer les fonds propres des banques en relevant progressivement, par exemple le niveau minimum de capital social à 500 millions de dinars. Cette mesure pourrait encourager les mouvements de rapprochement entre banques et faire émerger des champions nationaux de grande taille qui leur permettrait d’envisager une expansion régionale. Parallèlement, les banques devraient mettre en place des départements BFI dédiés aux opérations de haut de bilan pour devenir à terme, une véritable courroie de transmission entre la banque et le marché boursier.
Enfin, plusieurs groupes affichent un niveau d’endettement élevé qui handicape leur développement. Ces groupes devraient se diriger vers le marché financier pour se recapitaliser et lever les fonds dont ils ont besoin pour leur croissance.
c) Indépendance Bct: l’indépendance de la Bct est un gage de «crédibilité» pour exercer un rôle de régulation effectif; mais, préalablement aux prises de décisions d’ordre stratégique pour la croissance globale, il importe de satisfaire à l’exigence de concertation voire de «synchronisation» tant il est vrai que la politique monétaire et la politique budgétaire sont inter-reliées, et que la garantie de stabilité des prix n’est pas exclusive de l’obligation de soutien à la croissance. Loin de tout cloisonnement préjudiciable pour l’image du pays auprès des opérateurs nationaux et étrangers, on doit admettre que le devoir de vérité de la Bct n’est pas incompatible avec toute démarche favorisant la synchronisation supra. Et pour ce faire, il importe d’engager de suite une «quasi-codification» instrumentale du processus de coordination, tant la période qui vient et qui s’étalera sur plusieurs années exige de maximiser les marges de «synchronisation», sans altérer fondamentalement l’indépendance requise pour permettre à la Bct d’exercer les fonctions d’alerte et de régulation.
d) Le crédit est relativement cher, comparativement aux normes internationales.
i. Le système financier tunisien est dominé par un secteur bancaire caractérisé par une faiblesse de la concurrence, une capacité d’innovation et un manque d’informations fiables sur la qualité des emprunteurs, ainsi qu’une incertitude sur le recouvrement des créances. De ce point de vue, les chefs d’entreprises font état, assez souvent, d’un durcissement des conditions d’accès au crédit bancaire en raison de l’application de coûts d’emprunts exorbitants (facturation des frais). De plus, la qualité des services bancaires est souvent mise en cause, s’agissant de l’exactitude des calculs effectués, de l’exactitude des intérêts et commissions perçus, des délais imposés pour le redressement des erreurs, de la rapidité d’exécution des ordres. Des ajustements devraient être entrepris dans le cadre d’une démarche concertée entre le système bancaire, les structures patronales et les représentants des consommateurs.
ii. La participation étrangère dans le secteur financier est encore limitée alors qu’elle permet des gains de productivité et des réductions des coûts sur l’intermédiation. Plus spécifiquement, il est préconisé de réexaminer l’opportunité de la privatisation de la Banque Zitouna; et annoncer le principe de l’octroi de nouvelles autorisations d’établissements financiers, incluant l’ouverture du secteur de la Finance Islamique aux capitaux étrangers.
iii. L’émission sur le marché primaire de la dette publique est toujours limitée et le marché secondaire demeure limité; le marché interbancaire est insuffisamment actif dès lors que la Bct assure un accès facile des banques aux liquidités, à un taux prévisible. Une meilleure prévisibilité des émissions du Trésor renforcerait la confiance des investisseurs et aiderait à réduire le coût de l’emprunt sur le moyen terme.
e) Bourse des valeurs mobilières de Tunis (Bvmt): cette vitrine de la confiance a été négativement impactée (en termes de reflux du volume des transactions notamment) par les récentes dégradations. Des annonces de réactivation de la Bvmt, avec agenda souhaitables, sont requises. A cet égard, il importe de puiser dans le lot, très fourni, des propositions et projets disponibles. Plus particulièrement, à l’heure où on envisage une revalorisation du rôle de la bourse, il faut rappeler que la garantie essentielle pour les porteurs réside dans la qualité et la célérité de l’information. Pour favoriser l’instauration d’une transparence effective, le projet de création d’une Association de défense des intérêts des petits et moyens porteurs mérite d’être examiné, sous l’égide de partenaires et associations multiples. Par ailleurs, certains analystes suggèrent, opportunément, de rendre l’abattement fiscal dans le cadre d’une introduction en bourse « plus attrayant ».
4- Attractivité/Environnement des Affaires
Les entreprises, surtout privées, réagissent aux incitations, aux coûts et aux contraintes, désignés sous le vocable «environnement des affaires», qui est déterminé, à titre principal, dans pays en développement, par le comportement de l’Etat.
*Les coûts de transaction sont relativement élevés: l’écart de qualité de certains services entre la Tunisie et les pays concurrents pénalise principalement le secteur on shore, s’agissant, en particulier, des carences du système administratif, entraînent des coûts de transaction élevés dans une économie ouverte, ne bénéficiant plus de la rente de protection, et s’agissant aussi de délais de dédouanement longs et d’une Administration fiscale pesante et lourde. Par-delà les régulations du système douanier déjà introduites (liasse unique, conformité aux cahiers de charge pour l’importation de plusieurs marchandises,..), le dédouanement reste perçu, par les importateurs, comme une sérieuse barrière non tarifaire (en termes de temps et d’incertitude d’entrée). Les procédures douanières sont jugées comme étant la seconde contrainte importante après les réglementations régissant la fiscalité et la flexibilité de l’emploi.
Par ailleurs, de multiples entraves sont encore ressenties: délais de réception des avis des laboratoires, augmentation des coûts d’entreposage par suite du rallongement du temps de dédouanement, «faible niveau de productivité» de la manutention des marchandises…
D’un autre point de vue, il importe, dans le contexte actuel, de focaliser sur la sécurisation des sites de production, et des voies d’accès à ces sites, sur les interventions urgentes pour la résorption des problèmes logistiques au niveau des approvisionnements et des expéditions pour les activités industrielles tournées vers l’exportation (garantir la fluidité de l’activité du port de Radès).
Eu égard des nouvelles contraintes subies par l’économie tunisienne, il y a lieu: - d’envisager la suppression des autorisations gouvernementales et communales auxquelles font face certains investisseurs notamment dans les zones de développement régional. De plus, des efforts devraient être entrepris pour simplifier et codifier les procédures administratives relatives aux services à l’entreprise, s’agissant en particulier de la réduction des délais de réponse (en imposant des dates butoirs, comme au Chili ou en Corée);
- d’alléger les procédures de passation des marchés publics souvent condamnés par le milieu des affaires tunisien et des bailleurs de fonds étrangers. Le problème de la compression de la «durée du processus de décision» se pose avec acuité. Dans l’attente d’une réforme structurelle du système des marchés publics, il importe d’adopter des dispositions réglementaires transitoires d’assouplissement – procédures d’urgence – pour accompagner les mesures de relance qui viennent d’être adoptées et leur conférer la célérité requise sans quoi leur portée serait altérée.
**Il est important que les conditions de transparence et de concurrence du marché prévalent. Par-delà les actions de prévention contre la corruption et les malversations qui entravent la saine concurrence entre les opérateurs, il est requis, dans cette phase cruciale, de renforcer les mécanismes de détection des entraves à la concurrence (ententes, abus de positions dominantes...), et de sévir de façon appuyée contre les pratiques anticoncurrentielles. Pour ce faire, il est recommandé d’élargir les prérogatives du Conseil de la Concurrence, s’agissant notamment de ses compétences juridictionnelles, du réexamen des panoplies de sanctions, et d’assurer une communication conséquente des résultats de son fonctionnement. Il importe, en outre, de faire participer le secteur privé dans l’évaluation et la mise en place des actions de lutte contre les pratiques non concurrentielles.
Dans ce cadre, des ajustements spécifiques sont opportuns:
- suspension de la discrimination entre le secteur on shore et le secteur offshore en faisant bénéficier les entreprises partiellement exportatrices des mêmes incitations et du même cadre règlementaire que les entreprises totalement exportatrices (Maroc, Turquie, Pologne);
- abaissement de moitié du seuil de capital minimum requis à l’enregistrement des entreprises. Le capital requis à l’immatriculation d’une entreprise s’élève à 352% du revenu par habitant. Ce capital est quasi nul au Canada, en Nouvelle Zélande, au Royaume Uni et aux Etats-Unis. L’Itceq indique que ce minimum peut empêcher l’établissement de nouvelles activités;
- simplification du Code des investissements industriels Cii par l’institution d’un régime de droit commun applicable automatiquement à tous les investissements à travers la suppression totale des restrictions et discriminations sur l’investissement quel que soit son origine et sa destination (Cas du Maroc);
- annonces de mesures d’assouplissement des restrictions imposées à la participation majoritaire au capital par des investisseurs étrangers (investissements de portefeuille);
- rendre publique une liste négative des activités non éligibles aux incitations du Cii (Pologne, Corée et Chili);
- les investissements fondamentalement viables-surtout les projets portant sur les ressources naturelles- ne devraient pas bénéficier d’avantages fiscaux particuliers. Au contraire, le gouvernement doit s’efforcer de négocier une part équitable des rentes tirées de l’exploitation des ressources naturelles.
*** D’autres composantes du cadre réglementaire et institutionnel des affaires, ainsi que la qualité de la gouvernance, affectent l’investissement privé. La levée de l’incertitude affectant les opérateurs privés, dont la situation est en «stand by» qui concerne la récupération de la faculté de déplacement, est aujourd’hui posée. Il convient à cet égard de clarifier, au plus urgent, ces situations, sans transiger avec l’obligation de redevabilité et de transparence requises. Cette clarification a valeur de message à l’ensemble des opérateurs, dont la grande majorité n’est pas concernée par les procédures en cours.
Par ailleurs, pour s’adapter aux exigences de l’économie mondiale, il est requis un environnement des affaires qui réduit les coûts, favorise la flexibilité, assure la prévisibilité et garantit l’homogénéisation des règles du jeu pour tous les investisseurs.
Notons à cet égard que, selon un sondage Iace sur un nouveau cadre incitatif à l’entrepreneuriat privé dans les régions défavorisées, près des 2/3 des chefs d’entreprises estiment absolument prioritaire de faciliter les conditions de création d’une entreprise et rendre plus flexible le code du travail, et près de la moitié assez prioritaire de faciliter l’obtention de permis et d’autorisation de construction, d’assurer l’exécution des contrats selon des délais raisonnables et d’améliorer les conditions d’enregistrement de la propriété. Ce constat a valeur d’enseignement.
a. Ouverture et fermeture d’une entreprise: en tenant compte de certains paramètres tels que les autorisations préalables (notamment celles liées aux réglementations environnementales, professionnelles et sectorielles) et les permis de construire, le délai d’ouverture peut dépasser les deux ans. En outre, la fermeture d’une entreprise est difficile. Le processus de déclaration en faillite n’est pas très coûteux mais prend environ deux ans et demi. Aussi est-il recommandé de réduire le nombre d’organismes de tutelle: revoir par exemple la structure du Guichet unique qu’est en fait un ensemble de guichets unis dans un même espace. Il est souhaitable que l’investisseur accomplisse, dans un même bureau, toutes les formalités sans avoir à se déplacer d’un bureau à un autre.
b. La législation du travail: la flexibilité du marché du travail permet aux entreprises de s’ajuster rapidement aux chocs conjoncturels et donc, de favoriser la compétitivité et la croissance. Des règles et procédures rigides découragent la restructuration des entreprises et occasionnent des coûts élevés.
c. Le rôle des institutions: la qualité de la gouvernance joue un rôle déterminant pour l’investissement privé. L’incertitude institutionnelle (imprévisibilité de la justice, changement inattendu des règles du jeu, corruption…) accroît les coûts de transaction, réduit la confiance des investisseurs, détériore leur visibilité et crée, par conséquent, un climat défavorable à l’investissement Il impératif de «mieux communiquer» avec le secteur privé. Et pour ce faire, il serait opportun de s’inscrire dans le cadre global des programmes initiés par l’Ocde pour améliorer l’environnement des affaires en s’inspirant des meilleures pratiques. De ce point de vue, il importe de justifier d’un climat des affaires attractif en termes de normes de protection de la propriété intellectuelle, de dispositifs de lutte contre la contrefaçon, ce qui exige un réajustement du cadre juridique en la matière, en donnant à la contrefaçon un aspect délictuel, de garanties de recours aux juridictions en cas de litige, et d’existence de mécanismes codifiant le respect des exigences environnementales.
De plus, il est préconisé:
- d’associer le secteur privé à la mise en place et la gouvernance des projets internationaux visant l’amélioration de la transparence;
- d’assurer la dissémination de l’information et un accès rapide aux documents administratifs, et ce pour réunir les conditions d’une bonne prévisibilité;
- d’alléger les charges liées aux obligations fiscales et de sécurité sociale pour les Pme et les nouvelles entreprises. De plus, il importe d’œuvrer à enrayer tous les abus dans le domaine fiscal. De ce point de vue, eu égard au choc subi par les investisseurs et à la persistance de leur réticence, il est recommandé d’envisager, une procédure transitoire portant exemption, pour une durée déterminée, des charges fiscales et sociales pour les projets nouveaux, i.e. les nouvelles créations à initier d’ici fin 2012.
5- Réformes institutionnelles et engagements euro-méditerranéens
Outre les aspects de régulation politique l’accent doit être porté sur l’engagement à poursuivre, selon un timing à proposer, le processus de convergence des cadres juridiques et réglementaires avec les normes européennes, au regard, notamment, des procédures de passation des marchés publics, des audits de comptabilité et des normes de propriété intellectuelle. Cette démarche est de nature à favoriser le retour des investisseurs étrangers et l’accès, dans des conditions moins «sévères», au marché financier international.
Il faut noter à cet égard que le rapport de l’Union européenne du 28/5/12 susmentionné fait état de «réformes nécessaires à l’établissement d’un Etat démocratique», et met l’accent sur l’obligation d’adopter les réformes législatives et organisationnelles nécessaires à la consolidation de la démocratie (justice, sécurité, médias), réitère l’objectif d’établissement d’une zone de libre-échange complète et approfondie, sous peine d’une reprise des négociations entre l’UE et la Tunisie en la matière, et rappelle l’engagement de procéder à la ratification du protocole du Mécanisme de règlement des différends commerciaux signé en 2009.
Le Rapport relève, en outre, que «le climat des affaires est devenu plus difficile en cette période de transition, en particulier pour ce qui concerne l’accès au marché», «qu’aucun changement n’est à signaler concernant les services financiers» et appelle à «une réforme profonde de l’Administration fiscale pour en restaurer la légitimité grâce à une plus grande transparence et, avant tout, l’assurance d’une plus grande équité devant l’impôt».
Cette évaluation devrait inciter à l’adoption de correctifs «significatifs» portant sur les déficiences invoquées par la partie européenne, sachant que la communauté financière internationale est particulièrement réceptive à l’endroit du constat de l’UE.
6- Lobbying
A l’heure où l’accès de la Tunisie aux marchés financiers internationaux est rendu difficile, il est requis d’engager une démarche de communication pour le rétablissement de son image, qui doit cibler en priorité les deux autres agences Fitch et Moody’s, outre S&P elle-même. Pour prévenir d’éventuelles déclassements subséquents en chaîne et cercles vicieux (Heritage, Coface) et restaurer l’image du pays, les éléments d’attractivité et de régulation envisagés plus haut doivent être mis en exergue dans le cadre d’une campagne de communication et de lobbying menée selon des normes professionnelles. Il s’agira d’émettre des signaux chiffrés de régulation et de rationalisation, et de fixer des «engagements» de timing à l’endroit des opérateurs du marché international.
Cette démarche de lobbying n’est pas à la charge exclusive des autorités publiques et monétaires. Elle implique un engagement direct et actif des opérateurs privés via leurs instances patronales et des acteurs de la société civile «économique et financière»…
Source: Iace.