L'homme d'affaires franco-tunisien Lotfi Bel Hadj aurait mis son carnet d'adresses et ses entrées dans le milieu médiatique français au service d'Ennahdha. Va-t-il profiter de ce rapprochement pour réactiver ses anciens projets en Tunisie?
Par Imed Bahri
Nos confrères ''Maghreb Confidentiel'', qui ont publié cette information, expliquent ce rapprochement par le fait que les deux hommes sont originaires d'El Hamma, petite ville située à proximité de Gabès (sud-est).
La même source ajoute que Lotfi Bel Hadj, fondateur de la société Zamarat Mining Ltd et actionnaire de la junior pétrolière ATIP, très introduit en Afrique subsaharienne, dispenserait au dirigeant islamiste «conseils et avis pour mieux calibrer les messages d'Ennahdha en direction des milieux dirigeants et des médias français.»
Des projets non concrétisés
Il serait utile de rappeler ici qu'au lendemain de la «révolution du jasmin», en 2011, Lotfi Bel Hadj a débarqué à Tunis avec plusieurs projets dans ses valises, qu'il espérait mettre en route dans les secteurs des mines, son terrain de prédilection, et des médias.
L'homme d'affaires, qui voulait créer un fonds d'investissement éthique et solidaire, Insaf Fund, a rencontré, à cet effet, plusieurs responsables financiers tunisiens, notamment à la Banque centrale de Tunisie (BCT).
«Le développement économique de la Tunisie ne se fera que sur de nouvelles bases: pas sur des principes FMistes, pseudo-démocratiques et ultralibéraux», affirmait alors M. Bel Hadj au quotidien ''Le Monde''. Il ajoutait: «La Tunisie va être le premier pays arabe démocratique. Son évolution aura valeur d'exemple. On ne doit pas et on ne peut pas échouer».
Insaf Found, fonds privé à capitaux ouverts, basé en Tunisie, devait avoir vocation à s'allier avec un fonds public pour créer des entreprises leaders dans chacun des secteurs économiques et ancrées dans différentes régions du pays. Son capital devait s'élever à plusieurs dizaines de millions d'euros, mais le projet n'a malheureusement pas dépassé... la phase d'annonce.
L'autre ambition de l'entrepreneur franco-tunisien: créer WinPress Group, un groupe de presse qui publierait un quotidien en langue arabe, un hebdomadaire humoristique et un mensuel francophone féminin. Après plusieurs réunions de travail entre ses conseillers français et certains pontes de la presse tunisienne, le projet n'a pas pu être concrétisé, à l'instar du projet de fonds d'investissement.
Quant aux visites de M. Bel Hadj dans certains sites miniers et pétroliers tunisiens, notamment dans les régions du centre et du sud, elles n'ont pas abouti, elles non plus, à des projets d'extraction ou d'exploitation minières.
Lotfi Bel Hadj n'a pas abandonné tous ses projets en Tunisie.
Par la fenêtre... d'Ennahdha
Lotfi Bel Hadj, âgé de 48 ans (il est né le 19 juin 1964 à Saint-Denis, en France, dans une famille de 11 enfants) et père lui-même de 4 enfants, vivant actuellement à Marrakech au Maroc, n'a jamais pu entrer par la grande porte en Tunisie, le pays de ses aïeuls. Cherche-t-il donc, aujourd'hui, à y entrer par la petite fenêtre... d'Ennahdha?
Sur son blog, Lotfi Bel Hadj se présente comme un économiste de formation, patron de Greenrock Funds, un fonds d'investissement luxembourgeois, spécialisé en gestion d'actifs, investissements privés, financements de projets, prises de participations dans le secteur des ressources naturelles stratégiques.
Le fonds contrôle la société Alternative Carbon, leader du financement et du développement de projets de compensation carbone agro-forestiers et énergétiques, en Afrique et en Amérique Latine. Ainsi que la société Zamarat Mining, groupe minier et de développement de ressources naturelles, actif en Afrique, spécialisé en métaux précieux.
M. Bel Hadj, homme de réseaux et d'influence s'il en est, a aussi conseillé plusieurs compagnies privées d'exploration pétrolière, pour leurs relations gouvernementales, la négociation de permis d'exploration, l'organisation de campagnes géologiques et l'acquisition de droits d'exploitation sur plusieurs champs pétroliers en Afrique du Nord et de l'Ouest et au Moyen-Orient.
Surnommé «l'homme d'affaires des banlieues», M. Bel Hadj a aussi été conseiller du management de Sport Five, la filiale du Groupe Lagardère spécialisée en marketing sportif et en droits media pour la négociation de la stratégie media et acquisition de droits de diffusion en Afrique pour toutes les compétions internationales.
Vice-président de l'Organisation mondiale des experts et conseils (Omeca), l'homme d'affaires franco-tunisien est également conseiller environnemental pour plusieurs gouvernements africains.
Il est, last but not least, l'auteur de plusieurs ouvrages: ''L'Economie Nomade'' (éditions Talleyrand), ''Trop Français ou Français de trop?'' (éd. Laffont) et ''L'Afrique et son capital carbone'' (éd. Respublica).