La seule solution pour une opposition responsable c'est d'asseoir sa position sur des valeurs et de ne pas transiger sur les principes de la liberté et de la démocratie. En d'autres termes: le religieux doit être exclu de la vie politique.
Par Rachid Barnat
A la question du journaliste de savoir si l'Assemblée nationale constituante (ANC) et le président provisoire de la république Moncef Marzouki sont légitimes ou non, Béji Caïd Essebsi rappelle que l'ANC a été constituée pour une durée d'un an, avec pour unique mission la rédaction d'une constitution! Et que ce délai s'est achevé le 23 octobre 2012.
Menace de la force et du terrorisme
L'ancien Premier ministre et actuel leader de Nida Tounes confirme, dès lors, que tous les constituants n'ont pas plus de légitimité que M. Marzouki, le «président» que Rached Ghannouchi et les députés d'Ennahdha ont sorti de leur rang pour le nommer président provisoire de la Tunisie.
«Alors l'opposition et vous-même auriez fait une faute politique en acceptant de proroger leur légitimité», demande le journaliste?
Et M. Caïd Essebsi d'expliquer que l'opposition ne voulait de la violence à laquelle l'acculait M. Ghannouchi, dont les hommes gardaient le pouvoir par la menace de la force et du terrorisme! Ce qui l'a conduite à transiger et à chercher le consensus...
A-t-il voulu dire par-là que M. Ghannouchi et ses hommes ont fait un putsch?
Cependant, il doit être clair pour les Tunisiens que le renoncement et la modération n'aboutissent jamais à rien car le problème n'est pas réglé et se reposera tôt ou tard, l'ANC devenant «une source de problèmes», comme le reconnaît Béji Caïd Essebsi lui même!
L'Assemblée constituante est devenue «une source de problèmes», reconnaît Béji Caïd Essebsi.
La seule solution pour une opposition responsable c'est d'asseoir sa position sur des valeurs et de ne pas transiger sur les principes de la liberté et de la démocratie. En d'autres termes : le religieux doit être exclu de la vie politique. Sans cela rien de bon ne pourra arriver et la crise persistera.
Il est clair, par exemple, que Bourguiba avait une vision politique fondée sur des valeurs même s'il savait louvoyer. Quelles sont les valeurs de l'opposition?
Le peuple, lui, a des valeurs claires qu'il n'a cessé de défendre tout au long de la gouvernance par la troïka dominée par les hommes de Ghannouchi... mais seul, puisque l'opposition ne l'a jamais suivi dans ses choix ni dans sa lutte; bien au contraire, elle l'a toujours contrecarré dans son action jusqu'à lui mettre les bâtons dans les roues!! Allant jusqu'à prolonger leur légitimité à des constituants en bout de course et ce contre la volonté du peuple, et caresser dans le sens du poil Ghannouchi et ses hommes, nous les présentant comme indispensables à la vie politique en Tunisie et incontournables... jusqu'à vouloir pactiser avec eux!!!
Une balle dans le pied
Que Ghannouchi tente de nier son appartenance et celle de son parti à la confrérie des Frères musulmans peut se comprendre depuis que celle-ci est inscrite sur la liste des mouvements terroristes en Egypte et en Arabie saoudite! Mais que Béji Caïd Essebsi lui apporte de l'eau à son moulin, en affirmant avec aplomb qu'Ennahdha ne fait pas partie de cette confrérie, c'est se tirer une balle dans le pied. Peut-on nous expliquer, dès lors, quelle différence y a-t-il entre Béji Caïd Essebsi et le très «moelleux» Néjib Chebbi?
L'ironie dans laquelle le leader de Nida Tounes enveloppe souvent ses affirmations sur le parti islamiste n'est pas intelligible et audible pour le commun des mortels. Rien donc ne vaut la clarté qui tranche et dissipe les ambiguïtés où niche souvent le «diable» islamiste.
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