Pour renforcer ses chances aux législatives du 26 octobre 2014, Ennahdha vient de s'assurer les services de la multinationale américaine Burson-Marsteller, grand faiseur d'images devant l'Eternel.
Par Moncef Dhambri
C’est ce qu’a rapporté, lundi 22 septembre 2014, le site ‘‘Holmes Report’’ (‘‘HR’’), une référence mondiale dans le secteur des relations publiques (RP).
La mission assignée à Burson-Marsteller consistera à «assister le mouvement islamiste dans ses activités de sensibilisation des médias et à soigner ses relations publiques aux Etats-Unis, au Royaume Uni et dans d'autres pays».
Eprouvant le besoin de justifier la conclusion de ce marché avec Ennahdha, un communiqué de Burson-Marsteller insiste que le contrat liant la multinationale de la communication au mouvement islamiste s'est fait en conformité avec la loi américaine sur l'enregistrement des agents étrangers (le Foreign Agents Registration Act, FARA), c'est-à-dire la législation des Etats-Unis sur les lobbies étrangers, et que l'accord entre les deux parties a été approuvé par le ministère américain de la Justice.
Outre cette transparence et cette légalité totales du contrat, Burson-Marsteller explique que sa tâche a pour objectif principal d'aider Ennahdha à promouvoir auprès des médias et autres intervenants occidentaux «l'intérêt qu'il y a à soutenir la tenue d'élections libres et indépendantes en Tunisie».
En somme, il n'y aurait que de bonnes intentions et de nobles principes dans cette association entre Ennahdha et Burson-Marsteller.
Ne nous y méprenons pas: le géant international des RP et de la communication, avec plus de soixante années d'expérience en fabrication d'images et gestion de crises, et le mouvement islamiste, qui joue son va-tout contre Nida Tounes, se sont associés pour des raisons qui servent, ni plus ni moins, leurs intérêts respectifs – et ces intérêts ne sont pas nécessairement ceux de la Tunisie, de la transition démocratique, de la réussite des élections..., que sais-je encore?
Durant le mois à venir, donc, Burson-Marsteller fera tout ce qu'il pourra pour soigner l'image d'Ennahdha auprès des pays amis de la Tunisie et pour faire accepter l'idée de l'«islamo-démocratie» de ses clients nahdhaouis.
Bien sûr, en contrepartie, les efforts de Burson-Marsteller seront amplement récompensés, en monnaie sonnante et trébuchante – et en devises étrangères – dont l'origine étrangère n'est plus un secret pour personne.
En retour de ces frais exceptionnels, Ennahdha pourrait sauver sa mise aux prochaines législatives et s'assurer un «bon et long» mandat quinquennal aux palais du Bardo et de la Kasbah – laissant à ses rivaux l'os du Palais de Carthage.
De la même manière qu'ils ont cru bon faire l'impasse sur la course présidentielle et économiser ainsi des dépenses inutiles ou superflues pour la conquête du trophée de Carthage, les stratèges de Montplaisir ont également compris que la cruciale élection législative se gagne ou se perd aussi à l'extérieur, auprès des partenaires de la Tunisie.
D'ailleurs, la semaine prochaine, un déplacement aux Etats-Unis du Cheikh Rached Ghannouchi, invité pour une série de conférences, servira cette fin: ce séjour du gourou islamiste lui permettra d'expliquer à ses auditoires américains que l'islamisme nahdhaoui et le modernisme font bon ménage et qu'il n'y a aucune crainte à avoir pour l'ouverture, la tolérance, la démocratie, etc., en Tunisie.
Et qu'Ennahdha, aux commandes des affaires du pays, veillera au grain...
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