La région de Monastir, considérée comme la capitale de l’industrie tunisienne du textile, est la plus affectée par la crise du secteur sur les plans économique et social.
C’est ce qui ressort d’une étude publiée récemment par le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES).
D’après cette étude réalisée sur un échantillon de 28 entreprises exportatrices de confection et 260 femmes travaillant dans ce secteur, réparties dans les différentes délégations du gouvernorat de Monastir, 87 entreprises de textile-habillement ont fermé leurs portes dans cette région et 4.500 ouvriers y ont été licenciés, au cours de la période 2007-2012. En outre, la valeur des exportations du secteur a baissé de 3,6% entre 2010-2012.
La région de Monastir occupe la première place au plan national dans le secteur du textile-habillement avec, en 2012, 511 entreprises, en majorité de petites tailles, représentant 26% des entreprises du secteur dans le pays, et 50.408 employés, soit 27,5% du total de la main d’œuvre sectorielle.
La durée de vie moyenne d’une entreprise du textile-habillement à Monastir ne dépasse pas 9 ans et demi. En outre, la moyenne d’âge de la moitié de ces entreprises ne dépasse pas 5 ans, dont 20% seulement sont encore actives sur une période de 5 à 10 ans.
Plus du tiers de la main d’œuvre opérant dans ce secteur travaille dans le cadre des contrats à durée déterminée et la titularisation des ouvriers ne concerne que les entreprises installées depuis les années 70 et 80.
Les femmes, qui représentent plus que 86% du total des employés dans le secteur, notamment dans les entreprises de confection, appartiennent à des milieux sociaux pauvres et moyens et souffrent de la détérioration des conditions sanitaires, alimentaires et d’habitation.
L’étude souligne, par ailleurs, les faibles qualifications de la main d’œuvre, qui est un obstacle devant son éventuelle restructuration qui permettrait le renforcement de ses capacités compétitives, notamment face à la concurrence agressive sur les marchés mondiaux.
Une réticence est aussi observée pour l’exercice de ce métier suite à la détérioration des conditions du travail et le faible niveau des salaires.
Analysant ce dernier aspect, l’étude a montré que la rémunération perçue par l’ouvrière productrice ne dépasse pas, dans les meilleures des cas, 4% du bénéfice réalisé par les grandes entreprises pour chaque pièce de vêtement.
Pourtant les entreprises du textile réalisent une marge bénéficiaire lorsqu’elles font de la sous-traitance. Ainsi, le coût moyen de la confection d’une robe varie entre 1,5 euro (3 dinars) et 1,8 euro (3,6 dinars) auprès des entreprises de sous-traitance, alors que son prix de vente au donneur d’ordres varie entre 2,5 euros (5 dinars) et 3 euros (6 dinars).
La grande marge bénéficiaire est cependant réalisée par les grandes entreprises et les grands distributeurs, du fait que le coût moyen lors de l’exportation varie entre 3 euros (6 dinars) et 3,5 euros (7 dinars), alors que la pièce est vendue dans les grandes surfaces en Europe à des prix oscillant entre 44 euros (88 dinars) et 90 euros (180 dinars).
Ceci souligne le déséquilibre flagrant des relations entre les centres de production dans les pays du Sud, comme la Tunisie, et les donneurs d’ordres du Nord, notamment européens.
D’après l’étude du FTDES, les obstacles au développement du secteur du textile résident dans une diversification limitée des marchés d’exportation, l’essentiel des marchandises étant destiné à l’Europe (95%), notamment à la France (33%), l’Italie (31%), l’Allemagne (11%) et la Belgique (6%).
Autre obstacle à la production dans la région, l’approvisionnement en matières premières à des prix élevés, alors que 80% de ces matières sont importées d’Europe, notamment de l’Italie (27%), de la France (20%), mais aussi de la Turquie (8%) et de la chine 6%.
Le secteur est surtout limité par la faible valeur ajoutée d’une industrie spécialisée dans la confection à bas prix.
I. B. (avec Tap).
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