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Tunisie : La démocratie au service des lobbys d’intérêt!

Oligarchie

Et si la démocratie n’était qu’une invention de la corporatocratie : les citoyens élisent des élus et ces derniers font des lois que le peuple n’a jamais proposées ni voulues.

Par Mohamed Chawki Abid *

En Tunisie, les exemples de ce règne de la corporatocratie sont nombreux : dédommagement des Nahdhaouis pour les années qu’ils ont passées en prison, octroi d’une retraite royale aux membres de l’Assemblée nationale constituante (ANC) et de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), augmentation des émoluments des députés, exemption des politiciens de la conformité à la réglementation de change, dispositions fiscales inéquitables et sanctionnant les contribuables disciplinés, réconciliation avec les corrompus du régime Ben Ali, etc.

La dictature de l’oligarchie financière

En Tunisie, la démocratie n’est constatée que lors du passage aux urnes, soit un jour tous les 5 ans (1.826 jours). Ainsi, pendant les 1.825 jours restants, règne la dictature de l’oligarchie financière et politique sans aucun retour aux citoyens par voie de référendum.

D’ailleurs, l’on constate clairement que quand l’argent gouverne, l’injustice prospère, la disparité économique et sociale se dilate et l’insécurité s’installe. A qui profite la démocratie représentative ?

«La démocratie est un régime à la solde d’une minorité déconnectée, irresponsable et corrompue», dit Christophe Buffin de Chosal. «La démocratie représentative est un produit de l’oligarchie, et ne réussit que dans les pays capitalistes», renchérit Alain Badiou.

L’implémentation de la démocratie, avec ses institutions constitutionnelles, profite à la prospérité de l’oligarchie financière et économique. Ainsi, la démocratie représentative sert à protéger les intérêts inégalitaires d’une minorité asservissant le «pouvoir législatif», aux dépens des doléances du peuple vivant sous un régime totalitaire enrobé d’un vernis démocratique.

Afin de protéger ses intérêts et de faire fructifier ses business douteux en toute légalité, l’oligarchie régnante choisit les acteurs du «pouvoir exécutif» via des députés acceptant de vendre leur intégrité.

Des «harkis» aux commandes de l’Etat

Plusieurs voix dans le monde se sont levées vainement contre les lacunes de la démocratie représentative, dont la faible représentation des minorités, la sensibilité du député à la tentation de l’argent, le dérapage entre les engagements de l’élu et ses prestations, l’aggravation de la méfiance envers les hommes politiques, la faiblesse des contre-pouvoirs, l’abondance de l’abstention…

Coluche disait quelque chose qui s’avère juste aujourd’hui: «Si les élections pouvaient changer quoi que ce soit, il y a longtemps qu’elles auraient été supprimées.» En effet, si le fait de voter changeait véritablement les choses dans l’intérêt du peuple, les élections auraient été supprimées par la synarchie, qui aurait inventé un autre système pour imposer au peuple ce que bon lui semble.

Maintenant, les pays impérialistes imposent leur modèle de démocratie aux pays pauvres, pour les asservir davantage et les piller. C’est ce qui est en train de se passer en Tunisie avec en plus des «harkis» placés aux commandes de l’Etat pour accélérer le processus. Avons-nous compris pourquoi nous ont-ils imposé une coalition contre-nature Nidaa-Ennahdha, bien avant l’élection législative?

L’entente monopolistique pré-électorale entre ces deux mouvements qu’initialement tout opposait n’est qu’une escroquerie élective, à l’insu des électeurs et en infraction des principes de libre compétition en démocratie véritable.

Pire encore, le recours au consensus a dopé davantage cette illusion démocratique, mettant ainsi à l’écart tout débat constructif. Le consensus est l’astuce imposée par l’oligarchie cosmopolite aux acteurs politiques pour camoufler les désaccords et reporter les problèmes. Si le consensus est efficace pour dépasser les polémiques idéologiques, il devient pervers pour les problèmes socioéconomiques, s’amplifiant dans le temps, conduisant le peuple au désarroi et plongeant le pays dans la faillite.

Le maintien d’un équilibre précaire

C’est ce que nous observions depuis bientôt 6 ans en terme de dégradation progressive des fondamentaux socioéconomiques: montée chômage, baisse du pouvoir d’achat, croissance en berne, fraude fiscale, fuite de capitaux, malversations diverses, rétention de l’investissement, faible employabilité, déséquilibre de la balance commerciale, aggravation de l’endettement, déséquilibres macroéconomiques, etc.

Maintenant, il n’est plus un secret pour personne que des lobbys d’intérêt tirent toutes les ficelles de l’Etat tout en faisant chanter l’exécutif et le législatif voire le judiciaire et les médias.

Les citoyens savent cela, mais ne réagissent pas, étant obnubilés par les problèmes quotidiens de plus en plus nombreux et épineux. Ils ne réagiront pas car se faisant pigeonner par le règne du matérialisme : «consommer c’est exister, avoir c’est être». Ils sont devenus esclaves de leurs vies à crédit! Ils ont peur de perdre cet équilibre précaire et préfèrent le gérer sans lever la tête. Si les pauvres sont disposés à se redresser au moindre sifflet, la classe moyenne ne veut pas risquer de perdre le peu qu’elle a. Reste à se demander jusqu’à quand vont-ils demeurer silencieux face à la confiscation du pouvoir de décision au nom de la démocratie et à la conduite mafieuse des affaires de la nation?

* Ingénieur économiste.

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