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La police tunisienne fait-elle respecter l’autorité de la loi ?

Youssef-Chahed-Ministere-Interieur

Le chef du gouvernement Youssef Chahed, lundi, à la salle des opérations du ministère de l’Intérieur.

Le nouveau chef de gouvernement doit communiquer son sens du droit et de la justice à la police qui peine encore à devenir «républicaine», c’est-à-dire au service des citoyens.

Par Salah El-Gharbi

Au lendemain de la «révolution» de janvier 2011, une fois le calme revenu, les Tunisiens s’étaient réjouis, ingénument, en voyant se succéder sur les plateaux de télévision, les représentants des différents syndicats de police, leur promettant un avenir radieux avec une police «républicaine», déterminée à faire respecter l’autorité de la loi.

Quelques années après, et après la promulgation d’une nouvelle constitution et les élections de 2014, où est-on avec ces promesses? Certes, comparée à l’anarchie des trois premières années de l’après 14-Janvier, l’ambiance, aujourd’hui, semble détendue, apaisée, mais on est loin de se sentir vraiment dans un pays où le doit est respecté comme il se doit.

Laxisme dans l’application de la loi

Il est vrai que l’année 2015 a été meurtrière, avec les attentats terroristes qui ont secoué nos villes, mais grâce à la vigilance des autorités sécuritaires, on a su endiguer la propagation de la menace des jihadistes. Mais, est-ce pour autant qu’on est sorti de la crise? La police serait-elle devenue effectivement une police «républicaine», au service de tous concitoyens sans discrimination? La population s’est-elle réconciliée avec sa police ?

Même si le nouveau chef de gouvernement, Youssef Chahed, dans son discours à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), a fait preuve d’optimisme, en reconduisant Hédi Majdoub à la tête du ministère de l’Intérieur, la réponse, hélas, est négative. Elle vient d’une députée de Nidaa Tounes qui déclarait, l’autre jour, sur les ondes d’une radio, avoir interpellé M. Majdoub en off, pour lui demander d’intervenir dans une affaire d’ordre public à Sousse et qui rapportait que ce dernier lui aurait signifié, sur un ton faussement badin, son incapacité à le faire faute de soutien (politique).

La sécurité d’un pays ne se mesure pas à l’absence ou pas de menaces terroristes. Il suffit de circuler en ville pour se rendre compte du laisser-aller, voire du laxisme, dans l’application de la loi. Il est inquiétant de voir la police nationale incapable de faire respecter l’interdiction de stationner dans l’emblématique avenue Habib Bourguiba à Tunis, du côté du Colisée, à quelques dizaines de mètres du ministère de l’Intérieur.

Au lieu de verbaliser les contrevenants, la police préfère mettre des barrières, tout au long de l’Avenue, qui enlaidissent le lieu et réduisent la largeur de la chaussée. Pis encore, on remarque, depuis peu, des automobilistes qui défient les autorités en garant leurs véhicules entre le trottoir et les barrières.

La police doit s’adapter aux changements dans le pays

Peut-on parler d’amélioration de la situation sécuritaire, quand les agents de l’ordre se font caillasser en pleine rue Charles-De-Gaulle, au centre-ville de Tunis? Peut-on être rassuré lorsqu’on porte plainte au district de la sécurité nationale contre l’usage des feux d’artifices qui troublent la tranquillité des citoyens et qu’on reçoit des réponses évasives et embarrassées, qui vous vont sentir que vous étiez en train de déranger les autorités pour peu de chose?

Le département de la sécurité nationale vit, certes, des difficultés et il vient d’être ébranlé par cinq années de tensions politiques et sociales. Néanmoins, et même si l’on peut constater, de temps à autre, quelques réussites spectaculaires, le secteur mérite d’être réformé en profondeur sur de nouvelles bases, d’être réhabilité pour qu’il s’adapte aux changements que connaît le pays.

Le nouveau chef de gouvernement devrait communiquer son sens de la fermeté à ce département régalien qui a besoin d’un nouveau code de conduite, non pas celui qu’on affiche partout sans lui accorder d’attention, mais un code qui définit la vraie mission de la police qui est celle d’être au service du citoyen, un principe que certains de nos agents semblent parfois oublier.

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