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Youssef Chahed au jour le jour : 4- Hafedh Caïd Essebsi et le handisport pour tous

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Le récit hebdomadaire des activités du chef du gouvernement d’union nationale Youssef Chahed tel qu’il aurait pu l’écrire lui-même. A l’ombre des Caïd Essebsi, père et fils…

Imaginé par Yassine Essid

Je me rends compte, au fil des semaines, à quel point ce rendez-vous quotidien avec moi-même, entrepris au départ comme un bref moment de détente, est devenu important dans ma vie. Mettant à profit ces courts instants de liberté, j’appris à réfléchir, rassembler des notes, classer et ordonner un amas de griffonnages afin de prendre du recul par rapport à l’actualité et rester, par-dessus tout, extérieur à l’histoire en adoptant face aux événements un point de vue personnel voire intime.

Un cadeau empoisonné

Maintenant, si je devais choisir entre les faits saillants de la semaine, à l’exclusion de l’incessant jeu de pendule entre les responsables l’UGTT et ceux de l’Utica, je commencerais par la nouvelle crise qui secoue Nidaa Tounes. Une foule de contestations et de vexations, plus ou moins cruelles, avait vite fait de ternir mon bien éphémère triomphe. Un premier revers subis après un beau parcours sans faute !

Je me suis retrouvé, en effet, et malgré moi, au centre d’une agitation tumultueuse et imprévisible qui a débordé et risque de mettre en péril l’action même du gouvernement et, partant, mon avenir politique. J’ai d’abord été nommé président du comité politique du parti par les leaders et membres présents à la réunion abusivement appelée «journée parlementaire du parti Nidaa Tounes», qui s’est tenue le 18 septembre. Cette nomination a été aussitôt contestée par une frange dissidente qui a fermement réclamé que je renonce à ce titre et récuse tout amalgame entre mes responsabilités au sein du parti et du gouvernement.

Me voilà enfermé dans un dilemme insurmontable : être reconnaissant, être ingrat. Pour moi, accepter cette nomination allait de soi, étant l’obligé du directeur exécutif du parti, mon ami Hafedh Caïd Essebsi, grâce auquel je dois ma fulgurante promotion. Mais c’était en même temps me mettre à dos le camp des pourfendeurs du fils du Président qu’on accuse à tort de vouloir faire main basse sur le parti et maintenant sur le gouvernement dès lors que son chef était désigné président du comité politique de Nidaa Tounes.

Pour l’heure, je crois bien avoir commis un regrettable impair en acceptant ce cadeau empoisonné. Le pire est que certains pourraient y voir la preuve d’un insatiable appétit du pouvoir.

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Le Premier ministre écoute les directives du président, qui lui assigne la feuille hebdomadaire. 

Le dualisme du régime politique

J’ai de plus en plus du mal à supporter le dualisme de ce régime politique. Si c’est moi qui incarne le pouvoir exécutif, si c’est encore moi qui suis politiquement responsable devant le parlement, alors pourquoi devrais-je rendre compte de plus en plus souvent au Chef de l’Etat de mon activité? Je me vois déjà soumis au rituel, la fois précis et grotesque, qui exposait naguère, chaque lundi matin, le Premier ministre aux directives de Ben Ali qui lui assignait sa feuille de route pour un gouvernement hebdomadaire du pays.

Je dois également accepter une ingérence de plus en plus pesante dans les affaires extérieures de la Tunisie qu’il m’a tout simplement confisquées. Béji Caïd Essebsi ne manque pas une occasion pour me rappeler, sans détour et avec fermeté, sa prééminence absolue dans le domaine de la politique étrangère. Pire, celle-ci est aujourd’hui partagée entre Carthage et Montplaisir.

Ainsi, par respect mais aussi par gratitude, je me laisse figer dans une relation infantilisante de maître à élève, incapable d’imprimer ma marque en politique. Alors je me rattrape comme je peux et j’exerce l’étendue de mon pouvoir sur les membres du gouvernement. Vous me voyez recevoir, contre toute règle et tout usage, les ministres, même régaliens, en étant assis derrière mon bureau. Car ils sont tous appelés à m’écouter et m’obéir au doigt et à l’œil. C’est moi qui préside, gouverne, dirige, organise, administre, accapare la parole, fais la leçon aux experts de même que je régis l’existence de mon entourage. Ils sont tous mes mandataires que je peux révoquer de la même manière que je les choisis… forcément avec l’aval du chef de l’Etat.

L’agriculture, mon grand souci

Je reviens encore une fois sur l’activité du ministre de l’Agriculture. De même qu’un ingénieur agronome, que je suis, puisse prétendre à la fonction de Premier ministre, un agitateur notoire qui jusque-là haranguait les gouvernements successifs de la terrasse de son café préféré, pouvait parfaitement assumer les fonctions de ministre de la République. Sauf que l’actuel titulaire de ce poste ne prend pas les choses par le bon bout. Diriger un secteur d’activité comme l’agriculture ne consiste pas à faire le tour du propriétaire ou déterrer de vieux projets pour leur donner une seconde vie. Les vaches regardent ainsi passer les ministres mais ne constatent aucun changement. Il faut prendre à bras le corps et à bras l’esprit les problèmes jusque-là non résolus car jamais abordés.

Le premier qui me vient à l’esprit est relatif à la lutte contre les maladies transmissibles à l’homme qui frappent le bétail et les animaux de basse-cour. Il faut d’urgence mettre en place des personnes qualifiées pour le contrôle de la filière agroalimentaire : les conditions d’abattage des animaux de boucherie, l’usage de substances toxiques qui entrent dans l’alimentation du bétail et de la volaille, l’énorme quantité de pesticides qui sert aux traitement des fruits et légumes, le recours aux additifs, conservateurs et autres améliorants qu’on retrouve partout dans nos assiettes; autant de perturbateurs endocriniens qui favorisent le développement des cancers, allergies troubles du système nerveux, destruction des globules rouges, etc.

Il y a évidemment la question de la détresse hydrique accentuée par une sécheresse persistante. L’idée d’unités mobiles de dessalement de l’eau fait partie de ces projets fumeux qui demandent du temps et beaucoup de financement selon les procédés retenus. C’est une solution de facilité qui occulte l’ampleur considérable des investissements, met en péril la biodiversité, n’est pas rentable pour l’agriculture et évite surtout les mesures indispensables d’économies. D’où l’urgence d’une nouvelle gouvernance de l’eau.

Dans la mesure où seul l’Etat est capable de garantir une gestion raisonnée et une répartition équitable de l’eau, le ministère doit en premier lieu engager une campagne de sensibilisation de la population en rappelant que la Tunisie est désormais un pays de sécheresse quitte à recourir au besoin à des mesures contraignantes : application de tarifs prohibitifs pour la partie qui dépasse un certain seuil de consommation, mise en place de techniques d’irrigation plus efficaces, entreprendre des travaux de réparation et d’entretien du réseau de la Sonede. Il est temps aussi de s’alarmer de l’exploitation anarchique de la nappe souterraine par sondage ou forage.

L’appropriation de ce bien commun, considérée par les usagers comme une ressource inépuisable et disponible en quantité infinie, est devenue problématique. Les impacts des prélèvements excessifs commandent d’envisager l’exploitation des eaux souterraines dans la perspective d’un développement durable.

Par ailleurs, les nappes phréatiques sont considérées comme n’appartenant à personne d’autre que le propriétaire du terrain. D’où une course à l’exploitation qui ne pourrait être résolue que par la mise en place d’un droit de propriété public. Garant de l’intérêt général, l’Etat est appelé par conséquent à assurer l’allocation, la répartition et la protection de toutes les ressources en eau. Dès lors, la propriété publique des eaux souterraines et l’application des redevances sur les prélèvements mettront un terme à cette situation de libre accès.

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Le handisport ne devrait plus se limiter aux handicapés. Les hommes politiques pourraient bien s’y mettre. 

Le handisport pour tous

J’ai appris, avec fierté, que les handicapés tunisiens avaient raflé 18 médailles aux Jeux paralympiques de Rio. Un beau succès d’autant plus louable que l’existence même de ces athlètes demeurait confidentielle, intéressant rarement le grand public et profitant peu des aides de l’Etat contrairement aux valides pourtant guère performants.

Cet événement m’a immédiatement interpellé. J’ai alors pensé, qu’à l’instar des jeux qui réunissent des athlètes handicapés de tous pays pour des épreuves handisports, on devrait faire franchir à une telle compétition un palier supplémentaire. Le handisport ne devrait plus se limiter aux handicapés, il faut l’ouvrir à d’autres catégories de la société. Pourquoi pas à la gente politique qui marche sur la tête? Je suis persuadé qu’arriérés mentaux, bras cassé, borgnes, aveugles, manchots et autres cul-de-jatte qui la composent ramèneraient autant de médailles que les sportifs handicapés. Il va de soi que la délégation tunisienne ne trouvera pas meilleur porte-drapeau que Hafedh Caïd Essebsi, un magouilleur de haut niveau doté d’un palmarès inégalé.

Au milieu ce fatras d’événements peu réjouissants, il y a parfois place pour la détente. En pleine campagne nationale contre l’utilisation des véhicules administratifs à des fins personnelles, un margoulin avait pris en photo un mouton transporté, tel un délinquant forcené, à bord d’une voiture de police. Réagissant à ce fait divers dénoncé sur le web comme un indiscutable abus perpétré par ceux-là mêmes appelés à appliquer la loi, les responsables du ministère de l’Intérieur n’ont pas trouvé meilleure dénégation que d’affirmer, défense de rire, que l’animal était tout simplement confisqué. Belle trouvaille! Pour contrer cette intransigeance répressive, quoi de mieux que la rigueur de l’information?

Espérons cependant que ce dangereux criminel n’a pas été livré à la boucherie du coin mais remis, comme le stipule la loi, à une fondation ou à une association de protection animale reconnue d’utilité publique.

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