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Pourquoi les touristes ne reviendront plus en Tunisie

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Le tourisme en Tunisie se meurt en raison de l’état de la dégradation de l’environnement, de l’incivisme des citoyens et l’extrême médiocrité des services.

Par Tarak Arfaoui *

La désaffection des touristes européens pour notre pays n’est pas uniquement due à des considérations sécuritaires. D’autres pays ont été frappés par le terrorisme et s’en sont rapidement sortis. La crise est beaucoup plus profonde et facilement compréhensible quand on se mesure à nos voisins qui n’ont pourtant ni la splendeur de nos contrées ni notre patrimoine historique inestimable, mais qui arrivent à fidéliser une clientèle de plus en plus exigeante.

L’état de délabrement et de déliquescence auquel est arrivé la Tunisie par la dégradation désastreuse de l’environnement, l’incivisme tout azimut et l’extrême médiocrité des services sont des tares nationales qui horripilent n’importe quel étranger qui ose s’aventurer actuellement dans le pays.

Il fut un temps où notre pays était réputé par sa quiétude et sa douceur, par la courtoisie de ses habitants et par sa nature accueillante. Il n’en reste pas grand chose actuellement. Il ne suffit pas de construire des palaces clinquants au bord de la mer et d’empiffrer les clients par des ripailles sans fin à des prix dérisoires pour faire redémarrer le tourisme.

Mauvais accueil dès l’aéroport

Comment peut-on encourager les étrangers à revisiter notre pays quand, dès le débarquement à l’aéroport, au contrôle de police, le préposé, mal rasé, vous accueille en grommelant sans même vous regarder et vous jette le passeport au visage…, quand des individus à la tête patibulaire vous happent les bagages pour vous obliger à payer un chariot…, quand à la sortie de l’aéroport les taximen se chamaillent pour arracher un client et l’embarquer dans des véhicules sales, parfois des épaves circulantes…, quand derrière à un comptoir on porte une tenue déglinguée et on est désagréable…, quand on fait longuement poireauter dans un restaurant les clients qui sont déjà exaspérés par la présence de chats sous la table, et surpris par des repas douteux…, quand on essaye de vendre aux touristes des produits de contrefaçons fabriqués à Taiwan et de faux bijoux en provenance de Turquie, les faisant passer pour des produits d’artisanat tunisiens, et j’en passe…

Pour mesurer le degré de déliquescence du pays, il suffit de faire l’expérience d’un simple voyage Tunis-Hammamet pendant 24 heures pour se rendre compte du désastre qui frappe de plein fouet l’industrie touristique et de comprendre la désaffection des étrangers pour notre pays.

L’autoroute de tous les dangers

Dès l’arrivée au péage de l’autoroute, vous prenez la file en sachant qu’il y a toujours un quidam (un camion en général) qui vous menace pour vous devancer sans respecter la queue.

En arrivant devant la cabine de péage, une masure sale, aux parois lézardées, les vitres brisées, remplacées par des cartons, un spectacle unique que vous ne verrez nulle part ailleurs (c’est du made in Tunisia) vous laisse la bouche bée.

Avant de payer, vous êtes harangués par des marchands ambulants qui se disputent en vous plaquant sur la vitre et avec insistance un énorme pain «tabouna» grisâtre enduit de cambouis et parfumé par les échappements des voitures.

Ensuite, si vous passez quelques secondes pour faire l’appoint, ou parce que le préposé est en train de rigoler au portable, un concert assourdissant de klaxons vous rappelle qu’il faut vous dépêcher.

En prenant l’autoroute, une extrême vigilance est de rigueur car certains piétons, spécialité tunisienne, n’hésitent pas à sortir de derrière les talus pour enjamber les rails de sécurité et faire la traversée de l’autoroute n’importe où au péril de leur vie.

A Hammamet comme à Kandahar

A l’arrivée à Hammamet, ville touristique mondialement connue, un décor hallucinant est planté à l’entrée de la ville vous laisse pantois. Un contrôle «sécuritaire» est installé au milieu de la chaussée, contrôle digne d’une caserne de commandos, sauf qu’ici les policiers sont décoiffés, les casquettes sur le capot de la voiture de service, nonchalants, l’un la cigarette à la bouche en train de verbaliser un automobiliste et le second assis à califourchon sur une caisse de fruits et légumes en train de rigoler et de palabrer au téléphone.

L’entrée de la ville est digne de Kandahar; les «nassabas» vous souhaitent la bienvenue dans des échoppes misérables où pendouillent des haillons, des sacs de plastique et des canettes traînant partout envahissent les bas-côtés, des taxis collectifs stationnant à même le terre-plein et n’importe où, roulant à contresens vous poussent à zigzaguer pour trouver une issue.

Cerise sur le gâteau : le rond point principal au gazon fatigué est littéralement squatté par un marchand de tapis qui étale fièrement sa marchandise à quelques mètres des agents de police qui font semblant d’organiser la circulation !

Je dispenserais au lecteur la description des services à l’hôtel (4 étoiles) qui nécessiterait une longue mais très longue dissertation. Je dirai simplement que les services y sont très loin des standards internationaux.

Cet inventaire rapide et bien réel de l’état lamentable des lieux est malheureusement palpable par n’importe quel visiteur tunisien ou étranger et explique très largement le fiasco de notre industrie touristique.

Où va le pays dans ces conditions?

Où sont les responsables? Les ministères concernés?

Que fait la municipalité, le délégué, le gouverneur?

Comment peut-on espérer booster le tourisme en tolérant cette décadence civique et environnementale ?

Notre chère Tunisie est à l’agonie.

 

* Médecin de libre pratique.

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