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Indonésie: Le pays sur un volcan… islamiste

Les islamistes s’attaquent au gouverneur de Jakarta, chrétien d’origine chinoise, Basuki Ahok.

Avec la montée de l’extrémisme islamiste, l’Indonésie, pays fédéral d’une exceptionnelle tolérance, risque d’exploser comme jadis la Yougoslavie.

Par Dr Mounir Hanablia *

Basuki Ahok, est le gouverneur de Jakarta, capitale de l’Indonésie, le plus grand pays musulman du monde. C’est un chrétien d’origine chinoise et, récemment, il a suscité une violente polémique lorsque, au cours d’un meeting, il a affirmé que les électeurs ne devaient pas être trompés par ceux qui invoquaient le verset 51 de la sourate El-Maida, pour ne pas voter pour lui.

Que dit ce verset? Il exhorte les croyants musulmans à ne pas choisir comme tuteurs, garants, amis, confidents, les chrétiens ou les juifs, et celui qui le ferait serait un des leurs.

Les islamistes montent au créneau

Cela lui a valu des accusations de blasphème par les associations des ulémas indonésiens et les partis qui leur sont inféodés comme le Front islamique, et il a été convoqué par la police pour enquête en attendant l’ouverture de son procès. Une marche de protestation a eu lieu le vendredi 2 décembre 2016 par les organisations islamistes.

Or cette affaire a fait suite à des tentatives des mêmes organisations islamistes d’introduire dans le code pénal indonésien un certain nombre de dispositions tirées de la charia comme la criminalisation de l’adultère, et des persécutions de plus en plus nombreuses contre des minorités religieuses, comme les Ahmadis, sont signalées ces dernières années.

Pourtant l’Indonésie avait de tous temps été citée comme un pays d’une exceptionnelle tolérance, où la population ne s’était jamais départie de son vieux fond traditionnel hindouiste et bouddhiste qui confère aux relations sociales une courtoisie remarquable, et même d’anciennes croyances populaires préislamiques ont persisté, en particulier dans l’île la plus densément peuplée et la plus islamisée de l’archipel, Java, où des monuments de l’ancien Royaume Hindou du Majapahit persistent comme les merveilleux çandi Ceto et le çandi Sukuh dédiés à la fécondité, situés près de la ville de Surakarta, dans un paysage paradisiaque au milieu des collines de théiers et de caféiers, où les femmes en mal de procréation depuis la nuit des temps viennent entretenir leurs espoirs.

L’Indonésie est, on le sait, un patchwork de communautés nationales et religieuses qui ont la plupart du temps vécu en bonne intelligence en particulier pendant le règne du dictateur Suharto, qui avait constitué l’âge d’or de la communauté chinoise, qui pour représenter 5% de l’ensemble de la population n’en contrôle pas moins près de 70% de l’économie et constitue toujours le bouc émissaire du mécontentement populaire, et les massacres dont elle a été victime après la chute du dictateur l’a amplement prouvé.

Mais l’Indonésie n’en a pas moins été confrontée à plusieurs irrédentismes nationalistes, certains musulmans comme celui d’Aceh au nord de Sumatra, d’autres chrétiens comme aux Moluques du Sud ou en Nouvelle Guinée.

La wahhabisation rampante

Quoi qu’il en soit, avec la guerre contre le terrorisme lancée en 2001, une tendance islamiste radicale a commencé à se manifester, en particulier après le sanglant attentat de Bali, et désormais les différentes minorités qui représentent 20% de la population, avec la wahhabisation rampante, éprouvent désormais des inquiétudes quant à leur avenir au sein de la fédération indonésienne, et il est à craindre qu’à l’instar du scénario qui s’était déroulé à Timor Leste, ce merveilleux pays ne finisse par exploser dans un scénario tragique semblable à celui de la Yougoslavie. La seule issue possible pour la préservation de l’Indonésie n’est pas l’islamisation mais une confédération de régions autonomes où les citoyens auraient les mêmes droits indépendamment de leurs ethnies ou de leurs religions. Il ne faut pas l’oublier, symbole de la tolérance, aujourd’hui à Jakarta la plus grande mosquée côtoie la plus grande cathédrale du pays.

* Cardiologue, Gammarth, La Marsa.

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