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Le jihadisme aujourd’hui est de la délinquance

Il est temps d’oser le dire, et ce au nom des valeurs mêmes de l’islam : le prétendu jihadisme, guerre armée, verse désormais dans la pure délinquance.

Par Farhat Othman

En effet, le jihad n’a plus rien à voir avec les causes de libération et les valeurs de l’islam. Surtout pas les lâches crimes commis récemment au nom d’un islam violé et trahi, car cette foi humaniste réprouve de telles forfaitures.

Arrêter de violer l’islam

Rappelons-nous donc qu’en islam authentique, il n’y a plus que le «jihad akbar» depuis l’érection et la consolidation de l’État islamique.

Déjà, le premier acte fondateur de l’islam que fut la «hijra», l’émigration de la Mecque vers Médine, a pris fin avec la conquête de la Mecque.

Certes, le jihad mineur a continué un temps après, mais ce fut pour instaurer l’État d’islam et le défendre, car il était encore fragile. Aussi, cette guerre armée, y compris dans les expéditions militaires appelées «fath» (ou conquête), relevait-elle des nécessités stratégiques de l’époque imposant de mieux se défendre en pratiquant l’attaque. Et cela en parfaire conformité avec l’esprit de l’islam qui n’autorise la violence que pour se défendre en cas d’agression.

C’est, d’ailleurs, une interprétation extensive, mais légitime de l’agression qui permet aux mouvements de libération nationale de se réclamer du jihad, comme on le voit en Palestine. Car il est question d’une agression qui dure, celle d’un État colonisateur qui ne veut pas se plier au droit international qui lie sa réalité avec celle d’un autre État, un frère jumeau monozygote qu’est l’État de Palestine.

De plus, la notion du martyr qui s’est imposée chez nous est un concept purement judéo-chrétien, car le martyre en islam est le témoignage; ce qui suppose de vivre pour témoigner et non de mourir. On n’offre sa vie à Dieu que par la piété; et cela nécessite le «jihad akbar», soit l’effort su soit pour se purifier, le diable ayant une part dans l’humain, sa part sombre que n’illumine qu’une spiritualité cultivée comme une plante rare.

Arrêter une politique irréaliste

Or, que font les Arabes ? Au lieu d’en appeler au droit que méconnaît Israël, on l’oublie, se focalisant sur ce qui doit être accessoire, l’acte belliqueux, tout en oubliant l’essentiel, la légalité et le droit. Agissant de la sorte, on ne fait que perdre ce droit et servir donc Israël qui ne veut déjà s’y plier, usant de sa force actuelle pour imposer son injustice.

Comment alors obtenir notre droit quand on ne fait rien pour l’obtenir, agissant même de la façon attendue par celui qui tient à ne pas y revenir ? Quelle folie, d’autant plus qu’on se rend coupable en plus d’irréalisme en niant un fait incontestable, à savoir la réalité d’État d’Israël, se limitant à ne le traiter que comme entité. N’est-ce pas servir au mieux sa stratégie consistant à se prétendre victime des Arabes assez fous pour ne même pas réclamer leur droit, celui d’agir pour l’application du droit international. Or, comment y arriver si on ne le viole ainsi et de la manière la plus éhontée?

À cela s’ajoute le commerce que d’aucuns font de la religion, l’instrumentalisant pour leurs visées politiciennes, quitte à en violer la substantifique moelle. Ainsi justifie-t-on violences et crimes par l’islam quand il ne les admet que pour se défendre !

Qui est donc l’agresseur dans les derniers crimes de Turquie et d’Allemagne, perpétrés au nom d’une foi salie? L’horreur atteint son comble pour nos, les Tunisiens, du fait de l’implication directement ou indirectement d’un national dans les deux drames.

Il est vrai, certains peuvent toujours soutenir que l’agression de l’Occident en général est permanente, continuant à cultiver une islamophobie déclarée ou occulte, outre celle d’Israël se refusant à la paix des braves en Palestine. Mais que fait-on pour y arriver?

Nos prédicateurs, avec l’assentiment tacite pour le moins, de nos politiques, continuent à verser dans un terrorisme mental cultivé à la faveur d’une confusion axiologique terrible.

Oser être éthique

C’est cet état des choses qu’il importe de traiter pour espérer sortir de l’impasse actuelle ou l’islam est devenu le porte-drapeau des délinquants de tous poils, Arabes musulmans et pro-Arabes musulmans comme leurs ennemis déclarés cherchent à en faire les boucs émissaires d’un nouvel impérialisme, mental celui-ci.

Car il se nourrit de la honte légitime que les vrais musulmans ont de la caricature qu’on donne de leur foi foncièrement humaniste au point de renier leurs valeurs, leurs traditions et leur culture qui ont illuminé le monde pendant un moment qui a bien duré et qui ont été au coeur de la Renaissance occidentale.

Aujourd’’hui, avec la fin du monde ancien issu de la Seconde Guerre mondiale, ses tenants, occidentaux pour l’essentiel, tiennent à en faire durer la dramatique agonie en s’alliant à des intégristes supposés musulmans et qui n’ont rien de l’islam, car ils ne sont que des sauvages. D’où cette alliance entre le capitalisme sauvage et les islamistes tout aussi féroces que lui; c’est le capital-islamisme sauvage.

Il est temps de le dénoncer par une politique de courage et d’humanisme qui suppose d’initier les actes auxquels on se refuse actuellement et qui ont des retombées sur l’inconscient collectif et l’imaginaire populaire.

Il est temps de sortir des sentiers battus de la politique à l’antique pour oser une politique éthique aussi bien sur le plan national qu’internationale. Et c’est en Tunisie que cela doit se faire comme conséquence fatale de la révolution tunisienne, son magistral coup du peuple, cette révolution mentale ayant été virtuelle avant d’être réelle.

À la veille du sixième anniversaire de la révolution 2.0, on n’a plus le choix que d’oser incarner l’exception Tunisie. Osons donc les actes qui sauvent non seulement notre pays de sa terrible confusion des valeurs, mais le monde entier.

Soyons justes de voie et de voix en initiant au plus vite une réforme législative en profondeur de nos lois obsolètes, surtout celles se prétendant inspirées par l’islam, alors qu’elles le violent ! Osons aussi imposer le réalisme qui a toujours caractérisé la diplomatie tunisienne en renouant avec la doctrine de Bourguiba sur le conflit de Palestine.

C’est en agissant sur de tels noeuds gordiens politiques, sur le plan interne et international qu’on aura une chance de vaincre le terrorisme en toilettant déjà de ses manifestations mentales !

Osons, car le monde, devenu matérialiste à l’excès, a surtout faim d’éthique ! Or, c’est le meilleur de la spiritualité dont l’islam est une belle incarnation tant qu’on n’aura pas galvaudé son esprit et ses visées par un commerce bien bas de gamme.

* Universitaire. 

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