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11-Septembre : Le grand jeu continue

Il y a 16 ans, jour pour jour, les attentats du 11-Septembre aux Etats-Unis allaient ouvrir une page sombre de guerres et d’instabilité dans le Grand Moyen Prient.

Par Dr Mounir Hanablia *

Le 11 septembre 2001, on en connait les péripéties, du moins celles relayées par les moyens d’informations : près de 3000 personnes décédaient à New York dans un déluge de poussière, au cours d’attentats d’une portée sans précédent commis sur le sol américain contre les symboles de l’Etat et de sa domination mondiale.

Des attentats, dont l’un a eu la primeur historique d’être retransmis en direct par la télévision puis sur toutes les chaînes du monde, et sur les lieux desquels aucun débris d’avion n’a été récupéré pour être montré au public, après que quatre tours de plusieurs centaines de mètres de haut se soient successivement effondrées comme à la parade selon une ligne verticale physique parfaite matérialisant la direction de la force gravitationnelle de notre planète. Mais mieux vaut éviter d’en parler, il n’est toujours pas de bon ton de le faire, sous peine de se voir accuser de conspirationnisme, et ainsi qu’on le sait, ce mot signifie looser, antisémite, obsédé, politiquement incorrect, ou plus simplement, attardé mental.

La guerre mondiale contre le terrorisme

Quoi qu’il en soit, la portée mondiale de l’événement pour des centaines de millions d’Arabo-musulmans s’est située plutôt dans ses conséquences. Il a été le coup d’envoi de ce qu’on a qualifié de guerre mondiale contre le terrorisme qui a vu les armées américaines entrer en action en Afghanistan, où un gouvernement «démocratique» était installé, et sur les bordures du Pakistan où l’armée au pouvoir était sommée de lâcher, du moins en apparence, ses protégés talibans autant locaux qu’extérieurs, et dont l’armement atomique était «sécurisé» selon des modalités dont on ignore toujours aujourd’hui tout.

Mais ce n’était là que le commencement. Très vite, Saddam Hussein qui n’avait jamais rien eu à avoir avec l’islamisme et dont le pays avait été soumis depuis 1991 à un sévère embargo mené sous l’égide de l’Onu, aux conséquences inhumaines ayant occasionné la mort de près d’un million d’enfants privés de médicaments, victimes d’une infrastructure sanitaire détruite, était ciblé par le tandem américano-britannique, sans aucune preuve tangible, en tant que soutien des terroristes, auteur de violations sur les résolutions internationales relatives à l’interdiction de fabrication et de stockage d’armes de destruction massives. Et en 2003, l’Irak était envahi au prix d’un nombre de victimes estimé à 500.000, et du pillage de ses trésors archéologiques, sans que les fameuses armes de destruction eussent été découvertes, puis placées sous l’autorité d’un proconsul américain, Paul Bremer, qui s’empressait d’abord de démanteler l’armée irakienne, et le parti Baath, puis de découper, au nom d’un illusoire fédéralisme, le pays en trois zones distinctes, avant d’en confier la direction à un autre gouvernement «démocratiquement élu» qui devait s’avérer être dominé par des partis chiites sectaires, ainsi que par les Kurdes, déjà pratiquement indépendants dans la région de Kirkouk et Irbil, sous protectorat américain, depuis la première guerre du Golfe.

Et bien sûr les fameuses organisations terroristes sunnites, Al Qaida, puis plus tard l’Etat islamique (Isis, Daech), allaient prospérer et connaître en Irak puis, plus tard en Syrie, un essor sans précédent, dont jusqu’à présent on ignore encore tout à fait les modalités.

D’une guerre l’autre : la grande instabilité

Ce que l’on sait en revanche c’est qu’après une période de coopération avec l’Iran en Afghanistan et en Irak, contre Al Qaida, puis contre les sunnites irakiens, les choses ont radicalement changé après les guerres finalement sans résultats probants menées par Israël contre l’Autorité Palestinienne de 2001 à 2003, puis contre le Hezbollah libanais en 2006, et les années suivantes contre le Hamas en 2008, 2010, et 2014.

C’est à partir de ce moment là que l’Iran a commencé par être perçu comme l’ennemi principal, un printemps iranien y a même été fomenté, en 2008, mais qui a avorté face à la vigilance des autorités et à la féroce répression organisée par les Pasdarans.

Mais tout ceci a constitué pour les pays du Golfe et la Turquie l’occasion d’apporter leur soutien aux groupes terroristes sunnites, auquel l’avènement du Printemps arabe allait impulser un développement décisif.

Il y a donc un fait, le 11-Septembre a constitué l’acte de naissance, sinon le mythe fondateur, officiel, d’une nouvelle politique américaine qui, en réalité, après la chute du mur de Berlin, autrement dit la défaite de l’Empire Soviétique, avait débuté en 1991 avec la Guerre du Golfe, visant à démanteler dans l’arc de cercle moyen-oriental, et sans doute aussi en Afrique du Nord, les Etats nationaux modernistes qualifiés de nationalisme radical , issus de la colonisation, au besoin en y introduisant sur la scène politique des partis particularistes ou confessionnels, bannis ou interdits, sinon au besoin à les remplacer par des Etats ethniques ou confessionnels, dont les exemples les plus achevés pour le moment sont constitués par le Kurdistan Irakien, la république du Sud-Soudan, et où les royaumes combattants de Libye et de Syrie constituent ceux appelés à pérenniser et à pourrir.

Mais pour le moment cette politique est aussi ailleurs en train de buter sur l’anarchie régnant en Afghanistan avec le retour en force des Talibans, cette carte maîtresse dans le grand jeu pakistanais face à l’Inde, sur la guerre désastreuse déclenchée par les Saoudiens au Yémen, dont ils n’arrivent pas à se dépêtrer, et sur la résistance du régime iranien qui, quoique rétrograde dans sa gestion du quotidien, ne s’en est pas moins révélé nationaliste, et modernisateur sans être moderniste.

Dans tout cela il est évidemment légitime de se poser la question, celle de savoir quel rôle a été dévolu au Printemps Arabe dans cette stratégie impériale de contrôle des puits de pétrole face aux Russes et aux Chinois.
Il est sans doute trop tôt pour y répondre, mais on peut déjà affirmer 6 ans après son déclenchement que celui-ci a été un facteur de déstabilisation, d’interventions armées étrangères, d’endettement extérieur, et de régression économique et sociale dont pour le moment rien ne permet de prédire la fin.

* Cardiologue, Gammarth, La Marsa.

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