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Electricité : Le feuilleton de la centrale de Mornaguia se poursuit

La réalisation du projet de centrale électrique de Mornaguia, qui s’enlise dans les méandres des suspicions de corruption, risque de prendre du retard avec des surcoûts à l’horizon.

Par Khémaies Krimi

Abdelkader Jelassi, le secrétaire général de la fédération de l’électricité et du gaz relevant de l’UGTT, la centrale syndicale, a révélé à l’agence Tap que l’appel d’offres lancé pour la réalisation de la centrale d’électricité de Mornaguia (14 km à l’ouest de Tunis) a été déclaré infructueux par le comité de suivi, d’enquête et de révision des marchés publics.

Selon nos informations et en dépit de la tendance fâcheuse de la Steg à ne pas communiquer sur ses marchés, c’est au groupe italien Ansaldo Energia qu’est revenu, à l’issue d’un deuxième appel d’offres, le marché de la centrale électrique. Le groupe a proposé un investissement de 359 millions de dinars tunisiens (MDT) pour l’acquisition et l’installation de deux turbines à gaz.

D’une capacité de 300 mégawatts pouvant aller jusqu’à 600 mégawatts, la centrale sera financée par deux crédits garantis par l’Etat tunisien d’un montant global de 663 MDT. Le premier (263 MDT) est accordé par le Fonds saoudien du développement tandis que le second (400 MDT) est fourni par la Banque islamique de développement (BID).

Le projet va être encore du retard une fois retardé

Selon le syndicaliste, ce comité de suivi, d’enquête et de révision des marchés publics a relevé des irrégularités au niveau des options techniques et de la manipulation des cahiers des charges relatives à l’offre financière.

Résultat: la centrale, qui devait être fin prête en 2018 et opérationnelle en 2019, va accuser encore du retard.

Pour mémoire, le marché de cette centrale a fait l’objet d’un premier appel d’offres en 2016. Ses résultats ont été rejetés par la Commission supérieure des marchés (CSM), en raison de soupçons de corruption relevés par des députés et des médias.

Effectivement, la direction générale de la Steg de l’époque (2015-2016) s’était entêtée, jusqu’à l’ultime minute, à défendre le dossier du candidat allemand Siemens qui avait proposé un investissement de 470 MDT pour la réalisation de la centrale de Mornaguia, alors que le candidat italien en lice, en l’occurrence le groupe italien Ansaldo Energia qui vient de remporter ce marché, avait proposé 350 MDT, soit une différence de 120 MDT, de quoi construire une nouvelle centrale.

La direction générale de la Steg avait prétendu, à l’époque, que Siemens répondait mieux au cahier des charges sur le plan technique.

Soumis à l’approbation de la CSM, comme le stipule la loi, cette dernière a rejeté, purement et simplement, les résultats de cet appel d’offres et demandé le lancement d’un autre et la révision du cahier des charges. Pour la Commission, l’écart entre les deux offres est énorme. Ses experts n’ont pas été convaincus des justificatifs techniques de la Steg.

Des surcoûts à l’horizon

Aujourd’hui, avec l’annonce du rejet des résultats de ce deuxième appel d’offres, la centrale de Mornaguia va coûter plus cher en raison des surcoûts générés par l’effondrement, depuis avril 2017, du dinar, la monnaie tunisienne, par rapport aux monnaies d’investissement et d’endettement (+15% par rapport au dollar et à l’euro).

Entre-temps, les responsables de ces surcoûts et de cette mauvaise gouvernance manifeste, qui prévaut dans cette entreprise, continuent à bénéficier de tous les avantages d’une entreprise publique qui gère des impayés de 1000 MDT, et ce, dans l’impunité la plus totale.

De l’avis d’institutions d’appui et de contrôle crédibles dont la Cour des comptes, l’Ordre des experts comptables et l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), la Steg, tout autant que d’autres entreprises publiques opérant dans le secteur de l’énergie (STIR, Etap…), est «l’exemple type de l’entreprise publique non transparente et mal gérée».

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