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Agression tripartite contre la Syrie : Le retour de l’ordre colonial ?

Pour «l’usage présumé d’armes chimiques», on bombarde la Syrie, alors que le jour-même la commission d’experts devait arriver sur place pour mener une «enquête impartiale»!

Par Amor Cherni *

Encore une «agression tripartite» contre un pays arabe, sauf que, cette fois-ci, l’entité sioniste «naissante» en 1956, a été remplacée par un vieux pays impérialiste, depuis plusieurs siècles génocidaire et esclavagiste, et, seul, jusque-là — heureusement —, à avoir fait usage d’une «arme de destruction massive» !

Ces puissances qui pillent le tiers monde

Quant aux deux puissances «colonisatrices et civilisatrices» de l’humanité, elles ont repris du poil de la bête à la faveur d’une mondialisation, venue annuler le peu d’indépendance que les pays rebelles à l’ordre colonial avaient gagné, à la lumière de leurs luttes, de la révolution socialiste et de la «guerre froide».

Ces pays qui ont «pillé le tiers monde» pendant des siècles et qui continuent à le piller, après avoir converti les fabuleux profits coloniaux qu’ils en ont tirés, en fonds à lui allouer généreusement sous la forme d’une sempiternelle dette, laquelle a fait, dans le passé, ses preuves d’efficacité en tant que clé de la colonisation directe (le cas de l’Egypte et des pays du Maghreb entre autres), entendent toujours l’enchaîner de ses propres chaînes.

Le dispositif idéologique, qui a couvert ce processus dans le passé et qui le justifie aujourd’hui, est fait d’un saupoudrage de chétives valeurs pseudo-morales, balançant entre un fantasque messianisme dans le passé et un humanisme de marché à présent; la civilisation et le progrès hier, les droits de l’homme aujourd’hui! C’est au nom de la civilisation qu’on a étouffé et détruit de florissantes civilisations dans le passé; c’est au nom des droits de l’homme qu’on tue aujourd’hui des hommes et qu’on détruit des Etats — le tout, en réalité, pour s’assurer de «juteux contrats», détruire pour être invités à reconstruire, et accumuler encore davantage de profit.

C’est à croire qu’il y a homme et homme et que l’unité de l’espèce, ardemment défendue pendant l’âge classique par les Lumières, a subi, sous les coups du marché, de graves craquements.

L’indignation à géométrie variable

Une vieille dame tuée par des délinquants à Paris fait descendre des milliers de manifestants dans la rue, et des dizaines de morts et des milliers de blessés par balles réelles, à Gaza, dans des manifestations pacifiques, chez eux, sur leur terre, ne suscitent qu’indifférence et ignorance.

Pour le grotesque mensonge des «armes de destruction massive de Saddam», on détruit l’Irak; pour le mensonge non moins grotesque de la colonne de blindés qui aurait été en marche sur Benghazi (voir le film ‘‘On tue Gadhafi’’, projeté dernièrement sur la chaîne française n° 5), on détruit la Libye.

Pour «l’usage présumé d’armes chimiques», on bombarde la Syrie, alors que le jour-même la commission d’experts devait arriver sur place pour mener une «enquête impartiale»! Mais lorsque le «phosphore blanc» — une autre «arme de destruction massive», non plus imaginaire mais réelle cette fois, a été déversé sur une population parquée dans une «prison à ciel ouvert» qui s’appelle Gaza, on a trouvé que le pays agresseur, «colonialiste et raciste», aux termes d’une motion des Nations Unies, «avait le droit de se défendre».

Homme et homme ? Certes, sans aucun doute ! Assurément, c’est l’homme qui a créé le marché; mais c’est le marché qui crée aujourd’hui l’homme et qui l’utilise en fonction «de ses besoins». La «réification du travail en marchandise», soulignée par Marx, a fini par gagner l’homme lui-même devenue marchandise, et l’humanisme des «droits de l’homme» est devenu un humanisme de marché, obéissant aux lois du marché et fixant la valeur de tout individu selon sa valeur marchande.

L’ogre du marché et la résistance des peuples

Il en est de l’histoire de l’homme et du marché, comme de celle racontée par Mary Shelley dans son célèbre roman ‘‘Frankenstein’’ ! L’humanité a donné naissance à un dangereux monstre qui risque de l’exterminer.

Face à ce danger, il n’y a qu’un espoir : la lutte des peuples contre leurs oppresseurs et pour leur émancipation. C’est la résistance des nations à l’injustice et au pillage de leurs richesses, qui est le moteur de l’histoire.

Nous, Tunisiens, nous avons fait la révolution et continuons à la défendre tous les jours dans la rue; l’Irak a libéré ses territoires; la Syrie, en dépit des missiles de la honte qui l’ont frappée hier, a fêté aujourd’hui la libération de la Ghouta Orientale et les Gazaouis ont promis de revenir la semaine prochaine…

* Universitaire franco-tunisien.

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