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Fathi Layouni, l’ex-lèche-bottes de Ben Ali au service d’Ennahdha

Elu récemment maire du Kram, ville de la banlieue nord de Tunis, où il veut faire régner la charia (loi islamique), Me Fathi Layouni cherche à plaire à ses nouveaux maîtres d’Ennahdha. Mais il ne peut faire oublier son passé au service du dictateur Ben Ali.

Par Imed Bahri

En effet, tous les collègues avocats de Me Layouni savent qu’il était membre du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), l’ancien parti au pouvoir sous la dictature de Ben Ali, depuis 1991. Et sa proximité avec l’ancien régime a laissé de nombreuses traces, notamment le livre en arabe qu’il avait publié en 1997 (une reprise de son mémoire de fin d’étude) sur ‘‘Les crimes financiers dans la législation tunisienne et les législations comparées’’.

Un passé peu glorieux de lèche-bottes de Ben Ali

Sous ce titre trompeur d’une recherche universitaire se cache un ouvrage de propagande politique réalisé à l’instigation d’Abdelaziz Ben Dhia, l’ancien conseiller politique de Ben Ali. Dans sa préface au livre, Salah Bouras, alors président de la cour d’appel de Tunis, présente ce dernier comme le sauveur de la Tunisie, l’architecte du changement historique et le grand ennemi des corrompus, conformément à la logorrhée dominante à l’époque dans la presse officielle.

Une phrase extraite de ce livre en dit long sur l’opportunisme politique de Me Layouni, qui cire les chaussures du dictateur en espérant bénéficier de ses coups de pouce salutaires. «La Tunisie, après le changement historique du 7 novembre 1987, a commencé une politique d’ouverture et de libéralisation consistant en plusieurs lois qui encouragent l’investissement pour renforcer l’économie nationale… Après ces multiples réformes, son Excellence le Président Zine Al-Abidine Ben Ali a annoncé, le 27 décembre 1992, la libéralisation du dinar tunisien, une mesure qui a eu un impact considérable sur la prospérité économique de la Tunisie…», écrit-il notamment.

L’actuel maire du Kram, qui s’était brusquement transformé, au lendemain de la chute de Ben Ali, en janvier 2011, en grand révolutionnaire devant l’Eternel, s’affichant avec les voyous de La ligue de protection de la révolution (LPR), milices violentes au service du parti islamiste Ennahdha dissoutes par décision de justice en 2014, et chantant les louanges du cheikh Rached Ghannouchi, veut aujourd’hui faire oublier ce passé peu glorieux de lèche-bottes de Ben Ali et de propagandiste du RCD.

Le maire zélé agace ses nouveaux maîtres islamistes

Cependant, en faisant de la surenchère islamiste et en provoquant des polémiques, notamment en donnant des instructions pour les chargés de l’état civil dans sa mairie de ne pas sceller le mariage des musulmanes avec des non-musulmans, si ces derniers ne fournissent pas un certificat de conversion à l’islam délivré par Dar Al-Ifta – et ce conformément à la circulaire n° 216 de novembre 2013, qui a pourtant été abrogée par un décret datant du 14 septembre 2017 –, Me Layouni n’énerve pas seulement les démocrates progressistes, soucieux de préserver les libertés individuelles et de renforcer l’égalité entre l’homme et la femme, il agace aussi (et comment ?) ses nouveaux maîtres islamistes.

Les dirigeants d’Ennahdha, excédés par le zèle de ce tartuffe, un mélange de faux dévot, de girouette politique et d’opportuniste sans scrupules, n’ont d’ailleurs pas tardé à le lui signifier en rendant public un communiqué où ils déplorent ses déclarations et précisent que la Tunisie est un Etat civil soumis à des lois qu’il faut respecter.

Le parti islamiste ne s’est pas arrêté là : il a aussi déploré les déclarations du maire du Kram hostiles au président de la république Béji Caïd Essebsi, auquel il reproche d’avoir mis en place la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe) ayant appelé à l’instauration de l’égalité successorale entre l’homme et la femme et rappelé le droit de la musulmane à se marier avec un non-musulman, droit jusque-là accordé aux hommes et non au femmes, ce qui est en contradiction flagrante avec le texte de la constitution stipulant l’égalité entre les deux sexes.

Par ses excès, Me Layouni, en véritable agité du bocal, cherche à incarner ce proverbe bien de chez nous : «El-azri aqoua min sidou» (Le larbin en fait plus que son maître).

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