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Révélations de l’enquête tunisienne sur l’assassinat de Mohamed Zouari

De nouveaux éléments ont été présentés aujourd’hui, mardi 11 décembre 2018, sur l’assassinat, en décembre 2016, à Sfax, de Mohamed Zouari, ingénieur en génie mécanique, ancien membre du Hamas, l’organisation islamiste palestinienne.

Par Yüsra Nemlaghi

Deux ans presque jour pour jour se sont écoulés depuis cet assassinat perpétré le 15 décembre 2016 à Sfax et attribué au Mossad, le service de renseignement israélien. A cette occasion, le ministère de l’Intérieur a organisé, cet après-midi, une conférence de presse, à son siège à Tunis, pour présenter l’état d’avancement de l’enquête menée par ses services en Tunisie.

Les commanditaires ont commencé, depuis 2015, à planifier cet assassinat. Des rencontres ont été organisées, à cet effet, dans des pays de l’Europe de l’Est, en Italie et à New York.

Selon les limiers de la Direction générale des crimes terroristes, Mohamed Zouari s’était fait offrir, en Turquie, un téléphone. Cadeau empoisonné puisque l’appareil était piégé et permettait de le pister.

Le 8 décembre 2016, les assassins présumés, de nationalité bosniaque, sont entrés en Tunisie, via le port de la Goulette, avant de se rendre à Monastir où ils ont rencontré un Tunisien répondant au nom d’Abdelkader auquel ils ont fait croire qu’ils voulaient visiter des usines dans le but de mettre sur pied des projets dans la région. Ce dernier, comme d’ailleurs tous les Tunisiens cités dans l’enquête, n’a jamais été mis au courant du projet d’assassinat.

 Les kataeb Al Qassam rendant hommage à Zouari.

Le 13 décembre, une certaine Maha Ben Hammouda a été chargée par le dénommé Slim Bouzid de lui louer deux voitures qu’elle devait laisser près d’un café à Sfax. La dame, qui ignorait tout du plan diabolique, a elle-même été menacée de meurtre et c’est la police tunisienne qui l’a contactée alors qu’elle se trouvait à l’étranger pour lui demander de rentrer immédiatement en Tunisie, car elle risquait de se faire éliminer.

Les deux voitures ont été utilisées par les assassins, et le meurtre a été commis depuis une voiture de marque Mitsubishi avec des portes coulissantes. Les tueurs se sont ensuite rendus à Agareb, comme de parfaits touristes désireux de s’approvisionner en huile d’olive pure. Ils ont aussi réservé une chambre d’hôtel à Kairouan jusqu’au 16 décembre 2016. Ils ont cependant quitté la Tunisie, le soir même du crime, via le port de la Goulette, vers 23 heures.

Selon les éléments de l’enquête, ils ont dépensé 170.000 dinars tunisiens (DT) durant leur séjour de 7 jours en Tunisie. Cet argent a été utilisé pour payer les intermédiaires tunisiens, qui n’ont jamais été mis au parfum: ils pensaient travailler pour le compte d’une société étrangère, comme on le leur avait fait croire.

En ce qui concerne les deux armes du crimes, elles auraient été introduites par les tueurs dans leurs bagages, mais les enquêteurs n’ont aucune certitude à ce sujet.

Alen Camdzic et Elvir Sarac sont les assassins présumés mais leur pays, la Bosnie, a refusé leur extradition en Tunisie. Ils sont néanmoins poursuivis par la justice bosniaque, d’autant que la Tunisie a motivé 7 enquêtes judiciaires internationales à leur encontre et les soupçonne d’avoir «organisé et commis des actes terroristes, d’être membres d’une organisation terroriste et d’avoir porté atteinte à l’ordre public et à la sécurité internationale».

Deux ans après l’assassinat, le ministère tunisien de l’Intérieur fait le point.

Les assassins sont d’un très grand professionnalisme : tout au long de l’exécution de leur plan, ils ont réussi à brouiller les pistes et à manipuler des intervenants locaux qui ne se connaissaient pas les uns les autres.

Notons que Sofiene Selliti, porte-parole du Pôle judiciaire antiterroriste, a indiqué ne pas pouvoir confirmer l’existence de lien entre les assassins et le Mossad car les suspects n’ont pas été entendus en Tunisie. Cette thèse d’assassinat perpétré par les services israéliens a cependant été évoqué par les Kataeb Izz Al-Din Al-Qassam, branche armée du Hamas dont le Tunisien était membre. Il contribuait à leur programme de fabrication de drones armés.

Le professionnalisme et la méthode avec lesquels Zouari a été tué ressemblent bien à ceux du Mossad, qui a commis plusieurs assassinats à l’étranger, et notamment en Europe, et ne revendique jamais ses assassinats. C’est le Mossad qui a assassiné Abou Jihad, à Sidi Bou Saïd, au nord de Tunis, le 6 avril 1982, dans des circonstances similaires.  Et Abou Iyad (Salah Khalaf), le 14 janvier 1991, à Carthage, avec deux autres dirigeants palestiniens : Abou Mohamed (Fari Al-Oumari) et Aboul Hol ‘Hayel Abdul Hamid).

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