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La protection des données individuelles est en retard en Tunisie, déclare Wafa Ben-Hassine de Access Now

Le journal français « Le Monde » a publié, le 14 juin 2019, une interview de Wafa Ben-Hassine, de l’Ong de défense des droits humains «Access Now», sur la situation du pays en matière de protection des libertés numériques, jugée très en retard.

C’est en marge de RightsCon 2019, un rendez-vous international consacré essentiellement aux libertés sur internet, et à l’impact social des technologies, qui vient de se se terminer à Tunis le 14 juin, que Wafa Ben Hassine a livré ses déclarations au journal « Le Monde ».

A cette occasion, Wafa Ben-Hassine, directrice du bureau Moyen-Orient et Afrique du Nord pour l’organisation non gouvernementale (Ong) Access Now, déclare, que «beaucoup de regards sont braqués sur la Tunisie, qui reste un modèle de transition démocratique pour la région. Nous sommes donc dans une situation où « ça passe ou ça casse »».

L’activiste tunisienne enchaîne : «C’est la première fois que nous faisons cet événement dans un pays arabe, et c’est aussi pour montrer que nous sommes très vigilants aux acquis en matière de droits humains en Tunisie. Le RightsCon est un peu un rappel de ce pour quoi nous nous sommes battus, lors de la révolution de 2011. Pour moi, le plus important reste cette société civile, qui a contribué à préserver la Tunisie de certaines dérives autoritaires, qui ont touché le reste des pays touchés par le « Printemps arabe ». L’autre objectif de cet événement est de rappeler à quel point la Tunisie doit s’intégrer dans le monde moderne, pour contrer la corruption et les atteintes à la vie démocratique».

A la question sur l’état des lieux des libertés sur Internet, 8 ans après la révolution tunisienne, Wafa répond: «Nous n’avons plus de censure, et chacun peut accéder à ce qu’il souhaite sur internet. En 2012, il y a eu une tentative en justice d’interdire les sites pornographiques, et cela n’a pas marché. C’était un moment où l’on a tenté de défier l’ATI, Agence tunisienne d’Internet, car tous les contenus étaient libres. Mais le fait que ce soit un échec, montre bien les avancées, en matière de libertés digitales.»

A propos de l’arrestation arbitraire de blogueurs ou de personnes ayant une certaine audience sur Facebook en début d’année, Wafa répond que «c’est une vraie menace, il faut absolument rester vigilant, car la Tunisie est encore un pays où des abus sont commis. Mais au moins nous pouvons en parler….».

Quant à la question sur le niveau de protection des données personnelles à la veille des élections, Wafa estime : «Nous sommes très en retard, mais il y a une vigilance de la société civile. Par exemple, en 2016, le ministère de l’intérieur tunisien a proposé un projet de loi sur la carte d’identité biométrique. Le texte a été retiré deux ans après, ce qui a été une victoire pour nous. … il faut les infrastructures derrière pour assurer la protection des données. Nous ne pouvons pas passer subitement à de nouvelles technologies, sans avoir fait d’étude d’impact ni de recherches préalables, sur leurs avantages et leurs inconvénients…».

Quant à la remarque sur la réticence des Tunisiens à payer en ligne, pour Wafa, «il faut un changement culturel. Certaines administrations continuent à demander l’envoi d’un fax, pour faire une demande au lieu d’un courriel. Mais pour d’autres aspects de la vie quotidienne, comme payer sa facture d’eau ou d’électricité en ligne, les derniers chiffres montent qu’il y a une augmentation de la pratique, donc nous avançons…».

Quant à la loi votée en 2017 pour protéger les lanceurs d’alerte qui dénoncent la corruption, Wafa trouve qu’elle est «l’une des meilleures au monde. Après, c’est vrai qu’il reste du travail sur sa mise en pratique. C’est un peu comme le décret-loi sur l’accès à l’information qui a été voté en 2011…».

A. M.



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