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Quand érigerons-nous la passion des Tunisiens pour le sport en une industrie rentable ?

Supporteurs tunisiens à la Coupe du monde de football en Russie.

L’engouement des Tunisiens pour la récente Coupe d’Afrique des nations (CAN 2019) prouve, s’il en est encore besoin, la place qu’occupe le football et le sport en général dans notre pays. Pourquoi alors ne pas ériger cette passion en véritable industrie génératrice d’emplois, de devises et de recettes fiscales pour l’Etat ?

Par Khémaies Krimi

À titre d’exemple, dans un pays comme la France, cette industrie emploie environ 1,7 million de personnes, dont 1,4 million de façon permanente. Et c’est le cas dans beaucoup d’autres pays où le sport est une ressource économique importante.

Relancer le sport en Tunisie sur de nouvelles bases

Malheureusement, un regard d’ensemble sur l’économie du sport dans notre pays montre que les ministres qui se sont relayés à la tête du département de tutelle, depuis l’accès du pays à l’indépendance, en 1956, n’ont jamais pensé à en faire une véritable industrie. Le sport est, à leurs yeux, davantage une dépense qu’une source de revenus. Aussi, les Tunisiens n’ont-ils pas su tirer profit de l’industrie sportive qui contribue à hauteur de 10-20% du PIB de certains pays développés.

Pis, par l’effet de l’inculture et de l’illettrisme, qui frappent près de 4 millions de Tunisiens sur une population totale de 12 millions, le sport a tendance, chez nous, faute d’encadrement et surtout d’imagination, à dégénérer en violence urbaine, clanique et régionaliste.

C’est que les sports collectifs et individuels ont été confiés, jusque-là, dans notre pays, à des amateurs velléitaires, des pseudo-professionnels et des chauvinistes nuisibles. Or, ce secteur a besoin, aujourd’hui, de vrais professionnels et d’économistes chevronnés, capables d’en assurer une meilleure exploitation.

Le retour d’investissement est garanti

La performance sportive de haut niveau a certes un prix, car elle suppose de lourds investissements, consentis, au départ, par les pouvoirs publics et les sponsors, mais elle constitue, en même temps, un créneau rentable parce que le retour sur investissement est assuré, les spectacles étant payants et sollicités par les annonceurs publicitaires, sans parler des recettes du merchandising.

Par ailleurs, les droits de retransmission télévisée des joutes sportives connaissent, de nos jours, une véritable inflation. Ce qui fait le bonheur des chaînes de télévision dont la capacité financière s’est beaucoup renforcée, et qui réalisent d’importantes recettes publicitaires pendant la retransmission des grands événements sportifs.

Autre impact économique: la pratique du sport en tant que loisir, en expansion depuis les années soixante-dix, entraîne la consommation de vêtements et d’articles de sport, de services, commerciaux, sanitaire, d’enseignement, d’animation ou autres.

Dans ce même contexte de rentabilité, l’industrie des paris sportifs, qui a connu une véritable explosion au cours de la dernière décennie, aide elle aussi à financer le sport.

Les Tunisiens, férus des jeux de hasard en général et des paris sportifs en particulier, offrent une clientèle importante pour ces activités rémunératrices. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux s’adonnent aux paris parallèles, dans des sortes de clubs opérant illégalement dans certains cafés ou salons de thé, qui plus est, en infraction du code de change.

Aussi cette activité doit-elle être réorganisée par la loi et ses ressources canalisées pour être réinvesties dans l’amélioration des installations sportives et le financement des clubs.

Les pré-requis…

La seule condition à exiger de tout futur promoteur dans cette industrie est d’aider à aménager et à réaménager les stades de façon à ce qu’ils soient rentables et ne coûtent plus beaucoup d’argent au contribuable, comme c’est le cas actuellement.

Il est inadmissible que les entreprises publiques (Compagnie de phosphate de Gafsa, Stir, Transtu, SNCFT…) continuent de subventionner à fond perdu les associations sportives.

Celles-ci, fonctionnant encore sous le statut d’associations, peuvent être transformées en entreprises à part entière et s’autofinancer par le sponsoring, le merchandising et l’exploitation des installations sportives à plusieurs fins (joutes sportives, meetings, spectacles culturels…).

Il faudrait, pour cela, que chaque club sportif dispose, dès à présent, d’une feuille de route, voire d’un business plan pour son développement sur les court, moyen et long termes.

Est-il besoin de rappeler ici, qu’à défaut de vision long-termiste et de ressources renouvelables, la plupart des associations sportives tunisiennes continueront de tirer le diable par la queue et de se débattre dans de graves difficultés financières.

Selon des statistiques officielles, les fonds mis à la disposition des clubs sportifs ne couvrent que 40% de leurs besoins. C’est ce qui explique, entre autres, que les joueurs, dans la plupart des clubs, ne soient pas payés de manière régulière et qu’ils soient parfois amenés à faire grève pour exiger le paiement de leurs salaires.

Cela pour dire in fine que le poids économique du sport de haut niveau est en nette progression dans tous les pays du monde. Et la Tunisie ne peut plus rester à la traîne. Elle doit s’y mettre dès maintenant, même si elle doit s’endetter pour mettre en œuvre une nouvelle politique dans ce domaine. La cause est juste dans la mesure où elle peut rapporter beaucoup à l’économie du pays et au bonheur des Tunisiens, férus de spectacles, de compétitions, de performances et de titres internationaux.

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