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Festival de Hammamet : ‘‘Les Années folles’’ ou la nostalgie d’une autre époque

La comédie musicale ‘‘Les années folles’’ écrite par Sofiane Ben Farhat et mise en scène par Mourad Gharsalli a été présentée le soir du mardi 7 août 2019 dans le cadre du Festival international de Hammamet : un hommage à la belle époque des années 20 à Halfaouine, bourg populaire à Tunis, ses divas et ses cafés chantants.

Par Fawz Ben Ali

On l’a connu comme journaliste et écrivain, Sofiane Ben Farhat nous a récemment surpris avec une comédie musicale dont la première avait eu lieu au mois du ramadan à la Cité de la culture avant de faire partie de la programmation de la 55e édition du Festival international de Hammamet.

Le noyau d’un boom culturel

‘‘Les années folles » ou ‘‘Asker ellil’’ (Les soldats de la nuit) pour le titre arabe est «la première comédie musicale tunisienne», a souligné Sofiane Ben Farhat en présentant son spectacle au public de Hamammet.

En fait, et pour rendre à César ce qui appartient à César, ‘‘Asker ellil’’ est le titre d’une opérette écrite par Hamadi Abassi, et mise en musique par le maestro Mohamed Garfi, qui a été présentée au Théâtre municipal de Tunis, au milieu des années 1980. L’opérette a fait l’objet d’un beau livre intitulé ‘‘Tunis chante et danse’’, écrit par le même Hamadi Abassi, richement illustré et publié par Alif, les éditions de la Méditerranée, à l’initiative de Viviane et Mohamed Salah Bettaieb. Le sujet n’est donc pas nouveau ni inédit. On peut donc parler, dans le cas de ce travail de Ben Farhat et Gharsalli, d’un remake, comme on dit dans le cinéma.

Il y a eu les années folles en France et les «Roaring twenties» aux Etats-Unis, une période d’effervescence culturelle et artistique qui avait eu lieu après la première guerre mondiale et avant la grande dépression. La Tunisie a connu aussi ses années folles qui, toutes proportions gardées, se sont manifestées aux quartiers populaires de Halfaouine et Bab Souika, au cœur de la Médina de Tunis, devenus alors le noyau d’un boom culturel où se réunissaient poètes, écrivains, conteurs, paroliers, musiciens et chanteurs pour des nuits blanches fêtardes.

Nostalgique de son enfance, Sofiane Ben Farhat a souhaité, à travers ce projet, rendre hommage à son quartier natal, Halfaouine, mais aussi et surtout à quatre divas qui ont marqué l’histoire de la musique tunisienne, à savoir Habiba Msika, Fathia Khairi, Chafia Rochdi et Hassiba Rochdi, interprétées par quatre jeunes chanteuses : Naoures Zammit, Mahr Hammami, Mongia Sfaxi et Sameh Landoulsi, qui étaient accompagnées de grands comédiens comme Fathi Mselmani, Taoufik Bahri, Khaled Houissa … dans les rôles d’Ali Douagi, Mustapha Khraief, Abdelaziz El Aroui…

Malgré la pluie, qui avait surpris tout le monde au milieu du spectacle, les techniciens et artistes ont tenu bon pour ne pas interrompre la comédie musicale qui avait duré plus de deux heures, alternant entre jeu théâtral, conte, danse et chant (play-back et live).

Les divas de la chanson tunisienne

Une vingtaine de minutes a été accordée à chacune des chanteuses pour retracer les grands moments de sa carrière, à commencer par la légendaire Habiba Msika dont le destin a basculé de la gloire à la tragédie d’une mort atroce, brûlée vive par son ancien amant alors qu’elle n’avait que 27 ans.
Le spectacle revient aussi sur le parcours de Chafia Rochdi que ses contemporains appelaient «Nana» et qui fut la première femme à conduire une voiture en Tunisie mais également la seule femme ayant participé à la création de la Rachidia dans les années 20.

On a également revit les moments forts de la carrière de la chanteuse et actrice Fathia Khairi qui chantait entre autres ‘‘Zaama ysafi edahr’’ et qui avait connu ses premiers succès plus tardivement dans les années 40. Sans oublier l’illustre Hassiba Rochdi, première tunisienne à avoir décroché un rôle principal dans des films égyptiens.

La comédie musicale ‘‘Les années folles’’ nous rappelle l’audace sans précédent de ces femmes d’exception qui avaient marqué l’histoire de la Tunisie et bravé les tabous et la répression d’une société encore très marquée par le patriarcat.

Mettre au point ce projet artistique a dû nécessiter un travail de recherche de longue haleine dans les biographies, les archives et les journaux d’époque, mais le spectacle a par moment ressemblé à un fourre-tout; certains tableaux étaient surchargés et ont duré une éternité et les histoires partaient souvent dans tous les sens.

Certes, les jeunes chanteuses invitées pour jouer les rôles des divas avaient de belles voix, mais l’interprétation des personnages manquait terriblement de justesse. Un projet ambitieux à parfaire en allant à l’essentiel loin du superflu et du bavardage, qui sont les défauts majeurs de Sofiane Ben Farhat, dont les qualités sont son immense connaissance de l’histoire des hommes et des femmes qui ont marqué la mémoire collective des Tunisiens.

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