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Législatives 2019: Ennahdha joue son franc jeu… opportuniste

Au vu des résultats du 1e tour de la présidentielle du 15 septembre et la défaite de son candidat, Ennahdha vient d’apporter une rectification de taille à sa stratégie électorale, pour les législatives du 6 octobre: le parti islamiste enterre définitivement son obsession du «consensus» et cherche désormais des partenaires parmi «les forces de la révolution.»

Par Marwan Chahla

Lors d’une rencontre avec les médias avant-hier, vendredi 27 septembre 2019, portant sur le thème des possibles alliances ou autres ententes probables que le mouvement islamiste pourrait nouer au lendemain du scrutin législatif du 6 octobre, le chef islamiste Rached Ghannouchi a déclaré qu’«Ennahdha est en mesure, mieux qu’aucune autre formation politique, de gouverner et de diriger les affaires du pays tout seul ou, peut-être, établira-t-il un partenariat avec les forces de la révolution.»

La crainte d’une nouvelle débâcle aux législatives

En réalité, cette assurance affichée du gourou de Montplaisir, voire une certaine arrogance, cache mal une peur bleue que l’échec cuisant d’Abdelafattah Mourou, son candidat au premier tour de la présidentielle anticipée du 15 septembre ne débouche sur une autre débâcle encore plus sévère aux législatives du 6 octobre.

Les dirigeants nahdhaouis ont retenu la leçon la plus importante du premier tour de la présidentielle: plus du tiers des électeurs – les 18,4% de Kaïs Saïed et le 15,58% de Nabil Karoui, sans compter les scores de Safi Saïd, Seifeddine Makhlouf et autres Lotfi Mraïhi – ont rejeté les partis de l’establishment politique pour tenter une nouvelle expérience et avec de nouvelles figures.

Cette vague dégagiste a tout balayé sur son passage. Et, pour les stratèges du parti islamiste, la manière la plus sûre de sauver ce qu’il reste de leur mise politique a donc été de s’arrimer à la fusée Kaïs Saïed et aux «forces de la révolution» qui lui ont permis d’accéder au second tour de la présidentielle. Ainsi, très vite, dès que les résultats du premier tour de la présidentielle ont été annoncées, Ennahdha s’est empressé d’appeler ses troupes à donner leur appui au «candidat indépendant.»

Kaïs Saïed aura-t-il besoin d’Ennahdha ?

Avant-hier, donc, Rached Ghannouchi a ajouté une autre couche à l’opportunisme d’Ennahdha, non seulement en rejetant toute possibilité d’alliance avec Qalb Tounes, le parti de Nabil Karoui, parce que ce dernier est poursuivi par la justice pour corruption financière et blanchiment d’argent, mais également en expliquant que si Kaïs Saïed, candidat indépendant – c’est-à-dire sans formation politique siégeant à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) –, entend mettre en œuvre ses idées, il va devoir composer avec les islamistes d’Ennahdha et leur poids parlementaire.

Ce donnant-donnant offert à M. Saïed – même s’il n’est pas nécessairement identique à ce qu’Ennahdha a proposé au Congrès pour la république (CPR) de Moncef Marzouki et Ettakatol de Mustapha Ben Jaafar, en 2011, et à Nidaa Tounes de Béji Caïd Essebsi, en 2014– ressemble bien à ces tours de magie dont le gourou de Montplaisir maîtrise l’art à la perfection.

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