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Donald Blome, un Américain qui comprend la Tunisie

Donald Blome reçu le 14 octobre par le président Saied.

S’il y a une personne qui a su préserver jusque-là les relations tuniso-américaines en dépit de toutes les tentatives de les parasiter, si la position d’exécutif américain (l’administration Biden) demeure pondérée et mesurée malgré tout le lobbying agressif des Frères Musulmans qui n’ont pas cessé de la manipuler pour qu’elle considère les décisions salvatrices du 25 juillet comme un coup d’État et si la position de l’administration demeure tempérée par rapport au Congrès (pouvoir législatif) ce n’est sûrement pas grâce à la diplomatie tunisienne et à l’ambassade de Tunisie à Washington aux abonnées absents depuis le 25 juillet malgré nos appels incessants pour qu’ils réagissent mais grâce à Donald Blome, ambassadeur des États-Unis en Tunisie, dont les rapports à ses supérieurs ont du sûrement peser dans la balance.

Par Chedly Mamoghli *

Celui qui est la courroie de transmission entre Tunis et Washington et qui rapporte tout ce qui se passe ici pour que l’exécutif de son pays forge ses positions officielles est jusque-là parvenu à préserver nos relations bilatérales et encore mieux, il veille à la solidité du partenariat militaire, économique et financier pour qu’il ne soit pas mis à mal par les vicissitudes politiques. Toutefois, ceci ne l’empêche pas d’avoir un langage de vérité avec les autorités tunisiennes sur la nécessité d’engager les réformes économiques vitales.

Dans une déclaration à Mosaïque ce jeudi 21 octobre 2021, M. Blome a déclaré en réponse à une question concernant les interventions américaines en faveur de la Tunisie auprès des institutions financières internationales, surtout suite aux récentes classifications économiques (notations souveraines), que son pays continue de soutenir la l’économie tunisienne mais il y a une responsabilité qui incombe au gouvernement de Najla Bouden qui doit aller de l’avant dans la mise en œuvre du programme des réformes qui a trop tardé et de prendre la décision de sauver la situation économique, même si la décision est difficile.

L’aide militaire a été l’un des plus importants axes de la coopération bilatérale sous le mandat de Blome à Tunis.

Accusations fallacieuses, bêtes et méchantes

Il est donc nécessaire de rappeler le rôle-clé de quelqu’un qui n’œuvre pas contre les intérêts de notre pays à l’heure même où de prétendus Tunisiens parmi les islamistes, les crypto-islamistes et la cinquième colonne des pseudo-démocrates œuvrent à saboter les relations tuniso-américaines ainsi qu’avec nos autres partenaires étatiques et institutionnels. Il est également regrettable de voir cet homme diffamé sur Facebook et accusé injustement de «magouiller avec Ghannouchi pour plonger le pays dans le chaos», que «c’est pour cela que Kaïs Saïed l’a reçu l’autre jour et que c’est suite à cela qu’il sera transféré au Pakistan».

D’abord ces accusations fallacieuses sont bêtes, méchantes et relèvent d’une grande ignorance car si elles étaient vraies, il aurait été déclaré immédiatement persona non grata. C’est un diplomate et non un voyou pour agir de la sorte. Ensuite, quelle ingratitude de l’accuser à tort du contraire même de ce à quoi il œuvre depuis le 25 juillet contre vents et marées.

Enfin, au début de l’année prochaine, il terminera son mandat de 3 ans à Tunis. Et même s’il ne l’a pas terminé et qu’il ait été transféré au Pakistan, c’est une promotion qui montre que c’est un diplomate chevronné car le Pakistan est un pays stratégique par excellence surtout pour Washington, qui plus est, avec les Talibans aujourd’hui au pouvoir en Afghanistan. Rappelons également qu’il vient tout juste d’être nommé à ce nouveau poste ce qui signifie que cela doit être validé par le Congrès puis le pays d’accréditation doit accepter son agrément par conséquent, il reste encore à Tunis pour un bon bout de temps.

Donald Blome avec son épouse dans un café du centre-ville de Tunis, en juillet 2019, peu de temps après sa prise de poste à Tunis. On avait peu vu auparavant des diplomates américains dans les rues des villes tunisiennes.

Maintenir un partenariat solide avec les États-Unis

Il est nécessaire de rappeler que le président Saïed a reçu M. Blome et non convoqué (une convocation a lieu aux Affaires étrangères et par le secrétaire général ou un directeur général) et ceci pour lui faire part de sa déception de l’audition consacrée à l’examen de la situation en Tunisie au Congrès et ça n’avait rien d’anti-américain et rien contre la personne de l’ambassadeur.

Rappelons aussi que si on avait une ambassadrice comme Anne Paterson (grande amie des Frères Musulmans qui les a solidement soutenus quand elle était en poste au Caire) ou bien Gordon Gray (ancien ambassadeur américain à Tunis grand ami d’Ennahdha et de Radwan Masmoudi qui relaye aujourd’hui la propagande islamiste à Washington), vous auriez vu comment les relations avec Washington n’auraient pas été préservées comme elles le sont avec Donald Blome. 

Il faut comprendre que nos appels à la non-ingérence, au respect de notre souveraineté et au refus catégorique de toute menace n’ont rien d’anti-américain. Au contraire, nous tenons à une relation amicale et à un partenariat solide avec les États-Unis mais qu’ils se comportent en amis car on ne menace pas ses amis comme le font certains membres du Congrès manipulés par les Frères Musulmans déguisés en associations représentatives des musulmans aux États-Unis ou en associations défendant les droits humains.

Donald Blome a souvent partagé les joies des Tunisiens et assisté à leurs festivités.

Diversifier les alliances dans un monde multipolaire

Également, notre appel à diversifier nos alliances et nos relations est nécessaire et vital dans un monde multipolaire même si les relations avec Washington étaient historiques et exceptionnelles. Avoir de meilleures relations avec la Fédération de Russie et la Chine ne veut en rien compromettre nos relations avec Washington. C’est la configuration géopolitique actuelle qui l’exige.

Sur un autre plan, les Américains doivent comprendre qu’entre 2011 et 2021 il n’y avait pas de démocratie en Tunisie contrairement au récit romantique erroné et très répandu mais que le pays était pris en otage par un système de corruption comprenant des partis politiques, des affairistes, des syndicalistes véreux et des relais dans les médias et qu’ils se sont servis et n’ont pas servi la Tunisie. Ces derniers ont bloqué l’instruction des dossiers de corruption.

Les Américains doivent comprendre qu’il ne peut pas y avoir une démocratie dans un contexte de corruption généralisée.

Les Américains doivent comprendre que pour soutenir la démocratie, ils doivent soutenir la lutte contre la corruption.

Les Américains doivent comprendre que ceux parmi les protagonistes de la décennie noire 2011-2021 qui vient de s’écouler et qui hurlent aujourd’hui avec beaucoup de mauvaise foi à la démocratie en danger qu’ils ont en réalité peur pour leurs privilèges et surtout qu’ils ont peur de rendre des comptes.

Les Américains doivent comprendre que la situation était explosive et que si Kaïs Saïed n’avait pas réagi le 25 juillet, ça aurait été le chaos.

Les Américains doivent enfin comprendre que les islamistes n’incarnent pas l’islam et qu’ils les manipulent pour avoir leur soutien afin de se maintenir au pouvoir. 

J’espère en conclusion que Kaïs Saïed recevera Donald Blome et le décorera avant son départ pour Islamabad. Sachons gagner des amitiés et les préserver parmi les diplomates qui ont œuvré aux bonnes relations avec la Tunisie même après leur départ et souhaitons à M. Blome tout le succès dans l’accomplissement de sa future mission au Pakistan. 

* Juriste.

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