Les industries agroalimentaires en Tunisie ont un grand potentiel dans les domaines de l’emploi et de l’exportation. Leurs performances restent cependant en-deçà des espoirs. Quelques pistes pour les relancer…

Par Maya L.

Malgré une évolution globalement positive, les industries agroalimentaires nationales restent très dépendantes des aléas climatiques pour la majorité des cultures pluviales et, à l’extérieur, des fluctuations du marché mondial.

Le dernier rapport du Centre de commerce international (International Trade Center, Itc) concernant le panorama de l’emploi en Tunisie indique que le secteur de l’agriculture et de la pêche emploie un total de 520.000 personnes, soit 16% de la population totale active en 2012. Il est difficile d’avoir des données sur les emplois indépendamment de la pêche.

Un potentiel d’emploi et d’exportation mal exploité

L’agriculture compte 3 types d’exploitation, dont les exploitations salariales qui comptent sur des agriculteurs saisonniers ou permanents travaillant pour un exploitant agricole ou des exploitations familiales où la terre agricole appartient aux travailleurs ou familles de l’exploitant.

L’industrie agroalimentaire enregistre près de 72.000 emplois et est le troisième secteur manufacturier pourvoyeur d’emploi. 82% de ces emplois se concentrent dans des Pme à capital 100% tunisien dont l’activité est principalement destinée pour le marché local.

Les entreprises totalement exportatrices sont estimées à 14% de l’industrie totale. 92% d’entre-elles sont à capitaux 100% étrangers. Malgré un vrai potentiel de développement vers l’international, plusieurs entrepreneurs peinent à faire le premier pas. Pour cause, de nombreux défis dont l’adaptation du produit aux standards et normes internationaux et l’accès aux marchés. Les entreprises qui adhèrent aux programmes d’appui critiquent le manque de suivi pour la concrétisation des marchés et contrats. De plus, plusieurs Pme ne maîtrisent pas les règles d’exportation, en matière de gestion des stocks, des contacts clients, et en stratégie commerciale et de communication.

Deux filières porteuses: les produits «halal» et de terroir

Les industries agroalimentaires (Iaa) font l’objet d’une politique de modernisation impulsée par le gouvernement.

La politique économique tunisienne encourage l’intégration du pays dans le marché international et la diversification des marchés. Le nombre le plus élevé d’entreprises totalement exportatrices s’enregistre dans l’entreposage de produits frigorifiques et l’industrie des produits de la mer. L’industrie des fruits et légumes et les autres Iaa sont également propices à l’exportation.

L'oléoculture représente 42% de la valeur des exportations tunisiennes.

La situation actuelle recèle des marges de progrès, notamment dans certaines filières. Suite à une analyse des potentiels de marchés réalisés par l’Itc, l’agriculture biologique et les produits «halal» présentent un bon potentiel de développement du secteur.

Tenant compte des perspectives de développement des marchés et la nature même de la production tunisienne, quant à une utilisation minimale de pesticides, le savoir-faire agricole des régions, la familiarisation avec les concepts «halal», et la diversification des produits agricoles du terroir, il est à noter que tout ceci permet à l’industrie de répondre au potentiel de développement des filières bien spécifiques et à grande valeur ajoutée. Le marché «halal» à lui seul est estimé à 2,3 trillions de dollars de chiffre d’affaires.

L’intégration limitée de la filière oléicole

Par ailleurs, la filière oléicole représente 20% de l’emploi du secteur agricole auquel s’ajoute la transformation industrielle. Pour cause, la domination des exportations de l’huile d’olive, produit emblématique qui représente plus de 42% de la valeur des exportations totales.

Les structures de production, en majorité privées, de petite taille et de type familial représentent près de 29% de l’effectif total des exportations agricoles.

La production de l’olivier intervient également dans d’autres secteurs indissociables, tels que le cosmétique, la savonnerie, l’artisanat avec les bois d’olivier.

Cette tendance participe également à la création de l’emploi régional et la promotion du savoir-faire tunisien. Malgré ce potentiel, l’intégration de la filière oléicole dans d’autres secteurs reste très limitée.

Du point de vue des exportations, l’exploitation des produits oléicoles, malgré l’irrégularité de la production représente 42% de la valeur des exportations totales, suivie par les produits de la mer et les dattes avec respectivement 17% et 11% de la valeur des exportations.

A ces trois produits classiques qui représentent environ 70% du total, s’ajoutent d’autres exportations, moins importantes certes, mais connaissant une certaine régularité. Il s’agit des dérivés des céréales (pâtes et biscuits), les conserves de fruits et légumes avec notamment les conserves de tomates.

Concernant les destinations, l’Union européenne (UE) représente le client le plus important, notamment l’Italie qui attire en moyenne 50% des exportations (principalement l’huile d’olive en vrac). Les exportations vers la Libye sont très irrégulières et passent par des canaux de contrebande, mais peuvent représenter jusqu’à 10%.

Les industries agroalimentaires connaissent ainsi en Tunisie une évolution globalement favorable, malgré la crise économique et la contraction de la demande mondiale en matière d’agro-industrie, avec des performances différenciées selon les produits, assez irrégulières dans le temps, tout en restant fortement dépendantes de leur approvisionnement agricole, lui-même encore sous l’influence des aléas climatiques pour la majorité des cultures pluviales.