On a longtemps considéré que l’ouverture économique favorise la création d’emplois et l’amélioration des revenus du travail. Or, une étude publiée en septembre, et consacrée à la Tunisie et au Maroc, met en doute cette thèse.
L’étude réalisée par le Forum euro-méditerranéen des instituts de sciences économiques (Femise) s’intitule «Impact de la libéralisation commerciale sur le marché du travail, sur la productivité et les revenus : étude comparative Maroc/Tunisie».
Les auteurs, Ahmed Laaboudi, de l’Université Mohamed V à Rabat-Agdal, de M’hammed Tahraoui, de l’Institut national de statistiques et d’économie appliquée (Insea) de Rabat, au Maroc, et de Jamal Bouoiyour de l’Université de Pau, en France, ont voulu déterminer si la libéralisation des échanges a eu des effets positifs sur l’emploi dans ces deux pays. Leurs conclusions sont plutôt mitigées. Car, si en Tunisie comme au Maroc, l’ouverture des marchés induite notamment par les accords d’association avec l’Union européenne a permis d’améliorer la capacité de création de l’emploi dans les deux pays, ces créations demeurent très insuffisantes eu égard aux efforts consentis et à la hausse continue de la demande.
En ce qui concerne la Tunisie, les auteurs déplorent un taux de chômage de 68% pour les diplômés en droit, de niveau Bac+4, et de 70% pour les techniciens supérieurs dans les industries agroalimentaires. Une situation qui traduit le rôle de «plate-forme d’exportation» que joue la Tunisie pour les pays du nord, «sans réel transfert de technologie». En tout cas, jusque là.
Au Maroc, les auteurs notent de fortes disparités, à la fois du point de vue des secteurs économiques, mais aussi de la qualification des personnes. Car si les personnels qualifiés ou les cadres s’en tirent plutôt bien, les travailleurs sans qualification n’ont pas vu leur situation s’améliorer.
Pour ce qui est des salaires, si la tendance est à la valorisation, l’écart se creuse entre personnel qualifié et non qualifié: «les rémunérations des personnels cadres ont progressé à un rythme équivalent au double de celui du salaire moyen de l’ensemble des personnels», notent les trois chercheurs.
En d’autres termes, si l’impact de la libéralisation commerciale sur l’emploi apparaît comme globalement positif, cet impact est différencié selon les niveaux de qualification, avec une tension plus forte sur l’emploi qualifié. Cette tendance a induit «l’élargissement de l’écart salarial entre main-d’œuvre qualifiée et non-qualifié», notent les auteurs.
I. B.