Le gouvernement cherche à investir près de 5,5 milliards de dollars dans une voie ferrée qui relierait à grande vitesse la Libye et l’Algérie voisines, afin d’augmenter l’intégration et les échanges régionaux et changer la façon dont ses cargaisons sont transportées.
La Tunisie est déjà dotée d’un réseau ferroviaire important, qui combine des systèmes de métro léger pour le transport des passagers dans les grandes agglomérations urbaines et des lignes principales pour le transport des marchandises et des passagers, qui relient des villes et des plateformes logistiques, telles que les réseaux portuaires.
Si le pays dispose de bien plus de 2.100 km de voies principales, plus d’un quart de celles-ci ont un écartement de rail différent du reste du réseau, ce qui en réduit l’efficacité opérationnelle. De plus, seulement un très faible pourcentage du réseau principal est électrifié et le processus de duplication de certaines sections pour accélérer la circulation à double sens a peu avancé.
Bien que le pays disposât d’un réseau principal solide, moins de 10% des transports de marchandises est réalisé par voie ferrée. En effet, les gouvernements successifs ayant investi des sommes importantes dans l’amélioration du réseau routier du pays et la très grande partie des échanges commerciaux tunisiens (soit environ 95% de toutes les importations et exportations) étant réalisée par voie maritime, le chemin de fer est devenu un des maillons faibles de la chaîne logistique.
Connexions avec les pays du Maghreb
Cependant, cette situation devrait changer dans les dix prochaines années puisque l’Etat veut investir davantage dans les services internes et s’est engagé dans un énorme projet d’infrastructure visant à connecter le pays avec ses voisins du Maghreb, de façon à augmenter l’intégration et les échanges commerciaux régionaux.
A la fin mai, un sommet organisé par le ministère du transport tunisien et l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica) a réuni des représentants des autorités étatiques des chemins de fer de l’Algérie, de la Libye, du Maroc, de la Mauritanie et de la Tunisie pour discuter du réseau ferroviaire maghrébin à grande vitesse.
La ligne à grande vitesse maghrébine devrait relier Casablanca à Tripoli via Alger et Tunis, et connecter les capitales et les plateformes de transport les plus importantes de la région par voie ferrée, afin de faciliter le transport des passagers et des marchandises. La participation de la Tunisie dans ce projet comprend la construction de 780 km de voies ferrées et la mise en place de l’infrastructure de soutien connexe.
Un pont entre l’Afrique et l’Europe
La Tunisie a fortement soutenu ce projet qu’elle considère comme un facteur permettant d’accélérer l’amélioration de ses échanges commerciaux avec la région et les marchés internationaux. Selon Chokri Mamoghli, le secrétaire d’Etat tunisien chargé du commerce extérieur, le Maghreb a un rôle clé à jouer dans le secteur des transports, dans la mesure où il fait le pont entre l’Afrique et l’Europe, ainsi qu’entre la mer Méditerranée, à l’est et l’océan Atlantique, à l’ouest.
Dans ce contexte, il est essentiel qu’une infrastructure de transport plus efficace et plus moderne soit mise en place afin de favoriser la compétitivité du pays à l’échelle à la fois nationale et régionale, a expliqué M. Mamoghli lors du sommet.
Une fois terminé, le chemin de fer trans-maghrébin constituera le moyen de transport le moins cher en termes de coût et de temps, a ajouté M. Mamoghli.
Une des difficultés les plus importantes de ce projet multinational sera de s’entendre sur les spécifications techniques, telles que l’écartement des voies et les normes à appliquer.
Le ministre du Transport tunisien, Abderrahim Zouari, a déclaré que la meilleure façon de surmonter tous les éventuels obstacles serait de réunir un groupe d’experts provenant de chacun des pays du Maghreb participant au projet, experts qui auront pour tâche d’échanger des informations et de partager leurs connaissances.
Baisser les coûts de logistique
Les délégués ont aussi recommandé que des efforts soient déployés pour, d’une part, maintenir au minimum les coûts de logistique dans la région, qui sont relativement élevés en comparaison à ceux de l’Europe, et, d’autre part, intégrer les transports ferroviaires dans la stratégie maghrébine en matière de promotion de la logistique. Pour ce faire, il faudra prévoir de l’espace de stockage respectant les normes internationales, ainsi que des espaces, des zones et des plateformes de logistique dans les zones ferroviaires publiques.
Ces recommandations ont été formulées dans le cadre du sommet de Tunis, mais il reste à savoir à quelle vitesse elles seront mises en œuvre, vu le temps qui a été nécessaire pour la mise en route du projet ferroviaire du Maghreb. En effet, les ministres du transport de la région ont convenu depuis 2007 du tracé de la ligne, mais depuis, le projet semble avoir été mis de côté et la priorité accordée à l’amélioration du réseau routier avec les pays voisins.
Bien sur, le projet n’aura pas un impact immédiat sur l’intégration économique régionale. Actuellement, les échanges entre les pays membres de l’Union du Maghreb arabe représentent 3% des échanges totaux de ces cinq pays. Ainsi, bien que la construction d’une voie ferrée moderne à grande vitesse serve à améliorer les échanges économiques de la Tunisie avec ses voisins, d’autres problèmes, tel que les disputes politiques entre l’Algérie et le Maroc, continuent à limiter la croissance du commerce régional.
Source : Global Arab Network