Qui a vraiment intérêt à couper les lignes téléphoniques et la connexion Internet de Tunisie Telecom dans la zone industrielle de la Charguia II? L'acte, commis dans la nuit du 8 au 9 avril, causant des perturbations dans la zone et faisant des dégâts estimés à 60.000 dinars, est loin d'être innocent.
Par Zohra Abid
C'est, en tout cas, l'avis des experts et techniciens, à propos de l'incident technique, survenu dans la nuit du 8 au 9 avril, peu après 23 heures, lorsque le réseau de Tunisie Télécom a, soudainement, disparu dans la zone industrielle de la Charguia II reliant notamment l'aéroport de Tunis-Carthage et environs.
Panne sur toute la ligne
Le téléphone fixe et la connexion Internet ne répondent plus à cause d'un acte vandale: on a vandalisé les équipements. Comme ça, gratuitement. 448 paires de câbles de cuivre ont été coupées et, selon nos confrères de ''THD'', plusieurs centaines d'abonnés privés de communication à cause de cette panne, touchant tous les services de téléphonie fixe et d'Internet de toute la zone. Mais, paradoxalement, aucun vol n'a été enregistré au niveau des câbles en cuivre. Même pas un centimètre n'a manqué à l'installation. Comme c'est souvent le cas.
Selon encore la même source, «deux lignes hotline servant de liaison de navigation aérienne entre la tour de contrôle de Tunis et celle de l'aéroport international d'Enfidha (Sousse) ont été notamment endommagées».
Une coupure du genre ne peut qu'entraîner des dégâts pour Tunisie Télécom (TT). Mais aussi (et surtout) pour ses abonnés (banques, restos, cafés, agences de location de voiture...).
Pour l'opérateur historique, il s'agit bien d'un coup dur. Car, là, on commence à jouer avec l'image de l'enseigne. Saisie de l'affaire, la police a promis de dévoiler au plus tôt le visage des auteurs de cet acte jugé «indigne, non citoyen voire criminel», selon une source à Tunisie Télécom.
Le Pdg Mokhtar Mnakri s'est dépêché sur les lieux pour constater les dégâts.
Il fallait intervenir au plus vite
A part les 60.000 dinars de perte (en équipements) de ce jour-là pour rétablir les lignes fixes et la connexion Internet, il y a «l'image de marque de l'enseigne bleue et blanche qui risque d'être écornée», raconte une abonnée, qui ajoute «c'est vraiment inquiétant. Qui aurait pu être derrière ce qui ressemble à un sabotage?».
L'alerte ayant été rapidement donnée, les interventions techniques ont permis de rétablir la téléphonie mobile en un temps relativement court. Mokhtar Mnakri, Pdg de TT depuis 7 mois, s'est dépêché sur les lieux pour suivre lui-même les travaux.
Les techniciens étaient alors absorbés par les réparations. Vers 16 heures, tout a repris. Et tout le monde a respiré, en espérant ne pas avoir d'autres alertes, en ce jour férié, où on a travaillé d'arrache-pied. «Surtout que la veille, un acte similaire a eu lieu à Gafsa (sud-ouest). C'était détruire pour détruire... D'ailleurs, le 23 mars dernier, au même lieu, les mêmes lignes ont été endommagées», affirme un fonctionnaire de l'entreprise, ulcéré par cette série de sabotages. «C'est vraiment indigne. TT a toute une infrastructure déployée dans le pays. Normalement, les citoyens doivent la garder précieusement. Car il est du devoir de chacun de préserver les intérêts publics», ajoute-t-il.
«Cette fois-ci, on a arraché des fibres optiques qu'on a laissées sur place; on a vissé et dévissé des écrous et des serrures. Il s'agit bien d'un connaisseur qui en veut à l'entreprise. Bon l'affaire a été confiée à nos services juridiques et une plainte a été automatiquement déposée», a ajouté notre interlocuteur.
M. Mnakri écoute les explications des techniciens.
Des bonus aux abonnés en guise d'excuses
Après cet incident, les responsables ont dû présenter des excuses à toutes les entreprises victimes de cette coupure. Comme à chaque fois où il y a eu des perturbations.
Le 31 mars dernier, suite à des actes de vandalisme endommageant des câbles de fibres optiques reliant Sousse à Hammamet et Sousse à Kairouan engendrant notamment une coupure du réseau GSM 2G et 3G de l'opérateur, Tunisie Telecom a dénoncé ces actes et engagé des poursuites judicaires après avoir présenté des excuses à ses clients – même si ce genre d'incident est indépendant de sa volonté – et les a indemnisés en leur offrant des bonus. Tout en espérant que «des actes pareils ne se reproduisant plus dans l'avenir». Malheureusement, la mauvaise série se poursuit. Et tant qu'on n'a pas mis la main sur les voleurs et les saboteurs, le risque est toujours là.
En 2011, au lendemain de la révolution, le vol des câbles a fait subir des pertes énormes à l'entreprise. Les dégâts ont été estimés à 3 millions de dinars. C'est énorme, même pour une entreprise de la taille de Tunisie Télécom. Et l'hémorragie s'est poursuivie en 2012 et au cours des premiers mois de 2013. Il va falloir que les autorités sécuritaires démasquent au plus vite les malfaiteurs.