Où en sont aujourd’hui les échanges entre la Tunisie et la Turquie, deux pays que lient une histoire commune et de nombreuses affinités culturelles?


 

La Turquie, qualifié de «petite Chine de l’Europe» par Jean-Marc Vittori dans un article paru dans ‘‘Les Echos’’ , est devenue une puissance économique émergente et une véritable nation industrielle, cherche des débouchés commerciaux à ses produits, qui sont souvent de bonne qualité et à des prix nettement moindres que ceux d’Europe ou des États-Unis. La Tunisie est devenue l’un des marchés, au sud de la Méditerranée, où les produits turcs sont de plus en plus présents.

Présence des opérateurs turcs
La présence économique turque en Tunisie remonte au début des années 80. Certaines entreprises turques de construction et de bâtiment ont pu remporter des appels d’offres lancés par les autorités tunisiennes. L’exemple le plus connu est celui de l’entreprise Sezaci Turke Feyzi Akkaya Construction Co (Stfa) qui, en 1989, a effectué les travaux d’aménagement du port commercial de Gabès.
L’opérateur aéroportuaire turc Tav Airports a investi, depuis 2007, quelque 550 millions d’euros pour la construction puis la gestion du nouvel aéroport d’Enfidha-Zine El Abidine Ben Ali, ouvert en juin dernier. Parallèlement, les échanges entre les deux pays ont augmenté de 65% en 2008, pour atteindre le milliard de dollars.
13 entreprises industrielles turques sont implantées dans notre pays. Elles ont investi 7 millions d’euros et emploient 1.235 salariés, dans les secteurs de l’industrie chimique, de la mécanique, de l’éclairage automobile, de l’électroménager et des textiles.
Cette présence diversifiée a donné naissance à quelques fleurons locaux: Prokim, le spécialiste de la colle industrielle, le groupe Zeytinoglu dans la construction de conteneurs, ou Wbs-Winnen Borji, du groupe Yegin, qui fournit depuis Sfax les armées tunisienne et turque en uniformes et en parachutes. Ce développement a été favorisé par la présence en Tunisie depuis 1991 de l’une des principales banques turques, Türk Eximbank.
Récemment, la chaîne de restauration turque Ziya Sark Sofrasi a annoncé avoir signé un accord de franchise avec une entreprise tunisienne pour s’implanter dans notre pays avant la fin de 2011.
La Tunisie importe de la Turquie des produits électroménagers (notamment de la marque Arçelik), textiles, agroalimentaires (fruits secs), et des biens d’équipement.
Les exportations tunisiennes à destination de la Turquie sont essentiellement composées de matières premières ou de produits semi-manufacturées, tels les phosphates, l’acide phosphorique, l’aluminium, les peaux de mouton, la pâte à papier industriel, les câbles électriques et les dattes.

Des forums d’affaires à Ankara et Tunis
Un forum d’affaires tuniso-turc s’est tenu, il y a deux semaines, à Ankara, la capitale turque, à l’initiative de l’ambassade de Tunisie dans ce pays. Des représentants d’entreprises privées turques, des hommes d’affaires et des compétences tunisiennes résidant en Turquie ont pris part à ce forum.
Des responsables de l’Agence de promotion de l’investissement extérieur (Fipa), et du pôle de compétitivité El Fejja/Monastir et de la Fédération nationale du textile (Fenatex) relevant de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica, patronat tunisien) ont présenté des communications sur les opportunités d’investissement en Tunisie, notamment, dans les secteurs des composants automobiles et du textile. L’accent a été mis, lors de ces interventions, sur les principaux textes législatifs et les incitations instituées en faveur des investisseurs étrangers.
La délégation tunisienne a mis à profit son séjour en Turquie pour visiter, à Istanbul, des zones industrielles et des espaces technologiques. Ces visites ont permis d’identifier de nouveaux créneaux de partenariat entre les deux pays.
En marge du Forum d’affaires tuniso-turc d’Ankara, l’Office national du tourisme tunisien (Ontt) et l’Union des agences de voyages turques ont organisé une soirée à Istanbul. L’objectif : faire connaître la diversité des offres touristiques dans les deux pays.
Le site de l’Utica annonce, par ailleurs, qu’une délégation d’hommes d’affaires turcs est attendue à Tunis du 1 au 3 décembre. Présidée par le ministre d’État au Commerce extérieur, M. Zafer Çagălayan, la délégation sera composée de plusieurs entreprises spécialisées dans divers secteurs tels que l’habillement, le fer et l’acier, les machines et équipements, les produits électriques et électroniques, alimentaires, chimiques et plastiques, les pièces détachées automobiles, la construction et les matériaux de construction, les bijoux, les meubles, et le linge de maison.
A cette occasion, le 2 décembre, se tiendra un forum d’affaire turco-tunisien ainsi que des réunions bilatérales entres les sociétés turques et tunisiennes, afin de faciliter les contacts et créer des opportunités de coopération entre les opérateurs des deux pays. 

Le «commerce de la valise»
Dans un article intitulé «Le Maghreb, nouveau terrain de chasse des entreprises turques», le magazine ‘‘Jeune Afrique’’ analyse l’offensive de la Turquie dans les pays du Maghreb, des marchés «naturels», qui sont en passe de devenir de première importance pour les produits turcs.
Le magazine n’omet pas de souligner le développement de circuits de commerce parallèle entre la Turquie et le Maghreb, en affirmant qu’une partie des produits turcs empruntent les circuits de l’informel en transitant, pour la Tunisie, par la Libye.
«Le ‘‘commerce à la valise’’ occupe de nombreuses Tunisiennes qui font régulièrement du shopping à Istanbul et revendent la marchandise dans leur entourage», note ‘‘Jeune Afrique’’. Et il rappelle que «près de 100.000 ‘‘touristes’’ tunisiens se rendent ainsi en Turquie chaque année», en mettant bien touristes entre guillemets pour souligner la dimension commerciale de ce tourisme.

Imed Bahri