L'agence de notation financière japonaise Rating and Investment Information Inc. (R&I) a lancé un sérieux avertissement aux autorités tunisiennes sur sa très probable décision d'abaisser la note souveraine de la Tunisie.
Par Marwan Chahla
Cette rétrogradation, si elle a lieu, viendrait confirmer le verdict de R&I, en mars dernier, à savoir un BBB- avec perspective négative.
R&I rejoint ainsi d'autres agences de notation internationales (Fitch, Moody's et Standard & Poor's) pour dire à la troïka, la coalition au pouvoir dirigée par le parti islamise Ennahdha, que l'instabilité politique et l'insécurité qu'il a créées, sa mauvaise gestion des affaires du pays et son incompétence ont causé trop de dégâts...
Le blocage politique en Tunisie inquiète très sérieusement nos partenaires, qu'ils soient institutions financières internationales, bailleurs de fonds publics et privés, investisseurs, gouvernements frères et amis ou simples agences de notation.
Par leur silence qui en dit long, par leurs demi-mots ou leurs mots entiers, ils expriment leur déception et leur pessimisme quant à la manière dont les affaires de notre pays sont menées.
Le dernier en date de ces avertissements nous vient de l'autre bout de la planète: l'agence de notation japonaise R&I qui déroge quelque peu à la traditionnelle discrétion nippone pour dire que les choses vont très mal en Tunisie et que les perspectives sont loin d'être encourageantes.
Dans une note d'information, publiée en milieu de semaine dernière, R&I met en garde les autorités tunisiennes contre cette incertitude politique dont le pays n'arrive pas à se débarrasser. Si l'instabilité politique persiste, l'agence de notation nippone rappelle, «l'économie et la situation budgétaire (de la Tunisie) s'en trouveraient très sérieusement affectée, et entraîneraient probablement des retards de versement du prêt du Fonds monétaire international, ce qui aurait pour conséquence de réduire sensiblement les liquidités en devises du pays».
Traduisons: la marge de manœuvre de la Tunisie, par la faute d'une impasse politique sans fin, se rétrécit et il n'est donc plus possible à tous ceux qui, à l'étranger, ont cru bon accorder leur confiance et leur soutien à notre Révolution de continuer de parier sur notre réussite.
R&I appelle les choses par leur nom et somme les autorités tunisiennes de se ressaisir: «s'il n'y a pas de progrès sur ce chapitre de la stabilisation politique, s'il n'y a pas d'action pour mettre fin aux effets négatifs de cette instabilité sur l'économie du pays et sa situation budgétaire (...) et si le prêt du FMI n'est pas versé, la dégradation de la note tunisienne deviendrait inévitable ».
Bien sûr, nous diront les zélés nahdhaouis et leurs associés de la Troïka, les avis de ces agences de notation importent peu, qu'elles ne sont jamais objectives, qu'elles se trompent toujours et qu'elles cachent mal leur hégémonisme. Bien sûr, on nous dira également que notre pays traverse des difficultés, mais que celles-ci sont passagères...
Les usurpateurs de la Révolution continueront de manipuler quelques chiffres du tourisme ou d'une croissance de 2, 3 ou 4% qui, pour le commun des mortels, sont invisibles.
Ce que le Tunisien moyen voit, tous les jours depuis près de trois longues années, c'est sa difficulté de plus en plus grande à joindre les deux bouts et à remplir son couffin, et son enfant et celui du voisin qui ne trouvent toujours pas d'emploi. Sans compter nos autres illusions perdues.
Tout cela, par la faute d'un bulletin de vote, glissé dans l'urne le 23 octobre 2011, que l'on regrettera toute notre vie.