On pourrait sérieusement le penser, d'autant que le plus gros bailleur de fonds de notre pays déplore le retard dans la mise en route des réformes convenues. Nouveau camouflet pour le gouvernement Larayedh.
Par Moncef Dhambri
Le Fonds monétaire international (FMI) a déclaré, lundi, que la Tunisie a besoin, de toute urgence, d'une action plus forte pour réduire ses déficits budgétaires et générer une véritable croissance économique inclusive, alors que les décaissements des autres tranches du prêt stand-by de l'institution financière internationale, le fameux 1,74 milliard de dollars, devront attendre.
Le FMI a appelé clairement les choses par leurs noms pour expliquer les retards pris sur les décaissements des prêts promis à la Tunisie: les raisons de ce manque de confiance en l'économie tunisienne sont, ni plus ni moins, les réformes politiques qui tardent à voir le jour et les problèmes sécuritaires qui perdurent.
Les autorités tunisiennes peuvent avancer les chiffres qu'elles veulent. Le Fonds a sa manière de voir les choses et ses propres prévisions: selon l'institution financière internationale, la croissance économique tunisienne pour l'année courante ne dépassera les 2,7% et le déficit budgétaire pourrait atteindre les 8,8% du PNB.
Selon Amine Mati, chef de mission pour la Tunisie auprès du FMI, les investisseurs sont toujours frileux et attendent encore que les choses se stabilisent, que les troubles et les risques économiques cessent pour pouvoir s'engager de nouveau et plus.
«Afin de faire face à tous ces sérieux défis, des efforts doivent être consentis de toute urgence pour réduire les déficits budgétaire et extérieur, s'attaquer aux vulnérabilités du secteur bancaire et donner très rapidement un véritable élan à une croissance inclusive qui pourra absorber le chômage», a-t-il déclaré.
La recette du FMI comprend donc une longue liste d'ingrédients: une réduction plus importante des déficits budgétaire, commercial et de capitaux, une politique monétaire plus stricte et un régime de changes plus flexible.
On a donc compris: les décaissements des prochaines tranches du prêt stand-by de 1,74 milliard de dollars US, accordé à la Tunisie par le FMI en juin dernier, devront attendre encore quelque temps.
Rappelons que ce programme d'assistance financière de 2,87 milliards de dinars tunisiens auquel le conseil d'administration du FMI a donné son aval, il y a 6 mois, est assorti d'un certain nombre de conditions très contraignantes pour la Tunisie. S'il reste indéniablement généreux (une période de décaissement étalée sur deux ans, un taux d'intérêt de 1,08% par an, une période de grâce de 3 ans et une période de remboursement de 5 ans.), ce programme n'en impose pas moins des réformes drastiques que la Tunisie est tenue de respecter à la lettre. Ces réformes économiques, élaborées avec le Fonds pour la période 2013-2015 afin de «stabiliser» l'économie tunisienne, laissent à notre pays une marge de manœuvre très étroite. Au total, il s'agit de 8 révisions qui comprennent notamment des réformes sur le plan budgétaire et celui de la croissance inclusive.
Nous comprenons aussi que la Troïka 2, sous la conduite de l'«inégalable» Ali Larayedh et l'«inimitable» ministre des Finances, l'«imperturbable» Elyes Fakhfakh, assisté à une courte distance par l'«incorrigible» Gouverneur de la Banque centrale Chedli Ayari, ont tout simplement failli.
Qui est-ce qui recollera les morceaux de notre économie qui a volé en éclats? Qui est-ce qui rapiécera la crédibilité et la viabilité des finances de notre pays? Qui est-ce qui paiera tous les pots qu'Ennahdha a cassés?
Réponse: ceux qui ont «naïvement» cru qu'un bulletin de vote, celui du 23 octobre 2011, était la clé du bonheur, la clé du meilleur avenir tunisien.
Illustration: Amine Mati, à gauche, avec Chedly Ayari et Elyes Fakhfakh, en avril dernier, à Tunis.