L’innovation est devenue partie intégrante de la stratégie industrielle de la Tunisie et l’Etat lui accorde désormais toute attention particulière. Mais que peut apporter l’entreprise à ce processus? Par Noureddine Ben Mansour
La politique de l’innovation n’est malheureusement pas ancrée dans une grande partie des entreprises en Tunisie, et ce par manque de stratégie et de tradition.
L’une des causes de cette défaillance est le manque d’enthousiasme dû à la culture d’entreprise ambiante, assez traditionnelle et dominée par un certain individualisme, à cause notamment du manque de diligence et de réactivité au marché d’une part et, d’autre part, d’une mentalité héritée de l’époque où l’industrie était protégée.
Le financement de l’innovation
Par ailleurs, plusieurs entreprises n’ont pas les moyens nécessaires, humains et matériels, pour adopter une politique de l’innovation qui a fait le bonheur des entreprises rampantes.
Cette situation a engendré plusieurs entrepreneurs qui croient au marché fermé et refusent toute concurrence étrangère. Conséquence: ils ne cessent de subir des attaques concurrentielles, d’autant qu’ils ont tendance à réagir trop tard aux nouveaux événements commerciaux sur le marché local.
Une avancée technologique ne peut pas se réaliser sans une politique de recherche et développement (R&D). L’avenir technologique de n’importe quel pays dépend de son niveau de dépense dans ce domaine.
Plus un pays est riche plus il investit en R&D. Les Etats Unis dépensent plus de 250 milliards, suivis successivement du Japon, de l’Allemagne et de la France.
On constate depuis quelques années que le financement de l’innovation a pris le dessus sur la R&D. Cela est dû au soutien du capital risque qui est devenu une source de financement des entreprises innovantes, toujours à la recherche de nouvelles technologies plus performantes.
Les engagements de l’Etat
D’une façon générale, le tissu industriel quel que soit son niveau, évolue en tenant compte des contraintes créées par les nouvelles technologies qui, dans une certaine mesure, conditionnent l’essor économique des industries. Pouvoir anticiper à temps les dépendances de l’industrie nationale du pays vis-à-vis de ces technologies participe d’une démarche stratégique.
Cette démarche d’anticipation est un moyen efficace de prise de décision au sens positif. Elle nous pousse, aussi, à bien réfléchir et à nous demander si telles nouvelles technologies pourront, dans l’avenir, révéler certaines faiblesses. Elle nous aide à éviter, à terme, les influences négatives de telle ou telle technologie. Les exemples ne manquent pas, tel celui du Groupe chimique tunisien (Gct), fleuron de l’industrie tunisienne dont les activités ont induit de nombreuses nuisances à l’environnement.
Le processus d’innovation est devenu une partie intégrante de la stratégie industrielle de la Tunisie. L’Etat, qui lui accorde désormais une importance stratégique, a mis à la disposition des industriels des appuis et des encouragements (immatériels et matériels). Et cela offre de nouvelles possibilités de création de richesse, non pas seulement pour l’entreprise mais pour l’ensemble de la société.
Les obligations de l’entreprise
De ce fait, l’industrie n’aura d’avenir en Tunisie que si les chefs d’entreprises s’impliquent davantage dans ce processus d’innovation et avec une conscience professionnelle, un esprit responsable et solidaire envers le tissu industriel du pays dans son ensemble et non envers telle industrie séparément.
Les entreprises doivent aussi apporter leur contribution directe, et non seulement à travers le Fodec, dans le financement de l’innovation, et ce par une participation directe selon leur importance, car le Fodec est en fait une contribution collective de tous les citoyens actifs.
Pour assurer davantage de succès à cette nouvelle orientation industrielle, il est du devoir de chaque entreprise, surtout celle qui en a les moyens, de mettre en place un dispositif, même en miniature, de gestion des idées. Ce dispositif permettra de créer de nouvelles opportunités.
Pour cette raison, l’entreprise tunisienne doit sortir de son attitude directoriale actuelle et apprendre à gérer les idées et les recommandations de son personnel.
L’innovation passe aussi par le management des idées quelles qu’en soient la nature et la provenance, qu’elles parviennent d’un ingénieur ou d’un salarié, l’essentiel est de leur donner une importance et ne pas les négliger, car au fond de toute idée il y a un grain de vérité. Collecter les idées, les trier et les confronter, sans distinction, est une voie d’enrichissement pour l’entreprise.
Les entreprises qui ont réussi à travers le monde ont déjà instauré ce dispositif, dirigé par des gens qui ont une culture assez large et ont une bonne connaissance commerciale et technique, facteur déterminant quant au choix des idées nouvelles.