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En Tunisie, ce ne sont pas les exportations qui sont le principal moteur de l'emploi, mais les investissements directs étrangers (IDE) et l'amélioration du capital humain via l'éducation.

La 2e Rencontre internationale méditerranéenne, organisée par l'Université Centrale, s'est tenue les 12 et 13 février 2014 à Tunis sur le thème: «L'Europe et la Méditerranée dans la crise : bilans et perspectives».

La conférence a été l'occasion de présenter un ensemble d'analyses dressant un bilan de la situation économique (combiné à des considérations géo-politiques) dans les pays des rives sud et est de la Méditerranée dans leurs relations avec l'Union européenne, suite aux chocs du «printemps arabe». Les participants ont évoqué aussi les perspectives et les possibilités de sortie de crise.

Reconstituer la capacité exportatrice

Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), s'est appuyé sur une analyse macroéconomique et sur sa longue expérience de grand commis de l'Etat, pour exposer les contraintes internationales auxquelles est confrontée la politique monétaire et, plus globalement, économique de la Tunisie dans sa tentative pour sortir de la crise actuelle (faible croissance, fort taux de chomage, notamment des jeunes et des diplômé(e)s, déficits budgétaire et extérieur...).

A court terme, a-t-il souligné, il y a la très grande difficulté et, en même temps, la nécessité d'un accord préalable avec le FMI (auquel il s'efforce constamment de tenir tête sur la nature des réformes à engager, en tant que Gouverneur de la BCT) afin que le pays puisse, ensuite, obtenir les aides financières bilatérales complémentaires indispensables.

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Chedly Ayari et Claude Berthomieu.

A court terme, seule la consommation est en mesure de jouer un rôle de «moteur» de la relance de la croissance, tandis qu'à moyen (et long) termes, c'est surtout le retour de l'investissement et, notamment, étranger qu'il faut compter pour que le pays reconstitue sa capacité exportatrice perdue ces dernières années, a-t-il expliqué.

Le professeur Hedi Lahouel a plaidé pour une politique orientée vers la relance des exportations, au prix d'une grande rigueur en matière de dépenses publiques, de politique de l'emploi et de politique industrielle pour promouvoir de nouvelles opportunités d'exportation différentes de celles qui avaient prévalu juque-là.

Les déterminants de la création d'emploi

Le professeur Claude Berthomieu, président de Cemafi International, élargit l'analyse de la crise en Tunisie à celle de deux autres pays de la rive sud de la Méditerranée, l'Egypte et le Maroc, représentatifs des situations de crise touchant l'ensemble de la région.

Selon lui, la libéralisation des échanges commerciaux extérieurs mise en œuvre dans les trois pays via les accords d'association avec l'Union européenne (dans le cadre du Processus de Barcelone à partir de 1995) n'a pas produit les effets attendus: alourdissement ininterrompu des déficits commerciaux, chômage croissant, notamment des jeunes, des femmes et des diplômé(e)s, ce qui a été une des causes majeures de la crise du «printemps arabe». D'où son diagnostic sans appel : la croissance dans ces pays, même si elle a eu lieu, a été trop faible par rapport aux possibilités pour être une «croissance inclusive».

M. Berthomieu a exposé ensuite les résultats d'une étude économétrique concernant la sensibilité de l'emploi aux variations de plusieurs déterminants de la croissance, d'où il ressort que chaque pays a ses spécificités dans ces rélations d'«élasticité». Dans le cas particulier de la Tunisie, ce ne sont pas les exportations qui sont le principal moteur de l'emploi (via la croissance qu'elles renforceraient), ce sont les IDE et l'amélioration du capital humain via l'éducation, qui sont les meilleurs déterminants de la croissance de l'emploi.

Les moteurs de la croissance inclusive

La deuxième journée a porté sur un approfondissement des questions touchant aux solutions possibles, en matière de politique économique, pour sortir de la crise. Les deux thèmes principaux des débats ont été d'abord, les questions de financement nécessaire pour relancer la croissance: le financement des dépenses intérieures de consommation et des investissements, considérés comme les deux «moteurs de la croissance inclusive» à promouvoir, et qui relèvent directement de la politique macroéconomique nationale, l'investissement étranger (direct ou de portefeuille) restant entre les mains de décideurs localisés dans le reste du monde.

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Ensuite ont été présentés et discutés le rôle et les aides des institutions financières internationales (IFI), dont la contribution au financement des réformes et des moteurs de croissance est indispensable, mais pas à n'importe quelle condition comme déjà souligné par le gouverneur de la BCT.

Ainsi, la question de la nature et du rôle de la finance islamique a été abordée, de même que celle des possibilités, dans le cas de la Tunisie, qu'ouvrirait le développement du marché financier, même pour les petites et moyennes entreprises (PME), et celui des institutions financières de micro-finance et de micro-assurance.

Néammoins, il est apparu que, pour sortir à court terme de la situation de stagnation et de fort chômage, vu la relative difficulté de mobilisation et de transformation de l'épargne locale pour les besoins d'investissements par les systèmes financiers nationaux (intermédiaires financiers bancaires et non bancaires), les IFI comme la Banque africaine de développement (BAD) ou la Banque mondiale étaient des partenaires incontournables, tant en Tunisie que dans les autres pays méditerranéens (ainsi, la BAD prête de l'argent à l'OCP au Maroc, alors même que cette société publique est très florissante...).

Quant à la finance islamique, certes très séduisante d'un point de vue microéconomique pour mobiliser de l'épargne, elle ne semble pouvoir jouer, au plan macroéconomique du fonctionnement en économie ouverte, des systèmes financiers, qu'un rôle d'appoint, comme le sous-entendaient déjà les propos à ce sujet du gouverneur de la Banque centrale lors de son intervention inaugurale.