Tunisie Telecom traine le boulet d'un passé pas si lointain où elle était tenue d'accomplir une mission de service public. La question, aujourd'hui, est de savoir si on doit lui donner les moyens de se relancer dans un contexte devenu très concurrentiel.
Par Imed Bahri
A cet égard, Tunisie Telecom ne constitue pas une exception. Toutes les entreprises publiques sont logées à la même enseigne. Certaines, sinon la plupart, sont même dans une situation encore plus compliquée. Et le chef du gouvernement provisoire Mehdi Jomaa ne le sait que trop: des efforts sont nécessaires pour restructurer ces entreprises et les doter des moyens requis, matériels et humains, pour qu'elles puissent soutenir la concurrence aux plans national et international.
Le poids de la concurrence
Tunisie Telecom a longtemps été une locomotive du secteur des télécommunications en Tunisie. Ce rôle, elle ne l'a pas encore perdu, même si elle doit faire face, aujourd'hui, à la concurrence de deux autres opérateurs aux dents longs, Tunisiana et Orange, adossés à deux géants internationaux.
Que les parts de marché de Tunisie Telecom soient grignotés, cela n'a rien de surprenant ou d'exceptionnel: la concurrence n'a pas que du bon. Et puis, l'essentiel c'est que l'entreprise préserve, malgré tout, sa bonne assise financière.
Que Tunisie Telecom puisse perdre légèrement dans le segment de la téléphonie fixe est également dans l'ordre des choses, car le secteur est en pleine reconfiguration avec le développement fulgurant de la téléphonie mobile.
Le plus important est que l'entreprise ne soit pas en train de dormir sur ses lauriers. Au contraire : elle a consolidé ses parts de marché sur le segment du très haut débit, élargi son réseau de partenariat international et augmenté sa bande passante internationale. Cette manière d'anticiper les évolutions et de poser des jalons est, on l'a compris, un pari sur l'avenir.
Les responsables des entreprises publiques ont besoin d'un soutien national pour réussir leurs plans de restructuration (Ph. Mokhtar Mnakri, Pdg de Tunisie Telecom:).
La compétitivité menacée par les sureffectifs
Reste, bien sûr, le gros problème auquel toutes les entreprises publiques sont exposées: les sureffectifs qui plombent les comptes et grèvent dangereusement la compétitivité.
Tunisie Telecom, pour sa part, a lancé, dès 2009, un plan de départ volontaire à retraite, dont l'objectif est de réduire les effectifs faramineux et de se doter des compétences dont elle a besoin pour se maintenir à la pointe des évolutions technologiques.
Ce plan n'a malheureusement pu être mis en oeuvre dans les meilleures conditions. La révolution de janvier 2011 n'a guère arrangé les choses. Grèves, sit-in et manifestations, organisés par la Fédération générale de la poste et des télécommunications (FGPTT), affiliée à l'UGTT ayant ponctué le quotidien de l'entreprise.
Le jeudi 20 février dernier, c'est le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et des Technologies de l'information et de la communication, qui est sorti de sa réserve pour défendre ce plan.
Les départs volontaires à la retraite concernent surtout les agents ayant 50 ans et plus et sont accordés aux salariés qui en font expressément la demande, a expliqué le ministre, qui n'a pas fait mystère de son approbation de ce plan qui va permettre, selon lui, à l'opérateur historique, de réduire ses effectifs pléthoriques (plus de 8.000 salariés, dont quelque 2.887 seraient concernés par les départs volontaires), de recruter de jeunes compétences capables de donner un plus à l'entreprise et de renforcer ainsi sa compétitivité dans un secteur devenu très concurrentiel.
Loin de tout populisme
Tunisie Telecom, qui n'a de cesse de répéter que la décision de participer au plan de départ à la retraite, reste entièrement volontaire, a également assuré, à maintes reprises, qu'un comité ad hoc va être créé pour étudier les candidatures spontanées qui seront ainsi présentées.
Reste qu'un débat national est nécessaire pour expliquer à l'opinion publique en général et aux employés des entreprises publiques en particulier, dont ceux de Tunisie Telecom, ce que toutes les parties peuvent gagner de la restructuration et de la relance de ces entreprises. Ce débat, auquel doivent prendre part toutes les parties (représentants de l'Etat, des entreprises et des salariés, députés, etc.), doit être franc, dépassionné et, surtout, loin de tout populisme.