La libéralisation des services postaux dans l’Union européenne entrera en vigueur définitivement début 2011. Et si la Tunisie, qui cherche à s’arrimer durablement à l’Europe, faisait de même?
Notre pays, qui a ouvert à la concurrence des secteurs aussi stratégiques que l’énergie, les télécommunications ou le transport aérien, pourrait aussi envisager de libéraliser les services postaux, secteur aujourd’hui largement dominé par les privés à travers le monde.
Des services de meilleure qualité
Cette libéralisation, qui n’est pas une fin en soi mais un moyen pour créer plus de richesses et d’emplois, pourrait aider à l’émergence d’un certain nombre d’acteurs dynamiques qui proposeraient des services de meilleure qualité, ou cibleraient des secteurs spécifiques, ou des niches porteuses.
Au moment où le courrier est en train de perdre du terrain face à la poussée des médias utilisant d’autres canaux de communication (e-mailing…), cette mutation serait d’autant plus possible qu’il n’y aurait rien à craindre pour la Poste Tunisienne. Ayant beaucoup diversifié ses activités et élargi la gamme de ses services, l’entreprise publique ne se ressentirait peut-être pas beaucoup d’une éventuelle libéralisation du courrier, qu’elle soit partielle ou totale.
L’expérience dans les pays européens a d’ailleurs montré que l’opérateur public est rarement affaibli par un tel processus. Il parvient, en tout cas, à préserver ses chiffres d’affaires en développant des activités spécifiques et des services innovants.
La Tunisie pourrait, par ailleurs, adopter une démarche progressive, comme ce fut le cas dans la plupart des pays européens: commencer par libéraliser la distribution des plis de plus de 350 grammes, puis ceux de plus de 100 grammes, et enfin ceux de 50 grammes et moins.
Une concurrence innovante
Pour revenir à la France, le dernier pays européen à ouvrir la distribution du courrier à la concurrence, et ce à partir du 1er janvier, cette petite révolution ne semble pas gêner outre mesure Jean-Paul Bailly, le Pdg de La Poste française depuis 2002. «Au matin du 1er janvier, il n’y a pas grand-chose qui va changer, on ne va pas voir surgir d’énormes concurrents de La Poste», a-t-il déclaré. «En revanche j’ai la conviction que cette concurrence va monter en puissance, avec une série de petits concurrents innovants sur des niches qui – et c’est le jeu – correspondent parfaitement aux attentes des consommateurs, et qui seront peut-être moins chers», a-t-il ajouté.
Fervent défenseur de la libéralisation des services postaux, M. Bailly en attend beaucoup de bien. Selon lui, la libéralisation «signifie fondamentalement que c’est le citoyen qui choisit: il faut donc travailler sur la qualité du service, la rapidité, la qualité de la relation de service, et aussi les prix, offrir des tarifs accessibles», a-t-il expliqué.
La France, on le sait, est le pays européen où des inquiétudes ont été formulées à propos de la libéralisation du courrier et où des voix se sont élevées pour appeler à un moratoire ou à un blocage brutal de ce processus, au prétexte que cela conduirait à une dégradation des conditions de travail et des salaires pour les employés du secteur, ainsi qu’à une moindre qualité de service pour les usagers.
Ces récriminations ne semblent pas avoir pesé devant la détermination du gouvernement à mettre en route le processus de libéralisation, de manière réfléchie et progressive. Le Pdg de La Poste y voit aujourd’hui une évolution non seulement inéluctable mais bénéfique pour son entreprise…
Une expérience à suivre de très près.
Imed Bahri
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