Les prix du transport aérien ne vont sans doute pas encourager les Tunisiens à l'étranger à rentrer au pays, l'été prochain. Il va falloir économiser dur pour régler les 450 euros d'un Paris/Tunis départ le 25 juillet avec un retour le 15 août!
Par Samir Bouzidi
Depuis un mois, Amira se connecte plusieurs fois par jour sur internet pour chercher la bonne affaire. Lassée de ne pouvoir trouver un prix dans ses moyens, elle se résignera certainement, comme beaucoup d'autres, à des vacances ailleurs.
La crise est passée par-là
Amina est très amère à cette éventualité: «C'est la crise et les compagnies aériennes montent les prix. C'est fou! Malgré l'amour qu'on porte au pays, on n'a plus les moyens de suivre!»
Pour des milliers de Tunisiens de l'étranger, les chances de dénicher un billet d'avion en période estivale à un prix juste relève de la loterie!
Cet été ne dérogera pas à la règle. Et, il faut même se préparer au pire si l'on en croit une étude récente du comparateur ''Liligo.com'' prévoyant une hausse tarifaire de 10% sur les vols court-courrier.
Résultat: il va falloir économiser dur pour régler les 450 euros d'un Paris/Tunis départ le 25 juillet avec un retour le 15 août. Sur la première quinzaine d'août, les prix s'envolant même à plus de 500 euros, soit l'équivalent d'un billet A/R pour New-York ou une semaine en demi-pension en Turquie.
Même les prix sur le bateau, traditionnellement plus populaires, n'échappent pas à cette flambée. Un aller-retour sur le ferry Tanit de la CTN, en «fauteuil confort supérieur», ne vous coûtera que 363 euros pour un départ le 26 juillet et retour au 16 août. «Ya hasra!» A ce tarif, on pouvait se payer le voyage pour deux personnes sur le ferry Habib, il y a encore 6 ans! Dans ces conditions, le retour en famille au pays est devenu un luxe!
Si les billets sont aussi chers c'est parce que les Tunisiens de l'étranger sont des victimes collatérales de la crise du tourisme qui sévit en Tunisie. Moins de touristes égal moins de vols charters égal moins de places et donc des prix plus élevés en vols réguliers.
Pour faire baisser les prix, la solution est pourtant simple: ajouter des avions!
La stratégie financière de Tunisair
C'est sans compter sur les calculs de Tunisair qui opte pour une stratégie contraire et résolument financière privilégiant le «confort» de ses marges pendant la période estivale. La compagnie publique (et citoyenne?) vend actuellement à «plein pot» ses sièges entrainant l'alignement tarifaire par le haut des autres compagnies aériennes (Syphax, Air France, Transavia...).
La compagnie publique se décidera peut-être à ajouter des vols en dernière minute quand elle aura vendu x% de ses sièges au prix fort. Or, comment attendre la dernière minute quand on doit déposer des mois à l'avance sa feuille de congés?
Tunisair va même jusqu'à facturer des «taxes aéroport et surcharge carburant» au double de ceux prélevés par Transavia qui décolle pourtant du même aéroport (cf. tableau ci-dessus). On veut bien entendre que la puissance d'achat du groupe Air France dont Transavia est une filiale permet de réduire ses coûts d'achat de kérosène mais le problème n'est-il pas ailleurs?
Par ailleurs, le département marketing de Tunisair doit intégrer une fois pour toutes que pour un aller-retour Paris/Tunis, il y a un prix psychologique à ne pas dépasser (350 euros), au-delà duquel seuls les voyageurs aisés à très aisés acceptent de payer le prix!
Un été «sans» La Goulette
Le droit au retour en été et en famille est sacré pour la très grande majorité des Tunisiens de l'étranger. Peut-être même plus important que le droit de vote! A terme, il y a la solution de l'Open Sky qui autorisera les vols des compagnies low-cost (Ryanair, EasyJet...) à destination de la Tunisie à des prix de moitié inférieure aux niveaux actuels.
Aujourd'hui, il faut gérer la priorité de ces dizaines de milliers de Tunisiens de l'étranger qui n'ont plus les moyens de prendre l'avion en été. L'Office des Tunisiens de l'étranger (OTE) pourrait renaître de ses cendres en décidant d'allouer x milliers de places chez Tunisair à un «tarif social» réservé aux concitoyens à revenus modestes.
Tout ceci a certainement un coût. Nous préférons parler d'investissement tant la contrepartie en rentrées supplémentaires de millions d'euros de devises est automatique.
Une belle opportunité de cagnotte à soumettre au Premier ministre Mehdi Jomaa de passage à Paris à partir de lundi prochain.
Source : ''00216''.