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Les agents de voyage n'ont pas fini de débattre des opportunités et menaces de l'accord sur l'Open Sky en négociation entre la Tunisie et l'Union européenne (UE).

Par Zohra Abid

La conférence internationale organisée aujourd'hui, vendredi 23 mai 2014, à Tunis par la Fédération tunisienne des agences de voyage (Ftav), dans le cadre de la célébration de son 50e anniversaire, a été l'occasion de débattre des opportunités et des menaces que l'Open Sky pourrait représenter pour les opérateurs tunisiens du transport et du voyage.

Alors on y va ou pas?

A voir la salle de conférence archipleine, on imagine l'intérêt que ce sujet suscite parmi les professionnels du voyage, mais aussi les espoirs et les craintes qu'il alimente chez un grand nombre d'entre eux. Car si l'Open Sky a réussi sous d'autres cieux, notamment aux Etats-Unis, aux Emirats arabes unis ou encore à Singapour, rien n'autorise à penser qu'il en sera de même pour la Tunisie.

Mohamed Ali Toumi, président de la FTAV, a mis le débat dans son contexte en se demandant si les opérateurs publics et privés tunisiens sont vraiment prêts à soutenir la forte concurrence que la libéralisation du ciel tunisien ne va pas manquer de provoquer.

«Les Marocains ont adopté l'Open Sky. Mais les résultats, dans ce pays, sont mitigés. Et les positions restent tranchées: il y a ceux qui défendent ce système et ceux qui se plaignent des tas de difficultés qu'il leur a causées», a expliqué M. Toumi, à l'ouverture de cette conférence à laquelle ont pris part Amel Karboul, ministre du Tourisme, et Chiheb Ben Ahmed, ministre du Transport, ainsi que des experts, tunisiens et étrangers, et des voyagistes.

L'Open Sky est conforme aux choix de l'économie nationale, libérale ou, du moins, ouverte. L'adopter c'est accepter l'ouverture totale du ciel et les règles de la concurrence, qui risque d'être rude. Il faut donc être conscient des pertes et des profits. «Ce que l'on veut c'est une concurrence loyale qui fasse profiter tout le monde», souligne Ahmed Smaoui, ancien Pdg de Tunisair. Il enchaine: «Nous devons travailler là-dessus dès la semaine prochaine. Il s'agit de voir l'impact de l'Open Sky sur l'économie tout d'abord et ensuite sur le consommateur».

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Le doute plane encore

Pour la ministre du Tourisme, lorsque le «billet d'avion est à bon marché, il faut s'attendre à ce que le prix de l'hôtel soit élevé. Il faut donc trouver un équilibre entre les deux», explique-t-elle, tout en regrettant que la consommation touristique soit aujourd'hui quasi absente des réflexions sur l'Open Sky.

Chiheb Ben Ahmed a rappelé, de son côté, que la compagnie aérienne publique Tunisair est un fleuron de l'économie nationale et qu'elle passe actuellement par quelques difficultés, «mais ces difficultés sont en cours d'être surmontées», a-t-il assuré.

«Tunisair reste une locomotive du tourisme tunisien qu'elle a servi pendant 65 ans, mais elle peut constituer un frein pour l'Open Sky», a encore indiqué le ministre. «Cependant, la compagnie a ses principales destinations qui génèrent des recettes importantes. Avec Syphax et les autres compagnies nationales, elle pourrait contribuer à changer le paysage du transport aérien», a ajouté le ministre, préférant conclure sur une note positive. C'est d'ailleurs tout le mal qu'on souhaite à Tunisair, d'autant qu'elle reste la seule garante de la pérennité des agences de voyage.

L'accord sur l'Open Sky est en négociation entre la Tunisie et l'Union européenne (UE) depuis plusieurs années. Des experts estiment qu'en autorisant les vols des compagnies européennes low-cost (Ryanair, EasyJet...) à destination de la Tunisie à des prix de moitié inférieure aux niveaux actuels, il pourrait être une solution pour le développement du tourisme en Tunisie. Mais il pourrait aussi donner un coup de grâce à la compagnie Tunisair, qui aurait du mal, avec ses difficultés actuelles, à casser les prix, répliquent d'autres.

Aujourd'hui encore, le débat a été assez chaud. L'Open Sky est un choix de l'Etat tunisien. Pas si sûr. Car il s'agit aussi d'une contrainte économique que la Tunisie va devoir subir dans le cadre de son partenariat avec l'UE. Aussi doit-on bien négocier l'accord pour ne pas avoir, par la suite, à compter les dégâts.

Il s'agit donc de considérer les gains que cet accord pourrait apporter (plus de dynamisme, une relance de la demande touristique, notamment pour les weekends...), mais aussi les pertes prévisibles en raison d'une concurrence qui, une fois déclenchée, serait difficile à contenir.

Le débat n'a fait que commencer. Les recommandations, qui devaient être annoncées en fin de journée, seront discutées samedi, en présence de toutes les parties concernés par les secteurs du transport et du tourisme. Espérons qu'ils verront un peu plus clair et qu'ils identifieront la démarche à suivre au cours des prochains mois. Car l'économie tunisienne, qui a beaucoup souffert des hésitations, a aujourd'hui besoin de clarté, de décision et d'audace.

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