Pourquoi Axa chercherait-il à se désengager du Maroc ? Pourquoi le groupe financier français hésite-t-il encore à s’engager sur le marché algérien qui recèle un fort potentiel de croissance ? Pourquoi lorgne-t-il aussi sur la Tunisie ?
Ces questions sont suscitées par les informations selon lesquelles Axa mènerait une réflexion pour trouver un autre pays que le Maroc pour y délocaliser ses activités. C’est la Tunisie qui tiendrait la corde, affirme ‘‘La Lettre de l’expansion’’) citée par ‘‘Cercle Finance’’, qui ajoute que l’assureur hésiterait également avec l’Algérie et l’Egypte.
Au Maroc, la filiale locale, Axa Assurance Maroc, était possédée à 51% par le groupe Axa et à 49% par la holding royale Ona (Omnyum nord africain). En 2006, le groupe français a racheté les parts détenus par le conglomérat marocain, pour un montant de 694 millions de dollars. En contrepartie, Axa a délocalisé certaines de ses activités au Maroc pour créer 1 500 postes d’emploi. A l’époque Axa Assurance Maroc était deuxième assureur du pays où il contrôlait 17% du marché et réalisait un chiffre d’affaires d’environ 220 millions d’euros. L’opération, qui visait une meilleure intégration de la filiale marocaine dans le groupe français, a eu cependant une conséquence inattendue: une partie du portefeuille d’Axa Assurance Maroc est partie vers les assurances RMA Wataniya d’Othman Benjelloun, second actionnaire des holdings royaux Sni (Société nationale d’investissement) et Ona et de Wafa Assurance, pôle assurance d’Attijariwafa, également sous le parapluie Ona-Sni.
La place d’Axa et ses parts de marché au Maroc sont-ils menacés ? Un développement des activités du groupe en Algérie ne permettrait-il pas de compenser le repli de ses activités au Maroc ? Suivez mon regard…
Concernant l’Algérie, on sait qu’un représentant d’Axa avait pris part, en mars 2008, à la signature à Paris de la Convention algéro-française dans le domaine des assurances. Signée, du côté français, par Aviva France, Axa, AGF, Groupama et MMA, et du côté algérien, par Caar et SAA, cette convention a mis fin à un contentieux de plus d’une quarantaine d’années entre les assureurs des deux pays et ouvert la voie aux assureurs français pour opérer de nouveau sur le marché algérien. Dans la foulée de cette convention, Axa, déjà présent dans le pays dans le domaine de l’assistance et de la formation, a exprimé son désir de s’y implanter en tant qu’assureur à part entière. L’intérêt du groupe français pour l’Algérie est d’autant plus grand que le taux de pénétration de l’assurance comparé au PIB y est le plus faible de la région (0,5%, contre 1,95% en Tunisie et 2,7 % au Maroc).
Cependant, Axa attend toujours son agrément, les autorités algériennes tardant à réagir favorablement à sa demande. Entre-temps, le groupe français envisage la possibilité d’acheter des compagnies privées ou de nouer des partenariats avec les groupes publics locaux. Un accord de «partenariat stratégique» dans le domaine de la bancassurance est d’ailleurs en cours de négociation avec la Banque extérieure d’Algérie. Grâce à cet accord, Axa espère pouvoir vendre ses produits via le secteur de la banque-assurance et étendre ainsi son réseau commercial aux principales villes du pays, notamment Alger, Oran et Annaba.
Sur un autre plan : Claude Bébéar, le président d’honneur du groupe Axa a été reçu, le 24 mars dernier, par Hubert Falco, le secrétaire d’Etat français à la Défense et aux Anciens combattants, qui l’a chargé de peaufiner les statuts de la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, que Paris voudrait lancer officiellement avec Bébéar comme président. Y a-t-il un lien entre ceci et cela ? Bébéar, en tout cas, ne pourrait pas ne pas y penser.
En Tunisie, le groupe français détient 15,4% du capital de la Comar, la première compagnie privée d’assurance, filiale du groupe El Amen de Rachid Ben Yedder. Axa a aussi soumissionné pour l’acquisition de 35% du capital de la Star, la première compagnie tunisienne d’assurance, avant de retirer son offre avant la dernière ligne droite. C’est finalement l’un de ses concurrents, Groupama, qui a été rendu officiellement adjudicataire et l’accord de cession a été signé en octobre 2008 pour un montant de 72 millions d’euros.
Axa est toujours à la cherche d’alliances pour renforcer ses activités dans notre pays. Il serait même disposé à y délocaliser certaines de ses activités de service créatrices d’emplois. En annonçant, le 18 février dernier, à l’occasion de la publication des résultats annuels 2009, la volonté de son groupe de délocaliser ses activités dans un autre pays que le Maroc, notamment la Tunisie, le président du directoire d’Axa, Henri de Castries, a peut-être voulu lancer un ballon d’essai en ce sens.
Imed Bahri