La centrale syndicale appelle à une réforme du mode de financement des caisses de sécurité d’une façon générale et du régime de la retraite en particulier. Un chantier qui devrait, selon elle, être lancée avant 2012 et la survenue d’une catastrophe.
Cinq ans après avoir lancé une étude prémonitoire sur le sujet en 2005, l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) remet sur la table le dossier du régime des retraites en particulier et celui des caisses de sécurité sociale d’une façon générale, en y dédiant trois journées d’études (28-30 avril 2010) pour faire réfléchir les parties concernées sur les solutions à apporter au déficit des caisses sociales. Cela fait maintenant trois ans que les caisses de sécurité sociales sont dans le rouge. En effet, le tournant s’est produit en 2007 lorsque la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) a enregistré un premier déficit de 28,6 millions de dinars (MDT), contre un excédent de 49,3 MDT lors de l’exercice précédent.
Notre «trou de la sécu» est non seulement devenu chronique mais tend à s’aggraver. De ce fait, convaincue que dans les conditions actuelles la faillite guette nos caisses, la centrale syndicale considère que le temps presse si l’on veut éviter pareille catastrophe. Mais le problème, comme le laisse entendre l’hebdomadaire ‘‘Echaab’’, dans sa dernière édition, est que le gouvernement et l’UGTT divergent sur la solution de ce problème.
L’UGTT rejette «la potion magique des institutions financières internationales et les bureaux d’études et de conseils dépendant d’elles», c’est-à-dire «l’augmentation des cotisations sociales ou la réduction du montant des retraites, via l’application d’une mesure dangereuse consistant dans le changement de la méthode de calcul», ou «le report de l’âge du départ à la retraite, ce qui signifie une augmentation du nombre des années de cotisation et la diminution de celles de la jouissance de la pension» parce que cette disposition «a des retombées sociales, matérielles, psychologiques et sur la santé d’une large partie des assurés sociaux et notamment de ceux exerçant des métiers pénibles et dangereux».
Or, les mesures prises au cours des dernières années par les pouvoirs publics donnent à penser qu’ils entendent s’engager sur cette voie-là : augmentation de 2,2% en 1994 et de 1,8% en 2007 de la cotisation du salarié, puis de celle de l’employeur de 2,5% en 2002 et de 1,8% en 2007, révision des conditions de départ à le retraite (avec une augmentation de deux ans pour l’âge – à 57 ans – et du nombre d’années travaillées – à 35 – et limitation du plafond de la pension de retraité à 50% du salaire, etc.
Toutes mesures qui, d’après l’UGTT, «n’ont pas permis de résorber le déficit des caisses sociales» et qui, dans la meilleure des hypothèses «ne permettraient que de l’atténuer».
Dans les négociations sur le financement des caisses sociales dont elle demande la tenue, l’UGTT entend plaider pour le maintien de l’âge du départ à la retraite – «surtout pour les métiers pénibles et dangereux » –, et «la non-augmentation des cotisations, parce que cela réduirait le pouvoir d’achat des salariés et alourdirait le fardeau des entreprises nationales en augmentant le coût de leur production, alors qu’elles souffrent de la concurrence internationale et du phénomène du marché parallèle».
Par contre, l’UGTT «refuse catégoriquement les appels à l’introduction de la capitalisation partielle ou totale parce qu’elle représente un grave danger pour le système de sécurité sociale, nos acquis nationaux dans la stabilité et l’équilibre».La centrale syndicale propose «la diversification des sources de financement des caisses sociales à travers l’injection d’une contribution directe de l’Etat prise sur l’argent de la communauté nationale, à l’instar de certaines expériences internationales ». Attachée à un régime répartitif garantissant «la solidarité entre toutes les catégories et générations de salariés et assurés sociaux», elle appelle également les pouvoirs publics à faire preuve de fermeté à l’égard de ceux qui fraudent le fisc en ne déclarant pas «les vrais salaires et revenus», et dans «le recouvrement des dettes à l’égard de la sécurité sociale afin de fournir la liquidité financière nécessaire pour permettre aux caisses de respecter leurs engagements envers leurs adhérents».
Un vaste chantier dont le lancement ne doit pas être retardé davantage, estime l’UGTT. Un avis partagé par El Amouri. Convaincu que «la réforme du régime de retraite sera plus difficile que celle du système d’assurance maladie», cet universitaire affirme que cette réforme «devra avoir lieu avant 2012, c’est-à-dire avant que la catastrophe des caisses de sécurité sociales n’ait lieu».
K. Lariani