Tout en saluant les politiques budgétaires du gouvernement tunisien, qui ont maintenu les équilibres macro-économiques du pays à des niveaux modérés, la mission du Fonds monétaire international (Fmi) ayant séjourné à Tunis du 2 au 15 juin souligne la nécessité de poursuivre l’adaptation aux évolutions d’un environnement international incertain.


«La reprise de la croissance économique mondiale s’est dessinée plus rapidement que prévu, mais reste très différenciée suivant les pays. Pour les pays de l’Union européenne (UE), où se trouvent les principaux partenaires de la Tunisie, la croissance reprendrait de manière plus graduelle et est sujette à des risques baissiers», note la mission dans le communiqué qu’elle a publié à l’issue de son séjour tunisiens. Elle ajoute : «Dans ce contexte, les politiques macroéconomiques de la Tunisie devront pouvoir s’adapter aux évolutions d’un environnement international incertain pour accompagner au mieux une amélioration de la croissance tunisienne.»

Parer aux pressions inflationnistes
A ce propos, la mission relève avec satisfaction que «les autorités maintiennent une politique budgétaire modérée, avec un déficit budgétaire à environ 3% du Pib en 2010, afin d’éviter qu’un retrait du stimulus budgétaire engagé en 2009 n’affaiblisse la reprise de l’activité économique.» Elle estime, par ailleurs, que «le déficit budgétaire ne devrait pas fragiliser les équilibres macroéconomiques, en particulier en matière d’endettement public et d’inflation, alors que le solde extérieur pourrait se dégrader temporairement.»
Soulignant également le succès de la BCT dans ses actions visant à stériliser la liquidité abondante, la mission appelle à la consolidation de ces actions, «afin de parer à une remontée éventuelle des pressions inflationnistes ou une croissance trop élevée du crédit.»
Tout en notant l’amélioration de la performance de la BCT en matière d’opérations de politique monétaire, à travers la modernisation des instruments du marché monétaire, la mission réaffirme son «appui à ces orientations de politique budgétaire et monétaire des autorités en 2010, qui visent à maîtriser les équilibres macroéconomiques tout en poursuivant le soutien à l’activité et en maintenant des marges de manœuvre pour pouvoir faire face aux risques de l’environnement international.»
Sur la base de ces analyses, le Fmi estime que l’objectif de croissance du Pib de 3,8% en 2010 pourrait être réalisé, «à condition qu’il n’y ait pas d’autres effets retardés de la crise mondiale», soulignent cependant ses experts.

Maintenir la croissance pour résorber le chômage
«A moyen terme, l’objectif principal de la Tunisie est la réduction du chômage grâce à une croissance soutenue et au renforcement de la résilience de l’économie tunisienne pour faire face aux chocs externes, notamment à travers la diversification des marchés des exportations», estime l’institution financière internationale. Notant une légère augmentation du taux de chômage en 2009, déjà relativement élevé, particulièrement chez les jeunes diplômés, en raison du ralentissement économique, la mission explique que, «dans un contexte de croissance modérée à moyen terme chez les partenaires traditionnels de la Tunisie, il sera nécessaire que les politiques et réformes programmées par les autorités visant au développement de nouveaux marchés et à l’émergence de nouvelles sources de croissance dans des secteurs à haute valeur ajoutée puissent porter leurs fruits rapidement afin d’accroître le potentiel de croissance à long terme.»

Convertibilité du dinar d’ici 2014
La mission considère, par ailleurs, qu’«avec la reprise économique graduelle, la nécessité de maintenir le stimulus budgétaire disparaîtra et permettra de réengager la consolidation budgétaire à partir de 2011 afin de consolider la tendance baissière du taux d’endettement public et maintenir des marges de manœuvre en cas de besoin.»
«Cette orientation adoptée par les autorités s’appuiera sur une maîtrise des dépenses budgétaires courantes, en particulier en adoptant une réforme du système de sécurité sociale qui assurera la viabilité financière des régimes de retraite», note la mission. Avec la politique monétaire vigilante de la BCT, qui vise à parer à toute remontée éventuelle des pressions inflationnistes, «la préservation des équilibres macroéconomiques et la poursuite de l’ouverture graduelle de l’économie tunisienne, avec l’objectif de convertibilité du dinar d’ici 2014, continueront à créer un environnement sain favorisant l’investissement privé.»
Pour accroître l’investissement dont elle a besoin pour assurer sa croissance, la Tunisie doit aussi «poursuivre ses politiques visant à améliorer le climat des affaires, notamment en simplifiant les procédures douanières et en créant de meilleures infrastructures pour la promotion de l’investissement et le commerce international», concluent les experts du Fmi, dont la mission en Tunisie s’inscrit dans le cadre des consultations régulières au titre de l’Article IV des statuts de l’institution, qui requiert une revue annuelle des politiques économiques de tous les pays membres du FMI. La revue annuelle concernant la Tunisie sera conclue par la préparation d’un rapport qui sera discuté par le Conseil d’administration du Fmi courant juillet.

4,2% de croissance pour 2010 et 3,5% pour 2011

Dans son dernier Rapport sur les perspectives de l’économie mondiale, publié en avril, le Fmi crédite la Tunisie d’un taux de croissance de 4% en 2010 et de 5% en 2011, sachant que ce taux était de 3% en 2009 et de 4,6% en 2008. Pour ce qui est des prix à la consommation, les projections du Fmi tablent sur 4,2% pour 2010 et 3,5% pour 2011, autant qu’en 2009, mais à des taux moins élevés qu’en 2008 (5%).
La Tunisie réalisera ces taux de croissance sous réserve que les exportations, le tourisme, les envois de fonds et les Ide continuent à progresser, souligne le Fmi qui rappelle que «la mollesse de la reprise en Europe pèse sur la croissance des exportations, les envois de fonds de l’étranger et les recettes du tourisme dans d’autres parties de la région Moyen-Orient/Afrique du Nord (Moan), dont le Maroc et la Tunisie, encore que les données récentes indiquent une amélioration graduelle de ces flux».

 

I. M.

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