Pour célébrer son 25e anniversaire, la société Dorémail a inauguré, jeudi, son nouveau showroom à Aïn Zaghouan, qui servira d’écrin pour les produits de l’entreprise. Les médias étaient invités à l’événement.



Le nouveau showroom, conçu par le bureau d’architecture et de design Dzeta, est divisé en deux espaces indépendants: l’un pour le passé, une sorte de musée de la faïence tunisienne, l’autre pour le présent et un hall central pour faire la jonction. Deux autres showrooms seront ouverts à Sfax, l’an prochain, et un autre suivra, une année plus tard, à Sousse.

Passage du flambeau
Homme de culture et de goût, Mohamed Masmoudi peut maintenant se concentrer sur sa passion de toujours: les livres, en veillant notamment au développement de son autre fleuron: Sud Edition. Et pour cause: l’entreprise Dorémail qu’il a fondée en 1984 avec son épouse est aujourd’hui entre de bonnes mains.
La passation du flambeau à la deuxième génération, épreuve à haut risque en Tunisie, s’est passée dans l’ordre. Raouf Masmoudi, qui assure la direction technique de l’entreprise depuis ses débuts, a été rejoint en 1991 par sa sœur Monia Masmoudi. Depuis, le tandem a assuré le développement de l’entreprise familiale qui emploie aujourd’hui 80 personnes réparties entre cadres, ouvriers et artisanes.
De simple unité d’émaillage de carreaux céramiques industriels, Dorémail est devenue l’un des leaders du marché de la faïence en Tunisie. La relève, qui s’est inscrite dans la droite ligne des convictions parentales, s’est faite avec la créativité et le sens du design et de la couleur, qui font aujourd’hui la réputation de la marque. Ce qui fait dire à son fondateur, Mohamed Masmoudi, non sans quelque fierté: «Dorémail est aujourd’hui un lieu de rencontre des technologies, du savoir-faire ancestral et d’une sensibilité à la beauté de notre héritage esthétique partagée par ceux qui y travaillent.»



Allier tradition et modernité

Pour les Masmoudi, l’esthétique est en effet le maître mot. Il lie tous les membres de l’équipe, à commencer par les artisanes, auxquelles on a appris le plaisir de dessiner, l’art de produire et l’émotion qui se dégage du travail bien fait. Alliant tradition et modernité, les Masmoudi revisitent le carreau traditionnel pour le rendre au goût du jour, donc plus léger, plus fonctionnel, plus adapté à la vie moderne. «Nous cherchons notre inspiration dans le très riche répertoire du passé, sans servilité, pour aller bien au-delà de la libre interprétation formelle», explique le fondateur de l’entreprise. C’est ainsi que les Masmoudi ont revisité plusieurs modèles anciens pour étoffer la gamme de leurs produits. «Recopier l’ancien m’a permis de mieux comprendre et aimer ce métier», affirme à ce propos Raouf Masmoudi.
En fait, Dorémail ne se contente pas de recopier ou de moderniser l’ancien, l’entreprise créé aussi ses propres lignes modernes, en faisant confiance aux élans créateurs de ses designers. Elle cherche aussi à «se distinguer en résistant à la tentation de reproduire ce que nous proposent, depuis l’Europe, les fournisseurs d’équipements et de matières premières», comme l’explique encore Si Mohamed. Son principal credo étant de «créer pour les Tunisiens un cadre de vie chaque jour plus agréable et plus adapté à leur sensibilité spécifique, marquée, souvent à leur insu, par la stratification des multiples apports des siècles.»

Une vie consacrée à l’art et à la littérature

On ne peut célébrer le 25e anniversaire de Dorémail sans souligner, surtout pour les nouvelles générations, le parcours exceptionnel de son fondateur. Mohamed Masmoudi, né en 1934, est historien de formation. Il consacre une grande partie de sa carrière à l’étude et à la mise en valeur du patrimoine culturel tunisien. Ainsi, entre 1958 et 1960, il est assistant au Musée du Bardo. En 1965, il fonde le musée de Sfax (Dar Jallouli) et dirige le Centre national des arts et traditions populaires de 1965 à 1972. En 1967, il fonde l’Association de sauvegarde de la Médina de Tunis et devient son premier vice-président. Avant de créer Dorémail, Si Mohamed dirige l’Office national de l’artisanat tunisien (Onat) de 1980 à 1987. Grand lecteur et amateur de lettres, il s’investit, parallèlement, dans l’édition. Ainsi, entre 1960 et 1962, il est directeur des publications à Société nationale d’édition et de diffusion (Sned), fait un passage aux éditions Cérès, de son ami de toujours Mohamed Ben Smaïl, et fonde (et dirige) en 1972 la Maison arabe du livre (Mal), société mixte tuniso-libyenne. En 1975, il crée Sud Editions, sa propre maison, qu’il anime et dirige toujours, célèbre pour sa collection ‘‘Ouyoun Al-Mouâssara’’ (Sources de la contemporanéité), qui réunit l’essentiel de la création romanesque tunisienne moderne.

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