25% de croissance dans les services et un nouveau Code d’investissement en 2012, annonce Noureddine Zekri, directeur général de l’Agence de promotion des investissements étrangers (Fipa), dans cet entretien avec Kapitalis.

Propos recueillis par Aya Chedi


La Tunisie est certes boudée actuellement par les investisseurs étrangers. Mais l’année 2011 n’est pas aussi désastreuse qu’on le pense. Au moins, on se penche sur le traçage des grandes lignes de ce que deviendra l’investissement direct étranger dans les années à venir en Tunisie.

 

 

Kapitalis : Quels sont les secteurs pouvant intéresser les investisseurs étrangers et quels sont les moyens de les promouvoir ?

Noureddine Zekri : Depuis la révolution, nous avons constaté que plusieurs investisseurs étrangers viennent prospecter les secteurs qui étaient auparavant monopolisés par les anciens clans au pouvoir ainsi que les autres qui étaient déjà ouverts aux investisseurs étrangers.

Aujourd’hui nous comptons beaucoup de secteurs qui s’ouvrent aux étrangers et qui sont prometteurs tels que les énergies renouvelables, l’environnement, la recherche et développement, qui peut être promu à un avenir attrayant. Bien sûr, tout cela nécessite une révision de la réglementation afin de l’adapter à la nouvelle demande. Car il existe parfois des obstacles réglementaires qui empêchent le bon déroulement des investissements. Ensuite, il faudrait que les opérateurs dans ces secteurs clarifient à leur tour leurs priorités. Soit une clarification des projets proposés aux investisseurs étrangers, mais ce que je peux vous assurer c’est que l’intérêt est assez perceptible, et nous avons reçu beaucoup d’investisseurs, notamment dans le secteur des énergies renouvelables.

Juste pour donner un indice sur l’intérêt porté à la Tunisie, on note la baisse du flux des investissements directs étrangers au cours de 10 derniers mois et qui est de 22%, mais nous avons enregistré une croissance de plus de 25% dans le secteur des services.

Il faut tout de même dire que ce secteur n’a pas été trop touché par la défectuosité enregistrée au niveau de l’appareil logistique, puisqu’il n’a pas d’opération d’export, nécessitant des relations avec les ports et autres.

Dans beaucoup de secteurs, tels que les unités de développement de logiciels, l’activité ne s’est pas arrêtée. Ces unités ont même su se développer et certaines d’entre elles ont des programmes de recrutement et d’autres sont en train d’effectuer des extensions.

Nous optons pour les secteurs qui offrent le plus d’emplois pour les diplômés, et ils ne sont pas forcément de type capitalistique.

Quels sont ces secteurs ? Et quels sont les moyens de réaliser vos objectifs et comment comptez-vous rehausser la valeur ajoutée du produit tunisien ?

On ne devrait plus s’orienter vers les industries traditionnelles telles que le montage et autres. La Tunisie doit s’investir dans les services à haute valeur ajoutée. On compte tout de même certains secteurs où cette valeur ajoutée est acquise telles que les industries aéronautiques qui sont en train de se développer. Il y a aussi le secteur de l’offshoring, qui offre pas moins de 25.000 postes d’emploi dont beaucoup d’ingénieurs. C’est ce qu’il faut intensifier.

Nous pensons qu’il faut d’abord améliorer notre offre locale, améliorer la formation et ainsi la qualité des ressources humaines, surtout les ingénieurs. Sinon donner des formations complémentaires à nos ingénieurs pour qu’ils répondent mieux aux besoins des entreprises.

Le deuxième facteur important et sur lequel il faut s’atteler, c’est celui de l’infrastructure. D’abord l’infrastructure traditionnelle, c’est-à-dire les locaux, où nous enregistrons un certain manque. On parle ici de locaux de caractéristiques bien déterminées dans des zones habilitées, là où on trouve des ingénieurs. Par exemple, les entreprises du secteur de l’offshoring doivent être dans le tissu industriel et économique même.

Le troisième facteur concerne la réglementation qui ne doit pas comprendre des dispositions bloquantes.

Ce qui est actuellement le cas !

Oui, certaines réglementations le sont. Mais il y a lieu de les améliorer. C’est un impératif.

S’attend-on à de nouveaux investissements dans le secteur financier ?

C’est un secteur assez important. On doit évoquer ici les mesures d’accompagnement, si nous devons vraiment améliorer l’attractivité de notre pays. Et là, deux facteurs importants sont à mentionner. Le premier concerne l’assainissement et la mise à niveau du secteur financier, et le second l’amélioration de la logistique. Le port en eaux profondes, à titre d’exemple, d’autres pays voisins ont réussi à le construire alors que ceci manque en Tunisie. Le port de Radès ne peut pas répondre actuellement à nos ambitions.

Peut-on s’attendre à une révision du Code d’investissement ?

Ce code est en train d’être revu. Il va être modifié, et d’ici la fin de 2012, il sera remplacé par un nouveau texte, car il existe d’autres choix. Le chantier est en cours et la réforme répondra aux nouvelles priorités apparues dans le pays après la révolution, surtout le développement régional.

L’intention est-elle de créer des emplois massifs aux dépens d’un produit tunisien à haute valeur ajoutée, qui pourrait venir après ?

Nous avons besoin de tous les investissements. Les investissements d’emplois massifs nous les avons attirés tels que les projets de Yazaki à Gafsa, Schaumberg à Bejà, Draxelmaier à Siliana, Somitumo à Jendouba, Ayora à Kairouan. Pourquoi ces entreprises sont-elles allées dans ces régions ? Parce qu’elles ont trouvé une mine de main d’œuvre qui n’est pas disponible dans les villes côtières. L’investisseur est quelqu’un d’objectif, là où il trouve ce qu’il demande, c’est là qu’il s’installe.

Le nouvel investissement turc annoncé à Sidi Bouzid intègre-t-il donc cette logique ?  

Bien sûr. Dans notre activité promotionnelle, nous sommes actuellement en train d’attirer tous genres de projets. Pour ce qui est des investissements provenant des pays du Golfe, tels que les grands projets touristiques intégrés et autres, nous leur disons, s’ils sont désireux, d’aller investir dans les régions ce qui contribuera à l’attractivité même de ces régions.